[02/05/2007 18:06:52] NEW YORK (AFP) Malgré les 5 milliards de dollars mis sur la table, le magnat Rupert Murdoch aura du mal à s’emparer du Wall Street Journal, face aux multiples oppositions provoquées par son offre, venant de la famille propriétaire, des syndicats, mais aussi des milieux du journalisme et de la politique. News Corp., l’empire médiatique de M. Murdoch, a proposé de racheter mardi le groupe Dow Jones, éditeur du Wall Street Journal (WSJ), pour 5 milliards de dollars au total. Une offre au prix fort, près de 65% supérieure au cours de l’action lundi soir. Pour M. Murdoch, acquérir ce journal centenaire, le deuxième plus diffusé aux Etats-Unis, serait un coup de maître pour accroître son poids américain. Il possède aux Etats-Unis le puissant groupe télévisé Fox et les studios 20th Century Fox, mais un seul journal, le quotidien populaire New York Post. Depuis plusieurs années, il lorgnait sur le WSJ. Le “Journal” serait aussi un atout-clef pour la chaîne d’informations financières qu’il veut lancer cet automne, Fox Business, qui vise à concurrencer la chaîne financière CNBC, à laquelle le WSJ fournit des informations. Mais dès mardi après-midi ont surgi de multiples oppositions, en premier lieu venant de la famille propriétaire, les Bancroft, qui contrôlent le groupe depuis 1902. A travers plusieurs dizaines de membres de la famille, ils détiennent 24,7% des actions mais 64,2% des droits de vote. Un de leurs représentants a fait savoir mardi à plusieurs journaux que des membres de la famille contrôlant “un peu plus de la moitié” des droits de vote s’opposeront à M. Murdoch. M. Murdoch, sans se démonter, a invité mardi la famille à “considérer la chose calmement” et promis d’être un “gardien des traditions” du Journal. Il reste en effet un doute sur la décision finale de la famille, qui a confirmé avoir nommé un conseiller pour étudier cette offre particulièrement élevée. D’autres critiques des milieux politiques et journalistiques ont surtout décrié mercredi la personnalité de M. Murdoch, connu pour ses journaux sensationnalistes, ses opinions conservatrices, son hostilité envers les syndicats et son influence politique. Au sein du Wall Street Journal lui-même, le syndicat des salariés a accusé M. Murdoch d’avoir “montré sa volonté d’écraser la qualité et l’indépendance” et jugé qu’il “n’y a pas d’indication qu’il gèrerait différemment le groupe Dow Jones ou le Journal”, a indiqué à l’AFP son président Steven Yount. La rédaction du WSJ était “effondrée et choquée” mercredi, estimant que M. Murdoch était “le pire acquéreur possible” et craignant qu’il impose au WSJ “un côté tabloïd”, a déclaré à l’AFP une source proche du dossier. Plusieurs parlementaires ont craint une nouvelle concentration des médias, marqués par une série de rachat ces derniers mois. Le sénateur indépendant du Vermont, Bernard Sanders s’est dit “effrayé parce qu’il y a trop peu de grands groupes qui controlent l’information” alors que “les hommes politiques dépendent des médias”. La représentante démocrate Lynn Woolsey a promis que “les démocrates progressistes vont se battre pour éviter que nos médias ne soient centrés sur un seul individu, et faire réviser les règles” sur la concentration. Mais de nombreux analystes prévoient que de toute façons, Dow Jones et le Wall Street Journal changeront bientôt de mains, car l’offre de Murdoch déclenchera une surenchère et la famille vendra. “Les Bancroft doivent envisager cela sérieusement, ils n’ont pas le choix”, a plaidé Mark Boyar, de Boyar Asset Management, qui détient des actions. Selon Porter Bibb, gestionnaire de la banque MediaTech Capital Partners, “les Bancroft vont solliciter d’autres candidats, et dans quelques mois il y aura un nouveau propriétaire, un fonds d’investissement ou un grand groupe de médias ou d’internet”. |
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