[26/08/2007 07:36:47] HARARE (AFP) L’hyperinflation record qui mine l’économie déliquescente du Zimbabwe a ralenti en juillet mais, malgré l’optimisme de ces chiffres officiels, les rayons des magasins restent désespérément vides. “On nous a dit que le gouvernement avait réduit les prix, maintenant on nous dit que l’inflation ralentit, mais je ne me souviens pas de la dernière fois où j’ai mangé du pain”, lance Lucky Mapfumo, étudiant en médecine de 23 ans. L’hyperinflation bat des records mondiaux, à 7.634,8% en juillet, soit une accélération de 383,7 points en rythme annuel par rapport à juin, a indiqué mercredi l’Office central des statistiques. Mais c’est un ralentissement de la hausse des prix d’un mois sur l’autre, à 31,6% en juillet contre 86,2% en juin, qui explique la rupture du silence officiel observé depuis mai. Le 28 juin, le gouvernement a ordonné aux commerçants de diviser les prix par deux et de les geler à ce niveau. Plus de 12.000 d’entre eux qui ne s’étaient pas pliés à la mesure ont payé des amendes. “Le gouvernement est le régulateur global de l’économie”, a déclaré à l’AFP le ministre des Finances Samuel Mumbengegwi, se réjouissant des dernières statistiques. La réduction des prix avait été bien accueillie par les Zimbabwéens, qui se sont rués sur des biens de première nécessité jusqu’alors hors de portée. Mais la mesure a aggravé les pénuries, les producteurs ne parvenant plus à couvrir leurs coûts, et les consommateurs sont contraints d’acheter au marché noir. “Cette décélération n’a de valeur que pour ceux qui veulent croire à leurs propres mensonges”, estime Daniel Ndela, économiste du cabinet Zimconsult, qui l’illustre par un incident récent: des personnes se sont battues pour acheter un peu de ciment à une quincaillerie qui vendait au prix officiel de 150.000 dollars zimbabwéens (0,75 USD) pour 50 kilos. “La bataille désespérée dans la queue ressemblait à un affrontement entre supporteurs tentant d’entrer dans le stade Rufaro (de Harare) pour voir un match de foot entre équipes populaires”, dit-il. “Ils n’avaient pas besoin du ciment pour construire une maison mais ils voulaient le revendre au coin de la rue au taux du marché noir, soit 1,5 million de dollars”, affirme M. Ndela. “C’est cela, la réalité de l’inflation”. “Les gens sont devenus les champions des files d’attente pour les biens de première nécessité”, renchérit Tapiwa Mashakada, secrétaire aux affaires économiques du Mouvement pour le changement démocratique (MDC, opposition)”. Conscient de la gravité des pénuries, le gouvernement a annoncé le 22 août que les prix de produits de base comme l’huile de cuisine ou le sucre pouvaient augmenter un peu, mais la plupart des magasins d’Harare en restent dépourvus. “L’issue pour le gouvernement maintenant c’est de tenter de stabiliser l’économie générale”, estime Witness Chinyama, économiste indépendant basé à Harare. Pour lui, le ralentissement “annoncé n’est que le résultat d’une inflation réprimée (…). Ce qui n’aide en rien car ce sont les symptômes qui sont étouffés, on ne s’attaque pas aux causes profondes.” Vice-ministre de l’Industrie, Phineas Chihota, mise sur un fonds gouvernemental pour renflouer les entreprises en détresse. Ces prêts à très bas taux d’intérêts “vont se traduire par un retour des marchandises dans les magasins”, dit-il à l’AFP. Le Zimbabwe, autrefois grenier à grains de l’Afrique, s’enfonce depuis huit ans dans la récession. Quatre personnes sur cinq sont au chômage. |
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