[11/06/2007 09:15:14] KIKUYU (AFP) A la fois méfiant et surpris, Paul Kangethe regarde son téléphone portable et relit le message qu’il vient de recevoir: on lui demande de se rendre au magasin de téléphonie mobile le plus proche pour retirer l’argent que son beau-frère vient juste de lui envoyer. “Je n’avais jamais vu cela avant”, dit M. Kangethe. Il est l’un des quelque 65.000 utilisateurs enregistrés de M-Pesa, un système de transfert d’argent par téléphone portable que vient d’introduire Safaricom, leader des opérateurs de mobiles au Kenya: il permet aux abonnés d’envoyer et de recevoir de l’argent via leur appareil, une première en Afrique. Les fonds peuvent ensuite être retirés dans les magasins de téléphonie mobile sur tout le territoire. “Jusqu’alors, lorsqu’il me faisait parvenir de l’argent, il l’envoyait en passant par la poste et cela pouvait prendre jusqu’à trois jours avant que je le reçoive”, raconte à propos de son beau-frère M. Kangethe, 35 ans, à Kikuyu, à 20 km de Nairobi. Des services de rencontres aux opérations boursières, les téléphones portables sont en train de changer le visage du Kenya et ce nouveau service oblige les banques à réévaluer leur politique vis-à-vis des zones rurales négligées. Plus de 60% des Kényans ont accès aux banques ou aux institutions de micro finance mais 38% d’entre eux – en majorité des ruraux – sont sans banque, selon le Financial Sector Deepening Kenya (FSDK), un programme sponsorisé par la Banque mondiale (BM) pour élargir l’accès au secteur bancaire formel. Dans le même temps, plus de la moitié de la population possède ou a accès à un téléphone portable, qui constitue un nouveau moyen de fournir des services bancaires ou financiers, selon le responsable financier de Safaricom, Les Baillie. “En leur fournissant ce service, en un sens, nous apportons le service bancaire à ceux qui n’ont pas de banque”, explique à l’AFP M. Baillie. Les utilisateurs de M-Pesa peuvent envoyer jusqu’à 35.000 shillings kényans (525 dollars) par transaction et garder jusqu’à 50.000 shillings kényans sur un “compte virtuel” pour usage ultérieur. L’envoi et la réception d’argent coûte jusqu’à 170 shillings (2,55 USD), bien moins que le prix pratiqué par les agences de transfert de fonds qui demandent jusqu’à 10% du montant envoyé et ont du coup souvent été boudées au profit de transferts de fonds moins chers et plus informels. “La majorité des Kényans, 86%, font parvenir de l’argent soit en passant par les amis et la famille, soit par bus et mini-bus”, explique Caroline Pulver du FSDK. “Le problème, c’est que cela n’est pas très fiable”. Le système M-Pesa est devenu populaire car il permet de fournir de l’argent de manière sûre, rapide et efficace – les utilisateurs doivent donner un code secret avant de retirer les fonds. Sa simplicité séduit aussi ceux qui passaient avant par la banque. “J’avais l’habitude d’envoyer de l’argent par la banque (mais) il y a tant de procédures que cela prend beaucoup de temps et souvent ma famille doit se déplacer sur une très longue distance pour trouver une banque alors que partout il y a des téléphones portables”, dit Zackayo Masinga, commerçant de la capitale Nairobi. Ce système suscite la méfiance de certains. “Je fais rarement des transferts de fonds mais dans ce cas j’utiliserais (plutôt) une banque car je reste prudent face à la technologie”, explique ainsi un professeur de mathématiques Cege Kihoro. Cependant, avec plus de 1.000 nouveaux abonnés par jour, Safaricom est suffisamment optimiste pour redoubler d’efforts avec Vodafone, qui détient 35% du marché kényan des télécommunications, afin de lancer les transferts internationaux avec le Royaume-Uni. |
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