[16/03/2007 11:35:04] TOKYO (AFP) Un tribunal de Tokyo a condamné vendredi à deux ans et demi de prison ferme Takafumi Horie, ex-patron du portail internet Livedoor et jeune “gourou” de la nouvelle économie, pour un scandale financier qui a profondément choqué le Japon début 2006. Takafumi Horie, 34 ans, était jugé pour avoir truqué les comptes de Livedoor afin de transformer une perte en bénéfice au deuxième trimestre 2004, et pour avoir diffusé de fausses informations visant à manipuler le cours d’une action. “Dans cette affaire, la faute la plus lourde consiste à avoir trompé le jugement des investisseurs en faisant croire à une croissance” du groupe Livedoor, a argué le juge Toshiyuki Kosaka en rendant le verdict. “C’est la raison pour laquelle il mérite une peine d’emprisonnement”, a-t-il tranché. Au terme d’un procès-fleuve de six mois, le procureur avait requis quatre ans de prison ferme, accusant M. Horie d’être “le cerveau du crime”. Accablé par ses anciens collaborateurs, M. Horie avait plaidé non coupable, une technique de défense rare dans un pays où les chances de relaxe sont quasiment nulles pour qui se retrouve accusé devant un tribunal, et où afficher sa contrition est souvent le seul moyen d’adoucir un peu la sanction. “L’accusé n’a montré aucun remords et n’a pas eu le moindre mot d’excuse pour les actionnaires et les investisseurs qui ont subi des pertes importantes”, a déploré le tribunal. M. Horie s’est estimé lui victime d’un complot orchestré par l’establishment nippon, lequel ne cachait pas son aversion pour ce patron très médiatisé et non conformiste, amateur de voitures de sport et de commentaires à l’emporte-pièce. L’ancien PDG est arrivé vendredi au tribunal vêtu d’un costume sombre et d’une chemise blanche à col ouvert (il a tout de même mis une cravate juste avant d’entrer dans la salle d’audience), au milieu d’une véritable hystérie médiatique. Il a écouté le verdict debout et sans réagir. Il s’est ensuite incliné devant les magistrats et s’est rassis en affichant un sourire narquois. Il a immédiatement fait appel, et a été laissé en liberté provisoire. La caution de 300 millions de yens (2 millions d’euros) qu’il avait dû payer pour sortir de prison en avril a toutefois été portée à 500 millions de yens. Le palais de justice avait été investi par des centaines de journalistes, les télévisions nippones diffusant en direct la progression de la limousine de M. Horie dans les rues de Tokyo grâce à des caméras embarquées à bord d’hélicoptères. Toutes les chaînes de télévision ont interrompu leurs programmes pour présenter des flashes spéciaux, au cours desquels même le patron du restaurant coréen favori de M. Horie a été longuement interviewé en direct. Le jeune homme avait été arrêté en janvier 2006 et avait passé trois mois en prison avant d’être libéré sous caution. Sa chute brutale a stupéfié le Japon. En particulier, le scandale a provoqué un phénoménal vent de panique à la Bourse de Tokyo, où des milliers de petits porteurs affolés ont soudainement bradé tout leur portefeuille, manquant de peu de faire exploser le système informatique du marché. Takafumi Horie a longtemps été la coqueluche des médias et d’une partie de la jeunesse, qui voyaient en lui le symbole de la “nouvelle économie” triomphante et un antidote aux moeurs compassées des milieux d’affaires nippons. “Tous les maux viennent des patrons âgés”, déclara-t-il un jour. Invité à longueur de temps des télévisions, il avait été courtisé par l’ex-Premier ministre libéral-populiste Junichiro Koizumi, qui avait personnellement parrainé sa candidature (finalement ratée) à un siège de député. Quatre autres anciens dirigeants de Livedoor, qui ont à l’inverse choisi de plaider coupable, ont été jugés séparément et devraient bientôt être fixés sur leur sort. |
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