[25/08/2007 06:36:48] MOSCOU (AFP) La Russie, pays de la vodka-reine, doit se préparer à de profonds bouleversements et à de douloureuses hausses de prix à mesure que le marché se professionnalise et que l’Etat en reprend peu à peu le contrôle après les errances des années 90, selon des experts. Chouchoute depuis toujours des foyers russes, la vodka représente plus de 90% des alcools forts consommés en Russie, soit un marché annuel de plus de 15 milliards de dollars (11 milliards d’euros) à la vente, selon une étude de la banque Renaissance Capital. Bien que la bière, favorisée par des réglementations publicitaires plus souples et un marché plus mûr, ait opéré une percée remarquée, la prédominance de la vodka ne paraît pas menacée dans un pays où la consommation d’alcool pur a atteint 11,5 litres par personne en 2006 (7,9 litres en Allemagne), selon l’étude. Pour autant l’industrie de la vodka est loin d’apparaître structurée: le nombre d’usines, de 150 sous l’ère soviétique, a bondi à 800 en 2000, avant de retomber à 247 sites recensés officiellement à fin mars 2007, et dont les dix premiers contrôlent à peine 40% du marché. Mais tout laisse à penser que cela va changer, souligne Renaissance: “Nous pensons au vu des tendances actuelles que sept entreprises maximum émergeront comme consolidatrices du marché et en contrôleront 80% dans les 5 ou 7 années à venir”, écrivent les experts. L’autre tendance de fond attendue est la hausse des prix, et celle-ci sera particulièrement douloureuse pour les consommateurs des vodkas les moins chères, c’est-à-dire presque les deux tiers du marché. Les professionnels du marché des alcools russes s’en sont émus lors d’une récente conférence de presse. Trois facteurs sont en cause, selon Vadim Drobiz, vice-président de l’Union nationale des producteurs et distributeurs d’alcool. Le premier est la hausse du prix du blé des derniers mois, le deuxième celle des accises, qui doivent monter de 20% en trois ans, et le dernier les coûteux équipements obligatoires que devront acquérir les usines à partir de janvier prochain. La hausse sera au final d’au moins 5-6 roubles par bouteille, prévient Pavel Chapkine, président de l’Association nationale des alcools. Une somme qui peut paraître faible, mais sera durement ressentie par les consommateurs les plus modestes, selon lui. Pour Vadim Drobiz, “cette hausse est très dangeureuse”, et peut conduire à une “polarisation” du marché au profit des secteurs haut de gamme et illégal, au détriment du secteur moyen. Les prix actuels s’échelonnent de 15-20 roubles (43 à 57 centimes d’euro) la bouteille d'”ersatz” (teintures de pharmacie ou liquides techniques de nettoyage des vitres, désinfectants, antigels, etc), 35-50 roubles (1 à 1,43 d’euros) pour la vodka frelatée, et à partir de 70 roubles (2 euros) pour la vodka légale. “La hausse du prix de la vodka légale provoquera sans faille la croissance de la production et de la vente de vodka frelatée ou des erzatz. La structure de la consommation se dégradera”, craint-il, soulignant qu’aucun produit alcoolisé n’est assez populaire pour remplacer la vodka en Russie. Or la proportion de consommateurs buvant des produits de mauvaise qualité est déjà de 30%, soit “quelque 35% de notre marché d’alcool”. “Le socle du marché illégal d’alcool en Russie, c’est le niveau de vie très bas” de la population, résume-t-il. Les experts de Renaissance se veulent plus optimistes: “le gouvernement bataille depuis 1990 pour légaliser le marché de l’alcool, protéger les consommateurs des contrefaçons et des boissons dangereuses, et améliorer la collecte des impôts. Dans l’ensemble, nous pensons qu’il est enfin sur la bonne voie, même si la mise en oeuvre est douloureuse pour le secteur”. |
||
|