[31/01/2007 22:03:59] LONDRES (AFP) Le groupe indien Tata Steel a remporté mercredi contre le brésilien CSN les enchères sur le groupe sidérurgique Corus, mettant plus de 10 milliards d’euros sur la table pour une opération qui illustre la montée en puissance des entreprises des pays émergents. Tata Steel a offert 608 pence par action Corus contre 603 pour son rival Companhia Siderurgica Nacional, valorisant ainsi le groupe anglo-néerlandais à 7 milliards de livres (13,7 milliards de dollars, soit 10,6 milliards d’euros), dette comprise. Corus a recommandé la transaction à ses actionnaires qui voteront dans quelques semaines. Il apparaît comme le grand vainqueur de ce processus d’enchères rare, imposé aux deux rivaux par le gendarme britannique des fusions, faute de les voir se départager autrement. Avant l’arrivée de CSN en effet, Corus avait accepté à l’automne une première offre du groupe indien à 455 pence, soit un quart de moins que l’offre finale. La Bourse de Bombay s’est inquiétée mercredi de la forte somme déboursée par Tata, qui a perdu 10,66% à 463,95 roupies à la Bourse de Bombay tandis que Corus caracolait à Londres, en hausse toute la journée de quelque 7%. De nombreux analystes ont accusé Tata Steel d’avoir trop déboursé dans cette affaire, l’un d’eux évoquant un rachat fondé autant sur l’orgueil que sur la raison. Le président du conglomérat Tata, Ratan Tata, a rétorqué que le marché avait “une vision à court terme et sévère”, et assuré que Tata Steel n’avait “en aucune manière mis en péril les intérêts des actionnaires”.
Le syndicat britannique GMB, très présent chez Corus, s’est dit “inquiet de la perspective de voir des milliers de membres payer la facture du rachat avec leur emploi”. Corus emploie 47.300 personnes dont 24.000 au Royaume-Uni et 11.400 aux Pays-Bas. L’actuel directeur général de Corus, le français Philippe Varin, a estimé qu’il y avait “d’importantes synergies” entre les deux groupes tout en repoussant les craintes de suppression d’emploi. Mais il a reconnu qu’il ne pouvait graver ces prédictions dans le marbre. Tandis que CSN faisait savoir qu’il allait poursuivre son expansion au Brésil et à l’international, Tata et Corus alliés deviendront le cinquième aciériste mondial selon eux, le sixième selon les chiffres de la fédération internationale de l’acier, avec quelque 23 millions de tonnes produites par an. M. Tata a salué l’entrée de l’industrie indienne dans la mondialisation et un “pas visionnaire” pour l’Inde. Ce rachat illustre en effet la montée en puissance des groupes industriels des grands pays émergents, aux dépens des puissances traditionnelles. En 2006, le sidérurgiste européen Arcelor a été racheté pour 27 milliards d’euros par le leader mondial du secteur, Mittal Steel, coté aux Pays-Bas mais dirigé par l’homme d’affaires indien Lakshmi Mittal. Toujours dans l’acier, l’américain Oregon Steel Mills a été repris par le russe Evraz. Un autre indien, United Breweries, est aussi en passe d’acheter le fabricant écossais de whisky Whyte&Mackay, alors que le groupe pharmaceutique indien Ranbaxy convoite la division de médicaments génériques de l’allemand Merck KGaA, évaluée à quatre milliards d’euros. Des groupes chinois, AS Watson et Nanjing Automobile, ont acheté la chaîne de parfumerie française Marionnaud ou le fabricant d’automobiles britannique Rover. Contrairement à Arcelor, qui avait repoussé dans un premier temps Mittal Steel, Corus, né en 1999 de la fusion entre British Steel et le néerlandais Hoogovens, souhaitait de longue date s’allier à un concurrent d’un pays émergent, disposant de gisements de minerai de fer. Reste à savoir si l’acier reste un secteur rentable. Les spécialistes divergent : l’agence de notation Standard and Poor’s s’attend ainsi à une baisse de la production en 2007, tandis que le cabinet de consultants britannique MEPS la voit progresser de 5,4%. |
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