GB : les bienfaits de la libéralisation de l’énergie ne font pas l’unanimité

 
 
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La centrale électrique de Ferrybridge près de Leeds, dans le nord de l’Angleterre, le 30 octobre 2006 (Photo : Paul Ellis)

[26/11/2006 08:53:17] LONDRES (AFP) Dix ans après sa mise en oeuvre, la libéralisation du secteur de l’énergie au Royaume-Uni n’a encore guère profité aux consommateurs selon des experts, mais gouvernement et régulateur restent convaincus d’avoir fait le bon choix.

La distribution de gaz et d’électricité aux particuliers a été ouvert à la concurrence entre 1996 et 1999.

Selon l’Agence internationale de l’énergie, les tarifs du kilowatt-heure en Grande-Bretagne, taxes incluses, ont baissé de 1996 à 2000 pour le gaz et jusqu’en 2001 pour l’électricité, mais ont augmenté depuis à des niveaux records tout en restant parmi les plus bas de l’Union européenne.

Toute régulation des prix, en même temps, a été levée.

Ainsi depuis 2003, la facture annuelle moyenne des foyers a gonflé de 91% pour le gaz et de 58% pour l’électricité, selon Energywatch, organisme de protection des consommateurs indépendants, créé en 2000 par le gouvernement.

Elle atteint cette année 614 livres (907 euros) pour le gaz et 373 livres (551 euros) pour l’électricité.

Cette hausse résulte d’augmentations répétées des tarifs des six principaux fournisseurs –les Britanniques Centrica, Scottish and Southern Energy, Scottish Power, Powergen et npower (filiales des Allemands E.ON et RWE) et le Français EDF. Ce dernier, par exemple, a augmenté ses tarifs de 92% pour le gaz et de 54% pour l’électricité depuis 2003.

Une inflation attribuée à la flambée des prix de gros du gaz, que la Grande-Bretagne doit désormais importer en raison de l’épuisement des réserves en mer du Nord, et à la cherté du fioul et du charbon alimentant encore la plupart des centrales électriques du pays.

Mais face à l’explosion des bénéfices des distributeurs depuis trois ans, tout le monde n’accepte pas cette explication.

“Il est certain que les prix de gros ont augmenté, mais les tarifs de détail ont grimpé encore plus”, souligne Catherine Waddams-Price, du Centre pour la concurrence et la régulation de l’université d’East Anglia.

“Le régulateur devrait examiner les marges que les distributeurs dégagent entre les coûts auxquels ils sont confrontés sur le marché de gros et les prix qu’ils imposent aux consommateurs, poursuit l’universitaire. Nos études suggèrent qu’elles ont augmenté”.

“La transparence des marges est le problème essentiel”, confirme Paul Stewart, analyste de Datamonitor. “Alors que Centrica précise les bénéfices ou les pertes qu’il tire de ses activités de détail, les marges réalisées par les autres fournisseurs sur le marché de gros demeurent opaques”.

La consolidation du marché britannique de l’énergie est également mise en cause, alors qu’elle fait rage actuellement en Europe.

“Nous n’avons plus aujourd’hui que six gros fournisseurs, contre 26 lorsque le secteur a été ouvert. Le marché n’est plus concurrentiel aujourd’hui”, estime une porte-parole d’Energywatch.

“Je ne pense pas qu’ils fixent les prix de façon illégale, mais je ne crois pas non plus qu’ils fassent jouer la concurrence comme ils le pourraient. Cela relève davantage de ce que les économistes appellent l’entente tacite”, avance Catherine Waddams-Price.

Energywatch a d’ailleurs réclamé une enquête à la Commission de la concurrence, en rappelant que le nombre de foyers consacrant plus de 10% de leurs revenus au paiement de leurs factures est actuellement de 3 millions contre 1,8 million en 2003, alors que le gouvernement entend éradiquer cette “pauvreté énergétique” d’ici 2010.

Face à ces critiques, l’Ofgem avance que la moitié des Britanniques ont désormais changé d’opérateur et économisé jusqu’à 20% sur leur facture énergétique, en se disant convaincu que “l’ouverture des marchés à la concurrence est la meilleure façon de protéger les intérêts des consommateurs”.

C’est aussi la position du gouvernement, qui a salué en mars un rapport de la Commission européenne réclamant une plus grande concurrence sur les marchés énergétiques du continent.

 26/11/2006 08:53:17 – © 2006 AFP