[09/05/2007 11:23:32] MONTREAL (AFP) L’offre d’achat hostile du leader mondial de l’aluminium Alcoa sur son rival canadien Alcan suscite de vives craintes au Canada au sein de l’opposition politique, des syndicats et même chez des analystes financiers qui invitent Ottawa à protéger ses ressources naturelles. La presse canadienne a réservé un accueil tiède à l’offre d’achat de 33 milliards de dollars du géant américain Alcoa sur le titre-phare du secteur métallurgique canadien Alcan. Le quotidien libéral The Globe and Mail a tiré à boulets rouges sur le gouvernement conservateur accusé de ne pas défendre les intérêts économiques du pays, après le rachat depuis un an par des compagnies étrangères des leaders du nickel Inco et Falconbridge, des sidérurgistes Dofasco et Ipsco et la perte éventuelle d’Alcan. “Alors que les fleurons de l’économie canadienne tombent entre les mains de compagnies étrangères à un rythme alarmant, le silence d’Ottawa devient assourdissant”, écrivait mardi dans un éditorial au vitriol le journal qui craint les conséquences de ces prises de contrôle étrangères sur l’économie canadienne. Le Premier ministre Stephen Harper a aussi été la cible de l’opposition qui s’est offusquée de voir des fleurons stratégiques de l’économie canadienne contrôlés par des intérêts étrangers. “Nos intérêts économiques sont vendus à des intérêts étrangers et le gouvernement s’en lave les mains (…) Le pays fout le camp. Quand le Premier ministre va-t-il agir pour protéger le Canada?”, a tonné Jack Layton, chef des néo-démocrates (gauche). Le ministre des Finances Jim Flaherty a répondu que tout achat d’une entreprise canadienne doit se faire “conformément” aux lois sur la concurrence et a martelé qu’au dernier trimestre 2006 les entreprises canadiennes avaient fait l’acquisition de compagnies étrangères évaluées à près de 70 milliards de dollars. Cet appel au calme ne tranquillise pas tous les analystes financiers dont certains rêvaient à la formation d’un leader mondial du secteur minier qui serait canadien, avant de voir le Suisse Xstrata et le Brésilien CVRD faire main basse respectivement sur Inco et Falconbridge en 2006. “Le Premier ministre Harper devrait être préoccupé par la disparition de toutes les grandes sociétés minières canadiennes”, dit John Kinsey, analyste chez Caldwell Securities. “Des réponses à un certains nombre de questions devront être formulées au cours des prochaines semaines”, juge-t-il à propos de l’offre d’Alcoa, citant entre autres les contrats privilégiés liant Alcan aux sociétés publiques d’hydro-électricité de Colombie-Britannique (Ouest) et du Québec. L’électricité est essentielle à la transformation de la bauxite en aluminium par l’électrolyse. Alcoa s’est engagé à maintenir le siège social de la division “métal primaire” de l’éventuel nouveau groupe à Montréal, mais aussi à réaliser des économies de synergies d’un milliard de dollars américains sur trois ans, ce qui inquiète les syndicats. “C’est sûr qu’on est inquiet”, déclare Jean-Marc Crevier, directeur du syndicat de la FTQ (Fédération des travailleurs du Québec) dans la région du Saguenay où Alcan emploie plus de 5.000 personnes. “S’il y a des gens capables de comprendre notre inquiétude, c’est bien ceux de Pechiney, en France. Quand Alcan a acheté Pechiney en 2003, c’est ici que la la technologie de Pechiney est venue”. “On sait que les Américains pratiquent le protectionnisme. Donc si Alcoa s’empare d’Alcan ça veut dire qu’ils vont prendre notre ressource qui est l’électricité pour faire de l’aluminium et ils le transformeront aux Etats-Unis”, prévoit-il. Mais encore faudrait-il qu’Alcoa parvienne à rafler la mise sur Alcan. Les analystes s’attendent à une surenchère des géants Xstrata, BHP Billiton ou de Rio Tinto. |
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