[17/08/2007 14:20:01] TOKYO (AFP) La Bourse de Tokyo a subi vendredi sa plus forte baisse en plus de sept ans à la suite de la brusque appréciation du yen, qui pénalise gravement les exportateurs japonais, une conséquence de la crise des prêts immobiliers à risque “subprime” aux Etats-Unis. L’indice Nikkei a chuté vendredi de 5,42%, un plongeon record depuis avril 2000 qui a effacé tous ses gains des douze derniers mois. Depuis le début de la crise boursière mondiale le 10 août, il a abandonné plus de 11%. C’est principalement la remontée galopante du yen ces derniers jours face au dollar et aux autres monnaies qui pousse les investisseurs à se débarrasser massivement des actions des grands groupes exportateurs nippons. Le titre de la maison de commerce Mitsubishi Corporation a ainsi perdu 10,98% vendredi. Le constructeur automobile Toyota a cédé 7,20%, le sidérurgiste Nippon Steel 9,96% et le groupe d’électronique Sony 6,83%. “Le moral du marché est désastreux”, s’est inquiété Ryuta Otsuka, analyste chez Toyo Securities, pour qui la situation “est aussi mauvaise que lors de l’éclatement de la bulle technologique” du début des années 2000. Ce mouvement de panique est d’autant plus paradoxal que, de l’avis de la plupart des analystes, la deuxième économie mondiale est très peu concernée par les risques de non recouvrement des prêts “subprime” aux Etats-Unis. Selon une étude publiée mercredi par Macquarie Securities, l’exposition des huit principales banques nippones à ces mauvaises créances n’atteint au total que 440 milliards de yens (2,9 milliards d’euros), soit à peine le dixième de leurs bénéfices nets prévus cette année. Allergiques aux risques depuis le krach bancaire des années 1990, dont elles sortent à peine, les institutions financières nippones –au contraire de leurs homologues européennes et américaines– sont en effet restées à l’écart des paris risqués sur les prêts “subprime”. Mais, découragés par les taux d’intérêt désespérément bas au Japon, nombre d’investisseurs japonais ont choisi ces dernières années de placer leurs économies à l’étranger, où leur rendement est bien supérieur. A ce phénomène s’ajoute celui, purement spéculatif, du “carry trade”: certains investisseurs profitent du faible taux d’intérêt au Japon (0,5%) pour y emprunter de l’argent, qu’ils prêtent ensuite dans les pays où les taux sont beaucoup plus élevés comme les Etats-Unis (5,25%) et la zone euro (4%), mais aussi la Turquie (21,5%), l’Islande (14,25%) et la Nouvelle-Zélande (8,25%). Depuis des années, les capitaux japonais s’exilent donc massivement. Selon certaines estimations, les avoirs nippons placés à l’étranger totaliseraient environ 1.000 milliards de dollars, soit l’équivalent du Produit intérieur brut (PIB) annuel du Canada ou de l’Espagne. Cette fuite des capitaux a fait baisser le yen et prospérer les grands groupes japonais. Pour le seul premier trimestre 2007-2008, Toyota a ainsi empoché un gain de change de 100 milliards de yens (670 millions d’euros), soit grosso modo le prix d’une usine capable de fabriquer 150.000 voitures par an. Mais gouvernements, institutions internationales et économistes s’alarment depuis des mois des risques d’éclatement de la bulle du “carry trade” qui ferait flamber le yen et ruinerait de nombreux épargnants nippons. Un phénomène qui semble bel et bien avoir commencé. Le marché des changes “est en pleine panique”, a reconnu Kikuko Takeda, analyste chez Bank of Tokyo-Mitsubishi UFJ, selon qui “les investisseurs continuent à fuir les risques, sans avoir la moindre idée de l’étendue réelle du problème (des +subprimes+) et sans savoir quand ils vont s’arrêter”. |
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