Bulgarie : la corruption avale des ressources égales aux fonds attendus de l’UE

 
 
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Carte de la Bulgarie

[24/04/2007 14:05:14] SOFIA (AFP) La corruption, sujet de préoccupation numéro un des Bulgares, engloutit à elle seule, selon un rapport indépendant publié lundi, presque autant d’argent par an que les fonds attendus de l’Union européenne.

En 2006, plus d’un milliard d’euros ont été distribués sous forme de pots-de-vin, l’attribution des marchés publics à des sociétés proches des milieux politiques a entraîné des pertes de 500 millions d’euros et les échanges frauduleux de terrains appartenant aux mairies ont provoqué des pertes de 400 millions d’euros, selon les informations fournies par un rapport du Centre d’étude de la démocratie (CDS), spécialiste des enquêtes en matière de corruption.

Les astuces utilisées dans le détournement de fonds publics sont si variées et sophistiquées que l’utilisation correcte des fonds européens d’environ 11 milliards d’euros prévus par Bruxelles pour la Bulgarie jusqu’en 2013 est menacé, avertit le rapport.

“Il y a des pratiques parfaitement légales, mais nuisibles à l’intérêt public”, a confirmé le président de la Cour des comptes Valeri Dimitrov lors d’un débat à Sofia.

Un boom d’achats de propriétés, en particulier au bord de la Mer noire, a provoqué une flambée des prix avec l’adhésion du pays à l’UE au 1er janvier.

La privatisation des propriétés de l’Etat touchant à sa fin, “le domaine principal de corruption est actuellement l’échange de terrains et de forêts, procédure pourtant formellement légale”, a noté le président du CSD Ognain Chentov.

Ainsi le rapport note qu’il n’est pas rare qu’une propriété attrayante d’une municipalité aille à une société à réputation douteuse qui, elle, lègue un terrain de peu de valeur avec au passage un pot-de-vin versé au responsable municipal à l’origine de la transaction. La société bénéficiaire peut ensuite récolter aisément une plus-value juteuse sur le marché immobilier en ébullition.

Ce cas de figure est courant actuellement notamment dans les stations balnéaires.

Par ailleurs “la corruption politique impliquant des membres du gouvernement, députés, hauts responsables gouvernementaux, maires et conseillers municipaux reste un défi sérieux”, selon le rapport.

“Une part croissante de l’opinion publique estime qu’une corruption politique accrue s’est presque institutionnalisée par le truchement de réseaux tressés autour des partis”, ajoute-t-il.

Ainsi le gagnant dans un appel d’offres est souvent connu d’avance, constate le CSD, ce qui entraîne une diminution des participants aux procédures d’appel d’offres.

Entrée dans l’UE en 2007, la Bulgarie fait l’objet d’une surveillance étroite de la part de la Commission européenne, surtout en matière d’efficacité de la lutte contre la corruption et le crime organisé.

Les Bulgares ont “pour la première fois au cours de la dernière décennie identifié la corruption comme le problème le plus grave de la société”, selon le rapport.

Mais le peu de condamnations pour corruption (188 condamnés en 2006) crée un danger réel d’exploitation frauduleuse des ressources que va offrir l’adhésion à l’Union européenne, estime le Centre d’étude de la démocratie. Aucun haut responsable politique n’a été jusqu’à ce jour condamné pour fait de corruption en Bulgarie.

“Il y a un risque de développement de relations de corruption entre hommes politiques, administration et milieux d’affaires en vue de diriger les ressources européennes vers des bénéficiaires connus à l’avance”, selon ces experts.

L’ambassadeur des Etats Unis John Beyrle a récemment comparé la corruption à “un impôt caché qui entrave le développement social et économique de la Bulgarie”.

 24/04/2007 14:05:14 – © 2007 AFP