Le développement économique de l’Afrique et l’expérience de la Corée

Par : Tallel
 
 

af271106.jpgTunis,
le 24 novembre 2006 –

M. Ji Hong Kim,économiste sud-coréen de renom, a rejeté la notion que
l’Afrique a tout à perdre et rien à gagner de la mondialisation, faisant
remarquer que bon nombre de pays africains peuvent faire face à la
compétition mondiale à condition de se doter d’une combinaison adéquate de
politiques économiques. «La
mondialisation offre d’énormes opportunités et comporte des risques
considérables, et les économies africaines devraient se préparer à
participer à l’économie mondiale
», a dit M. Kim, de l’Institut
coréen de développement, lors de la toute première Conférence économique de
la BAD à Tunis.

Il a fait remarquer que l’Afrique devait adopter une stratégie d’ouverture
sur le monde et une politique de promotion des exportations afin de
surmonter l’obstacle que représente la taille réduite des marchés intérieurs
et pour gagner des devises.

« Les pouvoirs publics doivent
s’attacher à mettre au point une politique industrielle fondée sur une base
solide dans un cadre attentif au marché
, a-t-il poursuivi au
cours de son exposé intitulé «Leçons tirées d’Asie : l’expérience coréenne».
Les mesures d’encouragement et de
dissuasion ont été mises au point pour favoriser l’efficacité au plan de
l’affectation de ressources limitées avec l’aide des forces du marché autant
que possible».

Au nombre des préalables institutionnels à améliorer dans les économies
africaines, M. Kim a cité des pouvoirs publics résolus et crédibles, un
système administratif fondé sur le mérite et exempt de corruption,
l’interaction entres les secteurs public et privé, des droits de propriété
et de contrat sécurisés de même qu’un système judiciaire méritant la
confiance des citoyens.

La situation économique qui prévalait en Corée du Sud au début des années
soixante était similaire à celle de bon nombre de pays africains faisant
actuellement face à une carence de ressources. La population coréenne
progressait alors au rythme annuel de 3% et le chômage était généralisé. En
1961, le PIB par habitant était de 82 dollars. Les exportations annuelles
avoisinaient les 43 millions de dollars et le déficit de la balance des
paiements était chroniquement déficitaire depuis 1948.

Les perspectives économiques de la Corée ont connu un bouleversement
considérable lié au développement remarquable survenu au cours des trois
dernières décennies. En effet, le PIB par habitant a fait un bond pour
dépasser 16 000 dollars et les échanges en volume se sont accrus pour
atteindre 289 milliards de dollars américains en 2005. La part du secteur
secondaire dans le PIB est passée de 14 % en 1961 à 28 % en 2005, alors que
celle de l’agriculture, de l’exploitation forestière et de la pêche a
reculé, passant de 37% à 3,5% sur la même période. Cette croissance
exponentielle a eu pour effet l’adhérence de la Corée à l’OCDE.

M. Kim a souligné le rôle central joué par l’État dans tout ce processus de
transformation, en faisant remarquer qu’au cours des années 60 et 70, les
pouvoirs publics ont participé activement au processus de développement
économique, notamment en mettant au point et en surveillant les plans de
développement et en veillant à ce que le secteur privé réalise les objectifs
fixés, qui étaient révisés constamment suivant l’évolution de la situation
économique.

Selon M. Kim, deux facteurs clés avaient contribué au succès de la Corée.
D’abord, le pays n’avait cessé d’œuvrer à créer un consensus national autour
de l’orientation des grandes politiques économiques. Ensuite l’appui et
l’encadrement des pouvoirs publics, un entreprenariat local novateur et une
main-d’œuvre dévouée avec d’importantes opportunités d’affaires accessibles.

«Le
facteur clé, s’il en existe, expliquait le miracle économique coréen,
a fait observer M. Kim, semble
se résumer à ces deux phénomènes, qui ont permis au peuple coréen de
s’adapter avec succès aux défis tout en réduisant les risques».

Plus de 250 participants, parmi lesquels d’éminents chercheurs, des
économistes, des professeurs d’université, des cercles de réflexion
africains et des représentants d’organisations internationales, dont la
Banque mondiale, l’OMC, le Département britannique du développement
international (DfID), le Consortium pour le développement économique en
Afrique (CREA) ayant son siège au Kenya et la Commission économique des
Nations Unies pour l’Afrique (CEA), ainsi que des hauts cadres des pays
membres ont pris à cette conférence de trois jours.

La conférence est marquée par une série d’exposés et de discussions portant
sur des sujets variés, notamment : «Sources de la croissance en Afrique :
agriculture, industrie manufacturière, services, TIC, assise technologique»,
par M. Alan Gelb, directeur à la Banque mondiale ; «Contraintes
d’approvisionnement et exportations : tirer parti de l’accès au marché, des
stratégies de marque, des réseaux et des chaînes d’approvisionnement et de
valeur», par M. Ademola Oyejide, professeur à l’Université d’Ibadan au
Nigeria ; «L’Afrique dans le système mondial de libre-échange», par M.
Patrick Low, directeur à l’OMC ; «Marchés des capitaux : rôles et défis»,
par M. Victor Murinde, professeur à l’Université de Nottingham ; «Banques
commerciales en Afrique subsaharienne», par M. Colin Kirkpatrick, professeur
à l’Université de Manchester.

(Communiqué BAD)