L’Allemagne cherche la parade face à la montée en puissance des fonds d’Etat

 
 
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Angela Merkel à Berlin le 18 juillet 2007 (Photo : Axel Schmidt)

[18/07/2007 13:41:13] FRANCFORT (AFP) Berlin planche sur un moyen de protéger ses industries clés contre l’appétit des fonds publics venus de Russie ou de Chine, qui contrairement aux fonds spéculatifs sont soupçonnés d’être moins obnubilés par la rentabilité que par l’accès aux technologies de pointe.

La force de frappe financière de ces fonds étatiques, en particulier ceux alimentés par la Chine, la Russie ou les monarchies pétrolières du Golfe, a atteint “une dimension inédite”, a déclaré mercredi la chancelière Angela Merkel lors d’une conférence de presse à Berlin.

“On peut douter que ces fonds ne soient motivés que par la recherche du retour sur investissement”, car leurs investissements peuvent “être influencés par des visées politiques”, a-t-elle souligné, justifiant l’intention du gouvernement de verouiller certains secteurs stratégiques.

Le grand argentier Peer Steinbrück (SPD) avait récemment dressé une liste: télécommunications, banques, transport/logistique et énergie, et lancé le débat dans le pays. Ces propositions ont suscité une levée de boucliers chez certains chefs d’entreprises, qui y voient un protectionnisme dangereux pour l’économie allemande, l’une des plus ouvertes du monde.

“Il ne s’agit pas d’interdire” à ces fonds tout rachat ou tout investissement, a-t-elle dit, insistant sur “le principe de réciprocité” dans l’accès aux marchés: “il faut voir dans quelle mesure nous pouvons également investir ailleurs.”

Le parti conservateur de la chancelière allemande travaille à un projet, qui doit être soumis à l’automne. Le ministère des Finances planche aussi sur le sujet.

Ces fonds, alimentés par les gains du pétrole, des matières premières et des réserves de changes, sont domiciliés dans des Etats où l’industrie nationalisée est prédominante. Et ils montent rapidement en puissance.

Même si elle veut un débat au niveau européen –elle en a, selon ses dires, touché un mot au président français Nicolas Sarkozy–, il importe pour Angela Merkel d’agir d’abord en Allemagne.

Car contrairement à la France, ou encore aux Etats-Unis, qui disposent déjà de mécanisme de protection, l’Allemagne paraît vulnérable, n’ayant un droit de veto que dans le domaine de la défense.

Dans une étude récente, Morgan Stanley évalue à 2.500 milliards de dollars les actifs gérés par une douzaine de fonds de réserves publics. C’est déjà plus que l’ensemble des 9.000 fonds d’investissement spéculatifs, avec environ 1.500 milliards.

Mais ils devraient doubler dès 2010 et atteindre 12.000 milliards en 2015, prédit Stephen Jen, auteur de l’étude.

A l’occasion de sa présidence du G8, le forum des pays les plus riches de la planète, Berlin a cherché, sans succès, à convaincre ses partenaires de réguler les fonds spéculatifs, quasiment libres de tout contrôle et particulièrement décriés en Allemagne où ils sont comparés à des nuées de sauterelles débarquant sur le pays pour démanteler ses entreprises.

S’ils ne recherchent pas coûte que coûte des rentabilité élevées, les fonds d’Etat ont en commun avec les fonds spéculatifs qu’ils ne brillent pas par leur transparence, selon Morgan Stanley, à l’exception du fonds de pension public norvégien qui publie régulièrement ses comptes.

Jusqu’à présent, les plus puissants viennent des pays du Golfe, avec en tête les Emirats arabes unis (avec des montants gérés de 875 milliards), selon une étude de la banque Natixis. La Chine pointe au cinquième rang (300 milliards), ainsi que la Norvège, et la Russie au dixième.

Mais l’ex-empire du milieu, assis sur les plus vastes réserves monétaires du monde, est appelé à les supplanter tous dès 2015, selon Morgan Stanley.

 18/07/2007 13:41:13 – © 2007 AFP