[26/04/2007 11:54:09] PARIS (AFP) Les salariés actionnaires d’Eiffage, qui possèdent 22,4% du capital du troisième groupe de BTP français, se sont rangés derrière leur direction contre les ambitions de l’Espagnol Sacyr, pour défendre leur emploi, et aussi leur capital. Selon les syndicats, 90% des 40.000 salariés français détiennent des actions, réunies dans la Sicavas Eiffage 2000 (Sicav d’actionnariat salarié). “C’est une force pour protéger notre entreprise contre Sacyr”, qui a lancé jeudi dernier une offre publique d’échange (OPE) sur Eiffage, estime Gilles Letort, secrétaire (CGT) du comité de groupe européen. D’autant que les dirigeants possèdent aussi 5,19% du capital via Eiffaime, une société ad hoc. Mercredi, plusieurs centaines de salariés ont manifesté à Paris, dans un lieu symbolique, sur la place de la Bourse, juste devant l’Autorité des marchés financiers (AMF), à l’appel d’une intersyndicale. Avec le slogan “ni OPE, ni OPA” (offre publique d’achat), ils ont voulu montrer qu’il fallait “compter avec l’actionnariat salarié”. “On veut rester entre nous et garder nos pépettes”, résume un ouvrier CFTC. “Sacyr ne se porte pas si bien, il nous entraînerait dans sa chute”, affirme Bruno Rocherieux (CGT). “Notre mobilisation n’est pas pour autant un chèque en blanc à la direction”, lance-t-il néanmoins en matière d’avertissement. Oubliées ou presque les protestations syndicales (CGT, CFTC, FO et CFDT) fin mars contre le blocage par la direction – interrompu ensuite à la demande de l’AMF – des actions détenues par les salariés, pour se prémunir contre un raid boursier. Mis à part Sud qui refuse d’entrer dans le système boursier “où les profits se font sur le dos des salariés”, la plupart des salariés louent, de la secrétaire au manager, en passant par les autres responsables syndicaux, le fait d’être propriétaire d’une partie de leur entreprise. “C’est un bon placement, ça nous motive”, dit Carlos Alves, un électricien de 38 ans. Un de ses camarades en témoigne: “j’ai placé 19.000 euros il y a deux ans, aujourd’hui mes actions valent 44.000 euros”. Soumises aux aléas de la Bourse, elles sont bloquées durant cinq ans. Michel Farge, coffreur de 45 ans dans la filiale Eiffage Patrimoine, se félicite aussi d’avoir mis 900 euros de participation et d’intéressement (abondé à hauteur de 50% par l’entreprise) il y a cinq ans, qui lui ont donné 6.000 euros: “Je mets des sous tous les ans”. “C’est une façon de renouveler sa confiance en l’entreprise”, estime Jean-Pierre Mahé, directeur chez Eiffage Construction. L’actionnariat salarié est né en 1990 au sein du groupe de BTP Fougerolle, alors menacé d’une OPA par la Compagnie générale des eaux. Jean-François Roverato, alors PDG de Fougerolle, a lancé un RES (rachat d’entreprise par ses salariés). “Le dispositif a été autorisé pendant dix ans”, se remémore M. Mahé. Fougerolle est devenu Eiffage en 1993, son PDG est resté. En 2000, le Sicavas a pris le relais pour rassembler l’épargne salariale. A partir de 2002, BNP Paribas, principal actionnaire d’Eiffage, s’est retiré du capital. “Nous devenions opéables, d’autant que le cours montait… Nos actions sont redevenues un moyen de défense”, selon M. Mahé. “Avec le rachat en 2006 de la société des Autoroutes Paris Rhin-Rhône, nous sommes devenus une belle proie”, note un collègue. Dans une pétition, les salariés proclament que “l’emploi est une chose trop précieuse pour être laissé au gré de la spéculation financière” et réclament une stratégie de long terme. |
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