[15/02/2007 19:45:52] PARIS (AFP) Les salariés français d’Alcatel-Lucent, sous le coup d’un plan supprimant près de 1.500 emplois, sont passés massivement à l’action jeudi, en débrayant ou se mettant en grève contre ce qu’ils considèrent comme des “délocalisations” de matière grise. Environ 45% des salariés se sont mobilisés, a reconnu la direction de l’équipementier en télécommunications, alors que les syndicats revendiquent, eux, “plus de 50%” de mobilisation. Quelque 800 salariés, surtout cadres et ingénieurs, ont débrayé le matin à Vélizy (Yvelines), 500 à Lannion (Côtes d’Armor), 400 à Villarceaux (Essonne), 400 à Orvault (Loire-Atlantique), et 300 à Illkirch (Bas-Rhin), selon les syndicats, qui évoquent un “mouvement de fond” dans la quinzaine de sites devant être touchés. En Bretagne, la mobilisation s’est prolongée en grève toute la journée et des appels à des arrêts de travail ont été lancés pour vendredi à Lannion et Rennes, ville où aura lieu également une “marche funèbre”. Le Conseil régional de Bretagne a bloqué jeudi à l’unanimité l’octroi d’une aide de 1,8 million d’euros à l’entreprise.
En Espagne, plusieurs dizaines de salariés, victimes de ce plan global de 12.500 suppressions d’emplois dans tout le groupe, ont manifesté devant le congrès mondial de la téléphonie mobile 3GSM de Barcelone. Les salariés français doivent se rassembler vendredi devant le siège parisien d’Alcatel-Lucent, durant le comité de groupe France où sera discuté le plan de sauvegarde de l’emploi (plan social) lancé mercredi, a indiqué la CFDT, syndicat majoritaire. Le porte-parole du groupe Alcatel-Lucent en France, Jean-Christophe Giroux, s’est engagé à ce qu’il n’y ait “que des départs volontaires”, sans “licenciement contraint”, notamment grâce à des préretraites, des aides aux projets et l’essaimage. Cette annonce n’a pas rassuré les salariés, qui s’inquiètent pour l’avenir même de l’entreprise. “S’ils commencent à s’attaquer aux forces vives de la boîte, je ne sais pas ce qui pourrait les arrêter”, s’interroge Corine Le Mouel, ingénieur à Velizy dans un secteur porteur dénommé “convergence” (3e génération de téléphonie mobile) qui emploie 80% d’ingénieurs et de cadres.
“Quelles études on va conseiller à nos enfants si la France a décidé de brader ses ingénieurs, au nom d’une logique de rentabilité boursière?”, s’interroge un collègue. Dans l’Ouest, les salariés sont “amers”: certains ont formé depuis plusieurs mois des ingénieurs chinois, et ont l’impression d’avoir préparé le terrain à des “délocalisations”. “J’ai en fait scié la branche sur laquelle j’étais assis. Ce sont eux qui vont faire vivre le produit”, déplore Patrick Giraud, ingénieur à Rennes. La direction conteste: “Nous essayons de nous redéployer au plus proche des clients dans le monde. Il n’y a pas de délocalisation de la R et D ou de fuite à l’étranger: le plan de suppressions d’effectifs ne vise pas à créer des emplois ailleurs”, se défend M. Giroux. |
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