[25/04/2007 11:00:37] PARIS (AFP) Le combat entre le français Eiffage et l’espagnol Sacyr pourrait tourner à l’imbroglio judiciaire, chacun des deux groupes ayant entamé une action en justice, tandis que le gendarme boursier doit se prononcer sur la conformité de l’offre de Sacyr. Le numéro 3 français du BTP a déposé plainte mardi devant le tribunal de grande instance de Paris contre Sacyr et les groupes espagnols présents à son capital pour “action de concert”, avec deux fondements: “défaut de déclaration de franchissement de seuil” et “diffusion d’informations fausses et trompeuses”. De son côté, Sacyr Vallehermoso a assigné le français devant le tribunal de commerce de Nanterre pour contester les décisions de la dernière assemblée générale, qui a privé de leurs droits de vote 89 actionnaires espagnols accusés d’avoir agi de concert avec Sacyr. L’audience est prévue le 10 mai. Sacyr et les autres actionnaires espagnols contestent avoir agi ensemble. Mais selon Eiffage, Sacyr (33,2% du capital) a franchi avec les autres espagnols (17,5%) le seuil du tiers du capital (33,3%), ce qui rend obligatoire une offre publique d’achat (OPA). Pour le groupe français, le projet d’offre publique d’échange (OPE) déposé jeudi dernier par Sacyr est illégal. Il demande que le groupe espagnol lance une offre avec au moins une partie en cash à 129,3 euros par action, prix le plus élevé dépensé par un actionnaire espagnol pour acquérir des titres. Selon lui, Sacyr est aussi tenu de lancer une offre séparée sur APRR (Autoroutes-Paris-Rhin-Rhône), détenu par Eiffage au sein d’un consortium. L’Autorité des marchés financiers (AMF) doit se prononcer sur la conformité de l’offre de Sacyr, normalement dans un délai de dix jours de Bourse après son dépôt, soit d’ici le 3 mai. Mais ce délai est indicatif, et l’examen de l’OPE pourrait en fait être beaucoup plus long. La décision de l’AMF “pourrait prendre des semaines, voire des mois”, indique-t-on de source proche du dossier. Pour Muriel Goldberg-Darmon, avocate associée chez Salans, spécialisée en droit boursier, “il paraît pour le moins difficile à l’AMF de se prononcer sur le projet d’OPE alors même que l’existence du concert engendrerait le dépôt d’une OPA obligatoire, soit un type d’offre très différent”. “On peut s’attendre à ce que le collège ne se prononce qu’après la décision de justice”, estime-t-elle. Or, si l’AMF attend l’issue de la procédure devant le TGI, l’affaire pourrait être relativement longue. La preuve de l’action de concert est en effet difficile à établir, et des appels, voire un pourvoi en cassation, sont possibles. “Pour démontrer l’action de concert, un accord écrit entre les parties n’est pas nécessaire, mais la jurisprudence exige un faisceau d’indices concordants prouvant qu’ils agissent dans le même sens”, indique Me Goldberg-Darmon. L’AMF, qui a ouvert une enquête sur l’évolution de l’action Eiffage, pourrait apporter des preuves, notamment sur les conditions d’acquisitions de titres. Mais “ce n’est pas simple, car il faut apporter un certain nombre d’éléments”, selon l’avocate. Parallèlement, la procédure ouverte par Sacyr devant le tribunal de commerce devrait compliquer la situation. “La multiplication des procédures, véritable stratégie judiciaire, pourrait aboutir à des décisions contradictoires et ainsi inciter l’ensemble des parties à rechercher un accord”, estime Muriel Goldberg-Darmon. Certains, comme Henri de Castries, président du directoire d’Axa (actionnaire d’Eiffage avec 1,25%), estiment que cette affaire “aura un impact sur la crédibilité de la place financière” parisienne si les questions qu’elle soulève ne sont pas examinées en profondeur. A 12H15 (10H15 GMT), l’action Eiffage perdait 0,11% à la Bourse de Paris à 104,95 euros et celle de Sacyr 1,96% à la Bourse de Madrid, à 39,90 euros. |
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