Durant les années 90, la qualité de l’environnement n’était pas la
priorité principale de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord
(MENA).
«Quinze ans plus tard, l’intérêt porté à la question environnementale a fait
un bond en avant et la région est passée d’un investissement nul dans la
protection de l’environnement à des investissements dans chaque pays», a
déclaré Sherif Arif, conseiller régional de l’environnement de la région
MENA pour la Banque mondiale.
Selon M. Arif, le tournant décisif s’est produit en 1999, lorsque la Banque
a commencé à parlementer avec les pays qui ne se préoccupaient pas de la
dégradation de l’environnement et du coût qui en résultait.
Dans un effort innovateur, une équipe de la Banque mondiale, financée par le
Programme d’assistance technique pour la protection de l’environnement en
Méditerranée (METAP), a calculé que le «coût d’inaction» allait de 2,1% du
PIB en Tunisie jusqu’à 7 ou 8% en Iran.
«C’est un progrès important», a déclaré M. Arif. «Nous pouvons maintenant
mettre un prix sur le coût de l’inaction et comparer les avantages et les
coûts de l’investissement dans la gestion des ressources naturelles».
Ces statistiques ont servi d’appui aux ministres de l’Environnement, qui ont
pu discuter de l’importance de la protection environnementale «en parlant la
même langue que les ministres des Finances», a expliqué M. Arif.
Le facteur critique de l’économie
«En résultat, les gouvernements ont commencé à considérer la pollution et la
dégradation des ressources naturelles comme des facteurs critiques de
l’économie», a-t-il ajouté.
«Les récents progrès et succès de la protection de l’environnement sont
également les fruits d’années de confiance et de bonnes relations, même
entre des pays qui n’étaient pas clients de la Banque», a-t-il dit. «Nous
avons développé une relation de travail très étroite pendant 15 ans».
La Banque a participé à l’établissement d’une politique, de plans d’actions,
d’une stratégie et d’une analyse de la question environnementale, et a aidé
à mettre en place des ministères de l’Environnement dans toute la région
MENA. Les gouvernements allouent, ou prévoient d’allouer, des ressources
conséquentes à la protection de l’environnement. Encore plus important, les
préoccupations d’ordre environnemental influencent d’autres secteurs, tels
que le commerce et l’industrie.
«En 15 ans, nous avons fait des progrès prodigieux en mettant réellement en
place ces institutions, en renforçant leurs capacités et en leur accordant
des subventions et des prêts», a ajouté M. Arif.
Le changement climatique
«Outre les problèmes environnementaux, les pays de la région doivent
également faire face au changement climatique», a souligné M. Arif.
«Le changement climatique est devenu la préoccupation principale de chacun.
Il affecte toutes les couches sociales, des agriculteurs aux ministres. Ils
savent qu’ils ne vont pas pouvoir échapper aux impacts négatifs du climat
sur leur vie quotidienne».
«Cette nouvelle façon de penser permettra aux futurs efforts d’adaptation au
changement climatique d’être acceptés rapidement», a prédit M. Arif.
La Tunisie a déjà commencé à s’adapter au changement climatique et la Banque
apporte son aide à d’autres pays, tels que le Yémen et le Maroc, pour
surmonter ce problème.
Selon M. Arif, «tous ces pays seront touchés d’une façon ou d’une autre et
ils doivent modifier leur comportement et leur façon de faire des affaires».
Le marché du carbone
L’un des facteurs de ce tout nouvel intérêt pour les pays de la région est
le marché prospère du carbone estimé à 30 milliards de dollars US. «Le
marché du carbone permet aux pays en développement ayant ratifié le
Protocole de Kyoto de recevoir des versements en espèces pour les encourager
à investir dans des projets respectueux du climat, réduisant les émissions
de gaz à effet de serre, ainsi que la pollution, et augmentant ainsi
l’efficacité énergétique et la participation aux efforts du monde entier
pour freiner le changement climatique», a expliqué M. Arif.
Trois projets de ce type sont en cours en Égypte et en Tunisie, et d’autres
sont prévus en Jordanie, en Algérie, au Maroc, en Iran, en Arabie saoudite
et «potentiellement, dans toute la région», selon Lasse Ringius de l’Unité
de financement du carbone de la Banque.
Sinon, les projets d’enfouissement des déchets qui permettent de capter le
méthane (un gaz ayant le potentiel d’accroître l’effet de serre) et
d’améliorer les conditions de travail souvent dangereuses des jeunes
employés des décharges, ne seraient pas viables sur le plan économique.
Certains projets permettent de produire de l’électricité en tant que
sous-produit.
Le financement du carbone pourrait éventuellement permettre la construction
de «villes vertes» bénéficiant de normes et réglementations améliorées en
matière d’énergie, ainsi que de carburant moins polluant, une perspective
que contemple déjà l’Égypte», d’après M. Ringius.
Conjuguer pour mieux prêter
«La région MENA a été la première à conjuguer les prêts octroyés par la
Banque mondiale aux revenus générés par la réduction des émissions», a
déclaré M. Arif.
De tels prêts conjugués, dont les revenus aident à compenser le paiement des
intérêts, sont en place en Tunisie et en Égypte. Le Projet de réduction de
la pollution II mis en place en Égypte depuis un an a permis à cette
dernière de s’appuyer sur le prêt de 20 millions de dollars US octroyé par
la Banque mondiale pour obtenir un autre financement de 145 millions de
dollars US. Ce projet, qui cible la pollution industrielle, vend des
réductions d’émission à la Banque et autres, et une partie des revenus
générés est versée au nouveau programme gouvernemental de réduction de la
pollution.
M. Arif a ajouté que l’approche «conjuguer pour mieux prêter» stimulait les
gouvernements à s’attaquer de front aux problèmes de la pollution, lesquels
autrement seraient mis de côté pendant des années.
«On peut faire de bonnes affaires en protégeant l’environnement», a souligné
M. Arif. «C’est la première fois que les protecteurs de l’environnement sont
récompensés pour leurs actions».
(Source : Banque mondiale)
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