Subventions à Airbus : les Etats-Unis doublent la facture devant l’OMC

 
 
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Un Airbus A380 au salon aéronautique du Bourget le 18 juin 2007 (Photo : Pierre Verdy)

[24/07/2007 20:40:53] GENEVE (AFP) Les Etats-Unis ont accusé mardi Airbus d’avoir reçu jusqu’à 205 milliards de dollars de subventions des Etats européens, à la la veille de la dernière audience consacrée par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à l’avionneur européen.

Washington, qui parlait encore en mars dernier de 100 milliards de dollars, a ainsi doublé le montant de son accusation, jugée “ridicule” par les Européens.

L’administration américaine estime que les aides remboursables au lancement d’appareils versées par l’Allemagne, l’Espagne, la France et le Royaume-Uni à Airbus depuis la naissance du constructeur en 1967 sont des subventions déguisées qui font peser une concurrence déloyale sur son concurrent américain Boeing.

Washington a donc calculé la différence entre les intérêts qu’Airbus a versés aux Etats et le montant qu’il aurait dû payer s’il s’était financé auprès des banques, a expliqué à l’AFP Bob Novick, conseiller juridique de Boeing. La somme a été réévaluée en dollars de 2006.

Pour Bruxelles, l’évaluation américaine “est assez absurde”. “Ils ont calculé ça de façon totalement ridicule en gonflant les chiffres”, a estimé un fonctionnaire européen qui a requis l’anonymat. La somme de 205 milliards représente huit fois la capitalisation d’EADS, la maison-mère d’Airbus, a-t-il fait valoir.

En calculant les sommes en cause de la même manière que le font les Américains, le montant des subventions reçues par Boeing et contestées par Bruxelles ne serait pas 23 milliards de dollars mais 305 milliards, a observé le fonctionnaire.

Les deux parties ont engagé des procédures réciproques à l’OMC en octobre 2004. Le groupe spécial chargé d’enquêter sur Airbus se réunit mercredi et jeudi à Genève pour la dernière fois avant son verdict attendu au plus tôt en décembre.

Le dossier Airbus-Boeing est considéré comme le plus lourd et le plus complexe jamais traité par l’OMC et il n’est pas exclu que la procédure prenne du retard.

Présentant la défense d’Airbus devant la presse, les fonctionnaires européens ont expliqué mardi que pendant les 15 dernières années, l’avionneur aurait pu lancer ses appareils sans aides d’Etat.

Cette affirmation est contestée par Boeing. “Auraient-ils pu le faire sur le même rythme, avec les mêmes conditions financières et en facturant leurs avions comme ils l’ont fait ?” s’interroge M. Novick.

Dans le cas de Boeing, les auditions doivent débuter fin septembre avant une décision prévue en juin 2008. Les Européens estiment que l’avionneur américain bénéficie de subventions indues via les contrats que lui attribuent la Nasa et le Pentagone pour la mise au point de technologies militaires utilisées aussi dans les avions civils.

Les matériaux composites utilisés dans le nouvel appareil de Boeing, le 787, ont été obtenus par ce biais, dénonce Bruxelles. L’UE affirme aussi que Boeing reconnaît désormais avoir reçu indûment 2,2 milliards de dollars de subventions au titre des “foreign sales corporations”, un dispositif fiscal condamné par l’OMC en 2004.

Pour faire prévaloir leur point de vue à l’OMC, les parties doivent établir que les subventions de leur concurrent leur ont causé du tort.

Or, avec 57% des commandes à la mi-2007, Airbus ne peut pas dire qu’il souffre à cause de Boeing, a estimé M. Novick.

Les experts estiment que l’OMC pourrait bien renvoyer les deux parties dos à dos en condamnant Washington comme Bruxelles pour subventionnement illégal.

Ted Austell, vice-président de Boeing, espère d’ailleurs que les récents changements politiques en Europe et au sein d’Airbus favoriseront “une solution négociée” entre les deux géants aéronautiques.

 24/07/2007 20:40:53 – © 2007 AFP