Champagne : quand des petits vignerons français tentent leur chance en Chine

 
 
SGE.EER35.100307094221.photo00.quicklook.default-245x153.jpg
Des Chinois s’apprêtent à boire une flûte de champagne lors d’un salon en mai 2005 à Shanghai (Photo : Liu Jin)

[10/03/2007 09:42:40] SHANGHAI (AFP) “Votre champagne est aussi bon que du Krug!”, lance un importateur chinois, Jimmy Lai, à Hélène Brochet-Hervieux, de la maison du même nom, qui lui répond tout sourire: “Le problème, c’est que nous sommes moins connus!”.

Sans la notoriété ni les moyens logistiques ou marketing des grandes marques déjà présentes, avec une production bien moindre, la jeune femme, son père et cinq autres producteurs familiaux sont venus de Champagne, région située à l’est de Paris, pour tenter de prendre pied sur le marché chinois à l’occasion d’un salon international des vins qui s’est tenu à Shanghai.

Père et fille, époux, frères, vignerons depuis des générations, ils ont été invités par Peng Jia, une étudiante de la province centrale du Hunan installée à Reims depuis cinq ans.

Bilingue, précieux trait d’union culturel, Mlle Peng leur a remis au départ un “Petit guide de survie des Champenois en Chine”, avec des conseils tels que tendre sa carte de visite à deux mains, ranger celle de son interlocuteur près du coeur après l’avoir lue attentivement en signe de déférence, développer ses “guanxi” (contacts) avec patience et persévérance…

Cependant, les ventes de champagne ne sont pas encore très élevées. Selon des estimations circulant au sein du milieu de la distribution, seulement 500.000 bouteilles auraient été envoyées en Chine en 2006, contre 840.000 uniquement à Hong Kong et 36,7 millions en Grande-Bretagne, premier marché à l’export, selon les chiffres officiels.

Car, si les vins tranquilles connaissent une belle progression, le prix du champagne reste trop élevé.

“Même s’il y a des taxes, on devrait avoir des prix plus raisonnables pour un champagne de qualité acceptable”, estime un distributeur qui souhaire rester anonyme.

Des champagnes de bas de gamme ne sont pas vendus à moins de 300 yuans (29 euros), souligne-t-il.

Cependant, venus de villages de la Marne ou de l’Aube, les six vignerons misent sur la croissance chinoise à deux chiffres et l’émergence de cette fameuse classe moyenne en quête d’art de vivre et de produits sophistiqués.

Et leur espoir a été entretenu par le succès de leur stand au salon de Shanghai.

“Pour les JO de Pékin et l’Exposition universelle de 2010 à Shanghai, il me faut ce genre de produits de luxe”, leur a lancé un importateur, tandis qu’un autre affirmait chercher du champagne pour Chongqing, une municipalité du sud-ouest en plein essor, comptant 30,6 millions d’habitants.

Malgré ce succès d’estime, aucun contrat n’a été signé, juste une promesse a été faite: un importateur s’est engagé à acheter 600 bouteilles à chacun, pour des hôtels de luxe et une clientèle haut de gamme. “Il ne veut pas du Moët qui se trouve dans les supermarchés”, se félicitent les Champenois.

Tous sont repartis aussi avec des dizaines de cartes de visite. “Il faut s’inscrire dans le temps, avec une démarche relationnelle et culturelle forte qui permettra d’aller plus loin qu’une rencontre ou une commande”, note Jean-Louis Brifflot, responsable de la coopérative Sanger, qui attend maintenant la visite des Chinois dans les caves de Champagne.

Il leur restera la partie la plus difficile: trouver un distributeur fiable qui connaisse les rouages de ce marché opaque où les restaurateurs réclament souvent un droit d’entrée.

A Shanghai, l’un des plus importants distributeurs, ASC, importateur des grandes marques Laurent-Perrier et Boellinger, a fait comprendre aux petits vignerons qu’il ne leur ouvrirait pas son portefeuille.

“Soyez prudents. Si vous commettez une erreur en choisissant un mauvais partenaire, cela peut avoir un impact négatif à long-terme”, a déclaré le président d’ASC, l’Américain Don St Pierre.

 10/03/2007 09:42:40 – © 2007 AFP