«Nous rêvons de devenir leader maghrébin dans les boissons aux fruits»
Algérien
de naissance, formé en Tunisie, ce jeune industriel, marié à une tunisienne,
veut devenir le n°1 du Maghreb dans les boissons aux fruits.
WMC : Vous avez affirmé dans votre intervention, lors des 21èmes
«Journées de l’Entreprise», que vous êtes le chef d’entreprise le plus
maghrébin. Comment ?
Slim Othmani :
Je suis tuniso-algérien. J’ai fait mes études supérieures en Tunisie. Ma
carrière professionnelle, je l’ai faite principalement en Algérie. De plus,
mon épouse est, elle, véritablement, un chef d’entreprise maghrébin,
puisqu’elle gère deux entreprises dans le même secteur d’activité, l’une
basée en Tunisie et l’autre en Algérie.
Mon
épouse étant tunisienne, et moi étant algérien, je suis un vrai maghrébin
dans les tripes, et j’ai envie que les frontières sautent définitivement. Je
voudrais me sentir chez moi dans le Maghreb et ne plus avoir à subir cette
contrainte quand je passe d’un à un autre. Cela en ce qui concerne la
personne.
Pour
ce qui est de mon entreprise, elle n’a pas encore de dimension maghrébine
–du moins pas dans les faits. Dans la forme, elle commence à l’être.
Pourquoi ? Parce que j’en ai ouvert en 2005 le capital à un fonds
d’investissement géré par Tuninvest et qui en détient 28%.
J’en
suis très content et c’est une expérience extrêmement enrichissante.
Il
faut pouvoir imaginer la complexité de l’ouverture du capital d’une
entreprise familiale, qui a 40 ans d’âge, à un bailleur de fonds venant d’un
pays voisin que l’on regarde avec un peu de hauteur, parce qu’on se dit,
nous les Algériens, on a énormément de richesses, mais qu’on n’a pas pu
réussir économiquement, jusqu’ici du moins. Aujourd’hui nous nous battons
parce que nous voulons réussir.
Pour
cette raison, il a été difficile de présenter à la famille le projet
d’ouverture du capital. On l’a finalement accepté et on ne le regrette
absolument pas. On vit pleinement cette expérience maghrébine.
Quelles sont vos ambitions à l’échelle maghrébine ?
Nous
avons pour ambition de devenir le leader maghrébin des boissons aux fruits.
La dimension maghrébine est donc inscrite dans notre vision. D’ailleurs,
nous avons commencé à discuter avec des «compétiteurs» maghrébins, qui sont
aussi des partenaires avec qui nous échangeons et partageons de
l’information.
Nous
essayons de voir dans quelle direction nous pouvons aller ensemble et de
nous prémunir des grands groupes internationaux, qui ont des prétentions
très fortes sur le marché maghrébin. Nous voudrions pouvoir nous armer pour
leur résister.
Quelle forme envisagez-vous de donner à cette collaboration avec d’autres
opérateurs maghrébins ?
Nous
n’avons encore rien décidé. Nous en sommes encore au stade de
l’indentification de partenaires, en Tunisie, au Maroc et en Libye. La
culture étant essentielle dans ces rapprochements, nous devons essayer de
nous rapprocher de gens avec qui nous pourrons faire cette intégration ; des
gens qui partagent nos valeurs et notre vision du Maghreb, et qui, comme
nous, ont de l’ambition.
Est-ce que vous avez l’expérience du Maghreb en termes d’exportation ?
Nous
avons une expérience timide dans ce domaine. Au milieu des années 90, nous
avons vécu une expérience un peu difficile avec la Tunisie. Nous avons été
les premiers à y promouvoir les boissons aux fruits conditionnés importés
d’Algérie. Pour la première fois, le consommateur tunisien a vu des produits
au rapport qualité/prix acceptable. Subitement, l’environnement industriel
tunisien a réalisé qu’il y avait une opportunité et cela s’est traduit par
une levée de boucliers extrêmement forte de la part de certains opérateurs
nouveaux. Ce qui a conduit à une élévation des tarifs douaniers de façon
prohibitive pour le produit importé d’Algérie, pendant un certain temps.
Mais il y a deux ou trois ans, M. Mondher Zenaïdi est intervenu pour dire
que la protection douanière n’avait pas de sens et y a mis fin.
Je
suis aujourd’hui libre d’exporter en Tunisie sans payer de taxes, à
l’exception de la taxe sur la consommation intérieure. Mais je ne l’ai pas
fait parce que j’ai restructuré l’entreprise et j’ai d’abord besoin de me
renforcer sur le marché algérien.
Est-ce que vous avez un plan précis pour aborder le marché maghrébin ?
Nous
souhaiterions ouvrir rapidement des négociations avec des opérateurs
maghrébins en vue de créer une entreprise maghrébine dans les boissons aux
fruits, à l’horizon 2009. C’est le temps qu’il faut pour une intégration.
J’espère que le système financier et fiscal nous permettra de faire une
intégration par échange d’actions, plutôt que par un flux de capitaux. Nous
pourrions aussi remonter toutes les actions vers un holding.