Les
prix de l’ADSL vont-ils baisser ? Selon quelques observateurs bien au fait
des choses de l’Internet en Tunisie, il est difficile de prévoir une baisse
quelconque dans les mois, voire dans les années à venir. Pire encore, selon
cet observateur, l’opérateur serait même déficitaire au vu des prix
actuels ! C’est la meilleure ! Avoir le monopole et se permettre d’être
déficitaire alors que ses prix sont nettement supérieurs à ceux du Nord de
la Méditerranée ou encore à ceux du Maroc.
Notre interlocuteur nous invite à de simples réflexions que nous allons
partager avec vous. Chacun analysera de son côté et dans son coin ces
réflexions.
Première réflexion : Un internaute européen navigue dans des sites
européens, essentiellement, et ne consomme pas la bande passante internationale
facturée à un prix hyper élevé. Ce qui n’est pas le cas des internautes
tunisiens qui, non seulement font l’essentiel de leur navigation à
l’international, mais en plus sont des champions du téléchargement. Et comme
chacun le sait, il n’y a rien qui concurrence autant que le téléchargement dans
la consommation de bande passante.
Deuxième réflexion : les Européens paient leur bande passante en euros et
se font payer par leurs clients en euros. Chez nous, la bande passante est payée
en euros, mais le client final la paie en dinars ; dinar qui, comme chacun le
sait également, s’est très fortement déprécié par rapport à l’euro, notamment
ces deux dernières années. Désavantagés par le cours du change et par le niveau
du dinar, nous ne pourrions réclamer une baisse comme celle dont profitent les
Européens.
Troisième réflexion : Les opérateurs européens et notre Tunisie Télécom
achètent leur matériel chez les mêmes équipementiers en général (Nokia, Siemens,
Alcatel, Huaweï, ZTE, Ericsson, etc.). Or, au vu du parc d’abonnés en Tunisie et
de la superficie de notre pays, Tunisie Télécom n’achète pas ce matériel au même
prix que l’achèterait France Télécom, Telefonica ou encore T-Mobile et Vodafone.
Il est clair que plus on achète de matériel, plus les prix baissent. Tunisie
Télécom se retrouve donc désavantagée à la base par rapport à ses homologues
européens. Pire encore, les perspectives ne sont même pas roses puisqu’il est
inimaginable d’avoir un parc d’abonnés ADSL supérieur au parc d’ordinateurs dans
le pays (moins de 600.000) ou encore du nombre de lignes fixes (1,2 million). Et
comme le nouveau partenaire stratégique de notre opérateur n’a pas de filiales
internationales d’envergure, il n’est pas permis d’espérer quelque chose de ce
côté.
Quatrième réflexion : pour faire face à ses différentes dépenses et
amortir ses charges, l’opérateur se doit de faire payer les 12 FSI tunisiens
(privés et étatiques) des services qu’ils reçoivent. Or, ces FSI ne seraient pas
en train de payer Tunisie Télécom le prix réel de ces services et ce pour des
considérations d’ordre politique et social. En fait, ils bénéficient de prix
fort avantageux (on croit savoir que même certains ne paient rien) qu’ils font
répercuter sur le client (établissements d’enseignement supérieur,
établissements de santé, écoles, particuliers, etc.). Avec un partenaire privé
qui n’a pas les mêmes objectifs qu’une entreprise étatique, les enjeux changent
considérablement, et ces FSI se retrouvent, du coup, dans l’interrogation.
Vont-ils continuer ou non à pratiquer des prix somme toute avantageux pour le
client ?
Cinquième réflexion : dans les coulisses de Tunisie Télécom, on prépare
actuellement des packs incluant un abonnement ADSL et un forfait de consommation
téléphonique sur le fixe. Or, ce genre de packs est contraire au Code du
commerce en Tunisie puisqu’il impose à l’acheteur un produit pour pouvoir
acheter un autre. C’est comme si vous entreriez chez un épicier pour acheter des
œufs, mais qu’il exige que vous achetiez avec du lait !
Avec ces réflexions, il est utile aussi de rappeler que l’opérateur national
possède la bande passante internationale et la bande passante nationale, qu’il
bénéficie du monopole sur le réseau fixe et qu’il commande, en somme, toute
l’infrastructure. De même, il faut rappeler le changement de politique
commerciale observé chez l’opérateur lorsqu’il a décidé, du jour au lendemain,
de stopper l’ADSL pour les abonnés du prépayé (alors que c’est justement là que
l’on a observé le grand boom en matière d’abonnements) et de lancer une
politique de migration du fixe prépayé vers le fixe post-payé dont les Tunisiens
ne veulent plus en entendre parler à cause des frais qu’il engendre.
Comment sera l’avenir de l’ADSL en Tunisie ? Comment sera l’avenir du fixe ?
Comment seront les prix ? Bénéficiera-t-on de baisses à l’instar des
consommateurs européens ? Autant de questions qui nous titillent, et nous avons
beau être proches de notre opérateur et du ministère de tutelle, nous avouons
ne pas avoir de vision claire sur l’avenir de ce secteur en
Tunisie.