[21/02/2007 10:17:40] FRANCFORT (AFP) La tension est montée d’un cran mardi entre Français et Allemands sur le dossier Airbus, chacun campant sur ses positions, ce qui retarde la mise en place d’un plan de restructuration vital pour l’avionneur européen en pleine crise. Le ton s’est durci mardi à Berlin, après la confirmation par le Premier ministre français Dominique de Villepin d’une suppression de 10.000 emplois chez l’avionneur européen. “Je ne peux pas vous dire avec la meilleure volonté du monde d’où le Premier ministre tient ses informations”, a lancé le porte-parole adjoint de la chancellerie, Thomas Steg, selon lequel aucune décision définitive n’a encore été prise. “Peut-être en sait-il plus que moi”, a réagi de son côté le coprésident allemand de l’exécutif d’EADS, Thomas Enders, à Hambourg (nord). Le gouvernement a de nouveau fait valoir mardi ses intérêts. “Le gouvernement allemand part du principe que les lieux de production allemands sont concurrentiels et productifs”, a dit M. Steg, alors que les spéculations se sont multipliées sur la cession de deux d’entre eux, Varel et Nordenham, dans le nord du pays.
Le coprésident français du conseil d’administration d’EADS, Arnaud Lagardère, a de son côté assuré que lui-même et l’Etat français seraient “intraitables sur les intérêts français” au sein d’Airbus. Il a toutefois rejeté l’idée que “le conflit franco-allemand s’envenime”. La direction d’Airbus avait prévu de présenter mardi son plan baptisé “Power8” mais avait dû faire marche arrière faute d’accord sur la répartition industrielle du futur long-courrier A350. La question Airbus sera abordée vendredi lors du sommet entre la chancelière conservatrice Angela Merkel et le président de la République française Jacques Chirac, à Meseberg près de Berlin, mais ce “ne sera pas un sommet sur Airbus”, selon M. Steg, soulignant qu’il revenait à la direction du groupe d’annoncer le plan. Berlin ne s’est pas privé d’intervenir ces dernières semaines. Le ministre de l’Economie Michael Glos est monté au créneau pour défendre les quelque 21.000 salariés et les sept sites que compte Airbus en Allemagne, allant jusqu’à menacer de rompre des contrats de défense avec la maison mère EADS si l’Allemagne n’était pas traitée de façon équitable dans le plan d’assainissement.
Pour s’assurer voix au chapitre, l’Etat allemand est aussi rentré dans le capital d’EADS, en acquérant récemment au sein d’un consortium de banques et de Länder une part de 7,5% du groupe. Le pays s’inquiète de payer le plus lourd tribut aux restructurations et de voir ses sites dépossédés des activités les plus technologiques. Les retards de production de l’avion géant A380, liés en partie à une répartition des tâches industrielles inefficace, a déjà plongé l’avionneur dans une crise sans précédent. Cela a permis à la France, qui détient 15% d’EADS, de prendre de facto la haute main sur Airbus, puisque Louis Gallois est à la fois co-président d’EADS et patron de l’avionneur. Noël Forgeard avait en son temps tenté de s’approprier les deux casquettes, sans y parvenir.
Les tensions sur Airbus interviennent peu après les récentes remontrances d’Angela Merkel vis-à-vis de la France sur un autre sujet qui fâche, l’indépendance de la Banque centrale européenne et l’euro fort, que certains hauts responsables veulent remettre en cause. Mme Merkel défend sans relâche depuis son accession à la chancellerie l’idée de champions industriels européens, dépassant les clivages nationaux. Mais concernant Airbus, il semble que ni Français, ni Allemands ne soient aujourd’hui en mesure de les surmonter, regrettait la presse allemande mardi. Pour le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung, “Airbus va se briser si Français et Allemands continuent d’agir comme ils l’ont fait jusqu’à présent”. |
||||||||
|