En face
d’une demande de plus en plus accrue en ressources énergétiques, et la
régression de celles-ci nettement ressentie dès l’an 2000, la Tunisie a mis
en œuvre une politique de maîtrise de l’énergie à l’horizon 2030.
D’apparence fort ambitieuse, cette stratégie est au demeurant un passage
obligé pour l’indépendance énergétique du pays, et la compétitivité de
l’économie nationale.
Durant
les vingt dernières années, la balance des ressources énergétiques et de la
demande laisse clairement profiler une tendance inévitable à la dépendance
extérieure en la matière. Après une période faste où les énergies étaient
largement excédentaires (1980-1994), et qu’un soupçon de reprise se fit
sentir entre 1996 et 2000, le pays devait dès 2001 accuser un réel déficit
estimé en 2006 à – 0,7 ou 500 KTEP (kilo tonne équivalent pétrole).
Si l’on
ajoute les prix internationaux du pétrole et leurs fluctuations, l’on
réalise que le pays est plus que jamais invité à adopter un système qui
réduise la consommation énergétique à son expression la plus rationnelle, et
envisage le développement des énergies renouvelables en tant qu’unique
alternative possible.
La
contrainte environnementale
Impératif en soi, la maîtrise de l’énergie ne peut que naturellement
contribuer à la réduction des émissions de Gaz à effet de serre (GES) qui
représentent 53 % des émissions brutes des sources en question. Pour autant,
la Tunisie a été parmi les toutes premières nations à ratifier la Convention
cadre des Nations Unies (Kyoto, 2000) pour l’atténuation de ses émissions de
GES, s’appuyant par là sur ses possibilités d’atténuation à la faveur de
l’accroissement des investissements de maîtrise de l’énergie!
Les
mécanismes de maîtrise de l’énergie
La
politique engagée pour la maîtrise de l’énergie s’est exprimée d’abord par
la création de l’ANME (Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie) dont
l’ancêtre était l’AME (Agence de maîtrise de l’énergie) créée en 1985. Ses
principaux domaines d’intervention sont la promotion des énergies
renouvelables, l’utilisation rationnelle de l’énergie, et la substitution
énergétique. Plus tard, en 2005, une loi allait donner naissance au Fonds
national de maîtrise de l’énergie destiné au financement des opérations de
nature à rationaliser la consommation de l’énergie, à promouvoir ! les
énergies renouvelables, et à encourager les opérations de substitution de
l’énergie.
Les
incitations financières
Parmi
les importantes mesures d’incitation, on cite la prime de 20% du coût de
l’investissement dans les projets de maîtrise de l’énergie avec un plafond
de :
–
100
mille dinars pour les établissements dont la moyenne de la consommation
globale annuelle d’énergie ne dépasse pas 4 mille TEP (tonne équivalent
pétrole) ;
–
200
mille dinars pour les établissements dont la moyenne de la consommation
globale annuelle d’énergie varie entre 4 mille et 7 mille TEP ;
–
250
mille dinars pour les établissements dont la moyenne de la consommation
globale annuelle d’énergie dépasse 7 mille TEP ;
–
le
chauffage des eaux par l’énergie solaire dans le secteur résidentiel et dans
les entreprises privées : une prime de 20% du coût des capteurs solaires
dans la limite de 100 dinars le m2 ;
–
la
substitution de l’énergie par le gaz naturel dans le secteur industriel :
une prime de 20% du coût de raccordement interne et de la conversion des
équipements plafonnée à 400 mille dinars ;
–
la
substitution de l’énergie par le gaz naturel dans le secteur résidentiel :
une prime de 140 dinars pour chaque logement individuel et une prime de 20
dinars pour chaque appartement dans les logements collectifs.
A noter
que les avantages consentis par le Fonds national de maîtrise de
l’énergie sont appuyés par des avantages fiscaux : suspension de la TVA liée
aux achats d’équipements de nature à économiser l’énergie, et paiement des
droits de douane au taux minimum pour les équipements importés.
Potentiel d’économie de l’énergie
Sur les
25 prochaines années, la Tunisie pourra s’appuyer sur un potentiel cumulé
d’économie d’énergie estimé à près de 100 MTEP (million de tonnes équivalent
pétrole) dont 80% seront destinés à l’utilisation rationnelle de l’énergie
contre 20% à puiser dans les énergies renouvelables. Cette politique
ambitionne des économies cumulées de 4,3 MTEP (2005-2010), de 37 MTEP
(2005-2020) et de 100 MTEP (2005-2030).
Le
secteur industriel
A lui
seul, en 2004, le secteur industriel a utilisé à hauteur de 36% de la
consommation totale d’énergie commercialisée. Aussi, dans une perspective
d’exploitation compétitive de l’énergie analogue à celle des industries
européennes, l’objectif table sur des économies de l’ordre de 16 MTEP à
l’horizon 2030, soit l’équivalent de sept années de consommation d’énergie.
Or,
l’action à entreprendre vise la substitution par le gaz naturel et la
connexion de quelque 300 entreprises pour une énergie de près de 460 KTEP à
l’horizon 2011.
Pour ce
qui concerne les secteurs résidentiel et tertiaire, le programme d’action
table sur des économies d’énergie de 14 et 15 MTEP respectivement
(2005-2030). Le secteur des transports, lui, arrive tout juste après
l’industrie en termes de consommation d’énergie avec 1,7 MTEP (en 2004) ou
30% de l’exploitation finale.
Par
conséquent, l’objectif pour la période 2005-2030 tendrait, si les stratégies
recommandées pouvaient aboutir, à des économies d’environ 20 MTEP,
c’est-à-dire autant que neuf années de consommation.
Energies
renouvelables
Presque
nulles, en tout cas très peu significatives, les énergies renouvelables
représentent à peine 1% de la consommation d’énergie. Pourtant, l’étude
stratégique fait montre d’un potentiel non négligeable de valorisation des
énergies renouvelables estimé, progressivement et à l’horizon 2030, à 19
MTEP. Dans ce potentiel, l’éolien est à concurrence de plus de 75%, et le
chauffage solaire, de 10%. En dépit d’un bond significatif réalisé en 2005
au chapitre du solaire thermique, on considère que le décollage véritable
des deux filières (l’éolien et le solaire) aura lieu le long des 11èm!
e et 12ème plans de développement. Plus précisément, le but
est d’avoir, à l’horizon 2011, un parc de chauffe eau solaire installé de
700 mille m2, et, partant, de 2,5 millions de m2 en 2030, compte tenu du
mécanisme de financement mis en œuvre en 2005. Quant à l’éolien, l’ambition
est d’obtenir une capacité installée de quelque 200 méga watt en 2011, et,
partant, de 1 800 MW en 2030.