L’Amérique cloue Airbus au pilori à l’OMC mais espère toujours un compromis

 
 
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Des personnes arrivent au siège de l’OMC, le 20 mars 2007 à Genève (Photo : Fabrice Coffrini)

[21/03/2007 18:20:23] GENEVE (AFP) Les Etats-Unis ont prononcé devant l’OMC un long réquisitoire contre les aides européennes à Airbus, mais le camp américain continuait à espérer mercredi un règlement à l’amiable de sa dispute avec Bruxelles.

Plus de deux ans et demi après le dépôt de leurs plaintes réciproques à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) contre Airbus et Boeing, Américains et Européens ont pour la première fois présenté oralement leurs arguments mardi à huis clos devant leurs juges.

Dans une déclaration de 72 pages communiquée mercredi, le délégué de Washington a expliqué que les subventions versées à Airbus par quatre Etats européens (Allemagne, Espagne, France, Royaume-Uni) avaient constitué “un préjudice grave” envers Boeing.

Dénonçant des aides déguisées à l’exportation, interdites par le gendarme des échanges mondiaux, il a principalement mis en cause les aides au lancement versées par les quatre Etats pour la construction de nouveaux appareils.

Le représentant américain a évalué ces aides à 15 milliards de dollars et estimé qu’Airbus en avait tiré depuis sa création un bénéfice “qui dépasse largement les 100 milliards de dollars”.

Washington estime en effet que ces aides ont permis au constructeur européen “de lancer des modèles à une échelle et à un rythme qui auraient été impossibles sans subventions” et d’avoir augmenté sa part de marché en pesant sur les prix.

Ces aides ont permis au constructeur européen de devenir le premier avionneur mondial depuis 2003, selon Washington. Même si Boeing a redressé la tête l’an dernier, ce regain n’est que “temporaire” et lié aux difficultés que rencontre Airbus avec ses derniers programmes, A380 et A350, ont fait valoir les Américains.

En réponse aux accusations américaines, Pieter Jan Kuijper, principal conseiller juridique de la Commission européenne, a accusé Washington de chercher à “réécrire l’histoire” : il a rappelé que les deux puissances commerciales avaient été liées à partir de 1992 par un accord bilatéral limitant les aides attribuées à Airbus et à Boeing.

Washington, qui a dénoncé cet accord en 2004, juge ses éléments nuls et non avenus puisqu’il s’agit d’un texte bilatéral et non d’un document relevant juridiquement de l’OMC.

Mais Bruxelles estime que la partie américaine “ne peut aujourd’hui qualifier de subventions prohibées les mêmes éléments de financement qu’il a approuvés et auxquels il a même participé, voire en les encourageant”.

En privé, les Américains disent espérer parvenir à une entente avec Bruxelles, d’autant qu’ils reconnaissent qu’ils pourraient bien aussi être condamnés par l’OMC pour les aides que plusieurs Etats fédérés versent à Boeing.

Washington se félicite ainsi que le patron d’Airbus, Louis Gallois, ait dit vouloir “étudier tous les instruments de financement possibles” pour son A350.

“Airbus suit une approche différente pour le financement de l’A350 et c’est une bonne chose”, selon une source américaine. “Il faut leur laisser le temps de le faire”.

En attendant, les Etats-Unis s’insurgent contre le fait que malgré le dépôt de leur plainte, les quatre Etats européens incriminés “accroissent leur implication dans Airbus au lieu de la réduire”.

Le représentant de Washington a déclaré devant l’OMC que “le Premier ministre français a annoncé il y a quelques semaines que la France offrirait 100 millions d’euros pour la recherche dans les matériaux composites en faveur d’Airbus”.

L’audience, qui devait s’achever mercredi soir, concerne uniquement la plainte américaine contre Airbus, qui doit faire l’objet d’une première décision de l’OMC en septembre. La plainte européenne contre Boeing, qui sera examinée en juillet, ne sera pas tranchée avant février 2008.

 21/03/2007 18:20:23 – © 2007 AFP