L’UMA et les gouvernements : Divergences sur la manière et la vitesse de faire l’intégration
La
8ème session du Conseil des ministres maghrébins du Commerce a confirmé la
relance de l’activité des structures de l’UMA et la persistance de
divergences entre les Etats membres quant à la manière et la cadence de la
création d’un espace économique intégré.
Le
«machin» maghrébin s’est certes remis en branle après de longues années
d’inertie quasi-totale; des projets vitaux pour l’avenir de la région
–concernant notamment la création d’une zone de libre-échange et l’étude de
la faisabilité d’une communauté économique maghrébine, inscrits à l’ordre du
jour de la 8ème session du Conseil des ministres chargés du Commerce (Tunis,
24-25 janvier 2007), avec des barèmes douaniers et des politiques
maghrébines dans la perspective de l’entrée en vigueur de la zone de
libre-échange euro-méditerranéenne en 2010-, ont été déterrés, mais les
cinq membres de l’Union du Maghreb Arabe sont loin de se presser à la même
vitesse, ni d’être sur la même longueur d’onde.
Bien
sûr, les divergences ne sont pas claironnées sur les toits, d’autant qu’on
prend soin de les couvrir d’une couche de «vernis» diplomatique. Toutefois,
il suffit de passer les discours à la moulinette pour comprendre qu’il y a
encore loin de la profession de foi à la concrétisation du rêve maghrébin.
Pour
la Tunisie, comme l’a réitéré M. Mondher Zenaïdi, ministre du Commerce et de
l’Artisanat, l’édification d’un ensemble maghrébin intégré est un choix
stratégique sur lequel elle a misé et mise toujours pour «renforcer sa
position sur le plan régional et international». D’ailleurs, les Tunisiens
considèrent qu’«il est grand temps pour progresser plus rapidement sur la
voie de la réalisation de l’intégration maghrébine», et sont convaincus que
les résultats des travaux des groupes d’experts chargés d’élaborer le projet
de traité instaurant une zone de libre-échange maghrébine «préparent la voie
à la création d’un vaste marché» fonctionnant selon les mêmes règles et
normes.
Même
sens de l’urgence du côté marocain. M.Mustapha Machhouri, ministre marocain
du Commerce extérieur, considère que le contexte économique international et
régional impose aux pays de l’UMA «de déployer de plus grands efforts en vue
de créer un espace économique maghrébin capable de relever les défis de la
mondialisation et de renforcer sa position vis-à-vis des autres groupements
économiques». Il estime «impératif de coordonner nos politiques économiques,
commerciales, et douanières et d’accélérer l’élaboration de la version
finale du projet de zone de libre-échange maghrébine». Le ministre marocain
a même été jusqu’à lever un coin du voile sur la manière dont son pays voit
cette zone qui doit «englober tous les secteurs concernés par le commerce de
biens, y compris l’agriculture, en attendant que cette libéralisation
s’étende plus tard aux services».
Autre son de cloche du côté de l’Algérie, dont le ministre du Commerce, M.
Hechmi Jaaboub, a exprimé son «souhait sincère» que la 8ème session du
Conseil des ministres du Commerce maghrébins constitue «un noyau dur à
mettre en place adéquate en vue de construire le Maghreb arabe souhaité».
Tout
en saluant les résultats des travaux des groupes d’experts, le ministre
algérien a invité ces derniers «à poursuivre le travail et les consultations
(….) afin de présenter un cadre légal adéquat pour la création d’une
communauté économique maghrébine intégrée, selon une approche globale tenant
compte des spécificités économiques et commerciales de chaque pays».
M.
Ba Abderrahmane, ministre mauritanien du Commerce et de l’Artisanat, a
relevé que «les points inscrits à l’ordre du jour reflètent une vision
claire du chemin à suivre» en vue de réaliser l’intégration maghrébine.
Avant de formuler le vœu que le projet de traité de libre-échange soit
«finalisé le plus rapidement possible».
Prenant note de la «récente dynamisation des groupes de travail maghrébins»,
M. Achour Mrajaa Baiis, responsable au «Comité Populaire Général de
l’Économie, du Commerce et de l’Investissement» de Libye, a réaffirmé
«l’importance d’achever le travail» des experts.
Soulignant l’«extrême importance» de la réunion des ministres maghrébins à
Tunis, «dans le cadre de la poursuite de l’action progressivement en vue de
réaliser la circulation des services, des biens et des capitaux entre les
pays de l’Union, sur la base des intérêts communs de tous», et sachant
«toute l’importance du commerce des biens dans la réalisation des premières
étapes vers les objectifs fixés», M. Habib Ben Yahia, secrétaire général de
l’Union du Maghreb Arabe, a rappelé aux ministres maghrébins du Commerce,
qu’ils avaient déjà fait le constat lors de la précédente –la septième-
session de leur conseil, réunie en 2001 à Alger, fait le constat de
«l’inadéquation des instruments légaux mis en œuvre dans le domaine de la
coopération commerciale en vue d’encadrer les relations commerciales entre
les pays de l’Union» et que le Sommet de Tunis d’avril 1994 avait rendu
publique une déclaration sur «la nécessité de créer une zone de
libre-échange maghrébine, comme moyen de développer les échanges commerciaux
maghrébins». Et comme pour forcer un peu la main à ses interlocuteurs, le
secrétaire général de l’UMA leur a clairement dit qu’il était «urgent»
qu’ils donnent «les consignes nécessaires» au sujet de «la démarche
efficiente en vue de compléter» le projet de zone de libre-échange et de «le
concrétiser».