Les tendances du marché de l’externalisation des services

Par : Autres

L’Externalisation (“Outsourcing” en
anglais) est définie comme suit par l’Association Européenne de l’Outsourcing
(EOA) qui fête ses 20 ans en 2007 : “La délégation d’un ou plusieurs
domaines d’activités, fonctions ou processus de l’Entreprise à un
fournisseur extérieur et indépendant de son client qui, sur une durée
pluriannuelle, en est responsable, opère et gère le fonctionnement, la
performance et l’évolution des fonctions ou processus sélectionnés, en
s’engageant sur un objectif de résultats mesurables et prédéfinis afin d’en
optimiser les bénéfices pour le client”.

Nombreux sont ceux qui pensent que l’externalisation a démarré comme un
nouveau mode de management dans les années 80. Le mot “outsourcing” n’est
rentré dans les dictionnaires anglais qu’en 1982, néanmoins les pratiques
sous-tendues, la spécialisation, l’échange et la sous-traitance des biens et
des services à ceux qui peuvent mieux le faire remontent aux débuts de
l’humanité. Les hommes ont distribué les travaux aux spécialistes, qu’ils
soient chasseurs, cuisiniers, constructeurs de maisons, et ce faisant ont
amélioré leur propre vie. L’externalisation permet l’accès à des ressources
et à des compétences nouvelles pour le bienfait des individus et des
entreprises et de la société en général.

Certains modes d’externalisation ont émergé dans les années 80 pour
permettre la restructuration des entreprises complexes et mal organisées.
Jusque dans les années 70 les entreprises ont eu tendance à croître en
taille, en diversité de produits et de services rendus et en complexité
bureaucratique. La tendance était de tout faire en interne. Il en est
résulté un niveau de performance et de qualité limité. La pression
internationale des marchés, la recherche des meilleurs rapports qualité –
prix ont poussé les entreprises à se focaliser et à se transformer à travers
le fameux “re-engineering”. Les restructurations ont conduit à la fermeture
ou à la vente des activités non performantes et non “cœur de métier”. Tout
d’abord les fonctions administratives clés comme la comptabilité ou les
ressources humaines ont été refondues et centralisées grâce aux nouveaux
systèmes d’informations tels que les ERP. Certains services comme le
gardiennage ou la cafétéria ont été confiés à des prestataires spécialisés.

Les entreprises ont d’abord externalisé des activités de moindre valeur
ajoutée telles que la production, la logistique, l’informatique avec des
objectifs de réduction de coûts et de concentration sur le cœur de métier.
Dans les années 90 d’autres activités commencèrent à être externalisées
telles que les centres d’appels ou des fonctions supports comme la gestion
des archives ou la gestion documentaire. Cette phase a marqué une évolution
dans les motivations vers l’amélioration de la qualité des services ou des
produits grâce aux compétences et aux ressources externes à l’entreprise. On
est ensuite passé à des fonctions supports liés de près au “cœur de métier”
telles que les fonctions comptables et financières, ressources humaines,
achats, légales ou recherche et développement. L’expression consacrée est
BPO (Business Process Outsourcing) qui représente un marché de plus de USD
170 milliards en 2007 en croissance de 40% depuis 2003 (source Gartner).

Une étude Grant Thornton France – IFOP d’avril 2007 indique que près d’un
quart des entreprises françaises de 100 à 2 000 employés ont ou vont
externalisé des fonctions financières ou ressources humaines. La même
enquête révèle que trois quarts des dirigeants pensent que le BPO est une
tendance de fond qui est là pour durer.

L’évolution se fait vers les “partenariats stratégiques” par lesquels les
entreprises utilisent l’externalisation comme un outil stratégique de
compétitivité, en passant des accords avec des prestataires très qualifiés
dans leur domaine qui leur apportent une plateforme de transformation des
processus tournée vers l’innovation. On est loin de la simple relation
client-fournisseur.

Le marché du BPO est en pleine mutation. L’expérience profite à l’ensemble
des entreprises et des secteurs. Alors que les précurseurs ont été les
multinationales anglo-saxonnes, on voit maintenant les entreprises privées
de taille petite ou moyenne, internationales ou non, et même les entreprises
publiques et les organismes gouvernementaux se mettre à l’externalisation.

Autrefois fondée principalement sur la réduction des coûts grâce à la
délocalisation offshore, dans des pays d’Asie à bas coûts, l’externalisation
gagne en maturité. L’étude Grant Thornton indique que trois motivations
principales sont maintenant mis en avant de la même façon par les dirigeants
: la réduction ou le contrôle des coûts, l’accès rapide à de l’expertise
externe et la garantie de conformité aux règlementations. L’offshore cède la
place au “multishore” qui consistent à répartir les activités externalisées
entre les pays lointains à bas coûts (offshore), les pays offrant une
certaine proximité géographique et culturelle comme l’Europe de l’Est ou le
Maghreb (nearshore) et le pays où l’entreprise est située (onshore).

L’enquête Grant Thornton 2007 montre que 90% des dirigeants sont satisfaits
à l’égard des prestations externalisées. A l’issue d’un premier contrat
d’externalisation, à 92% les activités continuent d’être externalisées, le
plus souvent aux mêmes prestataires (92%) et parfois pour un périmètre plus
large (16%).

Il convient de ne pas conclure que l’externalisation est la panacée. Elle
n’est qu’un outil de management stratégique à la disposition des dirigeants
à mettre en œuvre avec prudence.
Il convient de bien réfléchir avant d’agir : sur le périmètre des activités
externalisables, aux objectifs souhaités en matière de coûts et de qualité
de service, sur le choix du prestataire et sur l’organisation du suivi et du
contrôle des prestations.

L’aspect humain est clé : le bon “fit” entre l’entreprise et son prestataire
d’externalisation et la bonne gestion des collaborateurs qui peuvent être
amenés à rejoindre le prestataire mais aussi ceux qui restent dans
l’entreprise dont la relation de “collègue” évolue vers une relation
contractuelle et commerciale.

Ce dernier aspect est d’autant plus important que l’expérience montre la clé
d’un bon partenariat d’externalisation dans réside l’équilibre des
engagements de chacune des parties et dans la bonne gouvernance technique,
humaine et commerciale du partenariat.

Le partenariat d’externalisation est une affaire d’hommes de bonne volonté
et de bonne gestion de projet. Il ne faut pas oublier de valider à tout
moment la qualité des services rendus aux clients finaux. Nous ne sommes pas
encore dans le monde de l’entreprise virtuelle avec un noyau dur de
dirigeants qui organisent des partenariats externes pour toutes les
fonctions de l’entreprise.

– Cofondateur et Vice-président EOA (European Outsourcing Association)
– Président Groupe International DFCG (Association Française des Directeurs
Financiers et de Contrôle de Gestion)
– Directeur du Développement Externalisation, Grant Thornton

(armand.angeli@wanadoo.fr)