La coopération régionale entre pays en développement peut contribuer à accélérer l’industrialisation et l’évolution structurelle

La coopération régionale entre pays en développement peut contribuer à
accélérer l’industrialisation et l’évolution structurelle

Dans le Rapport sur le commerce et le développement, 2007 de la CNUCED,
une coopération régionale active est considérée comme un moyen de renforcer
les stratégies de développement et de faciliter l´intégration à l´économie
mondiale. Le commerce des pays en développement tend à croître plus
rapidement entre pays d´une même région qu´entre pays de régions
différentes. La part des articles manufacturés est également plus importante
dans le commerce intrarégional que dans les échanges avec le reste du monde.
Ainsi, en dépit d´une tendance générale à la mondialisation, l´intégration
régionale peut être bénéfique au développement à long terme, comme le
constate un nouveau rapport de la CNUCED. Une telle intégration peut aider
les pays à étoffer leurs capacités économiques et leur permettre de soutenir
la concurrence à l´échelle mondiale.

Cela dit, pour y parvenir, les pays ne
doivent pas uniquement s´en remettre à la libéralisation du commerce. Le
Rapport sur le commerce et le développement, 2007 (TDR), fait valoir que la
coopération régionale devrait également englober des mesures conjointes
susceptibles de renforcer le potentiel de croissance et l´évolution
structurelle des pays en développement: cela concerne notamment les
politiques macroéconomiques, financières et industrielles et les politiques
d´infrastructure. Pour ces pays, une coopération régionale visant à
améliorer les moyens de transport, à communiquer des informations
commerciales et à conjuguer leurs efforts dans des secteurs tels que
l´énergie, l´approvisionnement en eau, les activités de
recherche-développement et l´accumulation du savoir peut être d´une
importance capitale pour assurer le succès des stratégies de développement.

La proximité géographique procure encore des avantages considérables à
l´heure de la mondialisation économique: le rapport affirme que la
coopération régionale entre pays en développement peut soutenir les plans
nationaux de développement et pallier certaines des lacunes de la
gouvernance économique mondiale. Pour bon nombre de ces pays, il peut
s´avérer plus utile de s´ouvrir sur la région en traitant avec des
partenaires qui se trouvent à un niveau comparable de développement que de
se tourner exclusivement vers le marché mondial. La concurrence étrangère à
l´intérieur de la région peut être moins difficile à gérer et la probabilité
d´entrer en lice à armes égales hypothétique. Le rapport considère que, pour
permettre aux pays de tirer le meilleur parti de ces possibilités, la
coopération doit dépasser le cadre de la libéralisation du commerce et des
relations financières. Il faudrait prévoir des initiatives communes axées
sur des objectifs macroéconomiques, industriels et d´infrastructure pour
doper la croissance et les mutations structurelles, ce qui se traduira par
une activité économique plus largement ancrée et plus sophistiquée. D´après
le rapport (sous-titré “La coopération régionale au service du
développement”), les pays en développement n´ont pas encore exploité toutes
les possibilités d´œuvrer conjointement dans ce sens. Ce type de coopération
peut en outre offrir à leurs gouvernements de nouvelles options politiques
en sus de celles dont ils disposent au niveau interne.
Au cours des vingt
dernières années, le commerce intrarégional a affiché, dans toutes les
régions en développement, une croissance plus forte que le commerce
extrarégional. C´est dans les pays en développement d´Asie de l´Est que son
essor a été le plus rapide, puisqu´il compte aujourd´hui pour près de la
moitié dans le total des échanges de cette région. En Amérique latine, il
s´est nettement développé depuis la fin des années 80 et avoisine à présent
30% du commerce total. Il a également progressé en Afrique, encore que son
volume reste inférieur à 10 % du total des échanges de la région. Selon les
économistes de la CNUCED, ce n´est pas seulement le rythme d´expansion des
échanges qui fait de l´intégration régionale une stratégie propre à
accélérer le développement économique. La composition des exportations intrarégionales est encore plus importante, car elle influe considérablement
sur la croissance à long terme. Dans toutes les régions, la part des
articles manufacturés ? notamment ceux dans lesquels la proportion de
compétences et de technologie est relativement élevée ? dans le commerce
intrarégional a été nettement supérieure à la part de ces produits dans le
commerce total. On peut donc en déduire que l´intensification de l´activité
économique régionale favorise la modernisation industrielle et la
diversification.

Le rapport relève un “biais géographique” apparent en
matière de commerce et de croissance économique. Cela tient à la fois au
fait que des dispositifs formels de coopération sont plus faciles à mettre
en place entre voisins, que la proximité a pour effet d´abaisser les coûts
de transport, qu´un capital de connaissances tacites s´accumule en raison de
la répétition des interactions, enfin, que les retombées technologiques et
commerciales sont plus fréquentes lorsque les facteurs climatiques,
culturels, linguistiques et autres sont similaires. Le rapport prône un
élargissement de la coopération aux politiques publiques, qu´il s´agisse
d´améliorer la logistique commerciale et les transports, de développer
l´infrastructure énergétique, de renforcer les relations financières ou
d´adopter des démarches concertées ou communes dans les secteurs monétaire
et industriel.

De telles dispositions peuvent utilement compléter un cadre
multilatéral propice à aider les pays à mieux affronter la mondialisation.
Les institutions régionales pourraient également combler les lacunes que
présentent les structures mondiales de gouvernance économique, en assurant
par exemple une protection contre l´instabilité des taux de change. Le
rapport fait néanmoins observer qu´il n´y pas de schéma directeur pour ce
type de coopération: la forme qu´elle prendra dépendra non seulement des
données historiques, géographiques et politiques propres à la région
considérée, mais également du poids relatif accordé au jeu du marché et aux
interventions de l´État. Ainsi qu´il ressort de l´édition 2007 du Rapport
sur le commerce et le développement, la coopération régionale officielle
peut s´accompagner d´une intégration régionale effective sous diverses
formes. Celle-ci apparaît parfois sans que les intéressés aient conclu un
accord commercial en bonne et due forme ni établi quelque autre
collaboration ambitieuse en matière de politiques publiques, ce qui est par
exemple le cas des pays nouvellement industrialisés dAsie de l´Est et du
Sud-Est. En l´occurrence, l’intégration régionale a été déterminée
principalement par les stratégies de grandes entreprises de la région,
notamment au Japon, et par un contexte macroéconomique favorable marqué par
une croissance rapide et des taux élevés d´accumulation du capital.

En
Amérique latine, les accords officiels de coopération régionale ont joué un
rôle plus important qu´en Asie: cependant, même parmi des pays de la région
qui ne sont pas membres d´un même groupement officiel, le commerce intrarégional s’est développé plus rapidement que les échanges
extrarégionaux, ce qui semble confirmer l´existence d´un biais géographique
naturel dans le secteur du commerce. Les pays africains sont généralement
signataires de divers accords commerciaux régionaux, mais cela n´a guère
favorisé le commerce intrarégional. Un tel état de fait s´explique
principalement par des structures de production insuffisamment développées,
des possibilités d´exportation restreintes et de graves contraintes liées à
la faiblesse des infrastructures. Parmi les domaines où la coopération
régionale peut être active, le rapport mentionne des mesures apparemment
simples, comme celles qui facilitent les échanges, les opérations de transit
et la diffusion de l´information commerciale. Une coopération régionale pour
la planification et le financement des infrastructures de transport qui
permettront des échanges matériels transfrontières et en abaisseront le coût
est elle aussi importante pour le développement.

Autres exemples de
coopération régionale au service du développement: les projets régionaux de
gestion et d´investissement dans des secteurs aussi essentiels que l´énergie
et l´eau, qui représentent de sérieux goulots d´étranglement dans de
nombreux pays en développement. Les grands projets de développement
industriel, de recherche-développement et d´accumulation du savoir sont
souvent trop onéreux et aléatoires pour tel ou tel pays en développement,
mais peuvent s´avérer viables si plusieurs pays agissent de concert. Le
rapport note que l´histoire de l´intégration économique ouest-européenne est
riche d´enseignements de ce type. En outre, la CNUCED fait valoir que la
coopération régionale offre trois moyens d´aider les pays en développement à
remédier aux insuffisances du système financier international: l´octroi,
dans le cadre régional, de facilités de paiement et le soutien à court terme
de la balance des paiements; le financement à long terme du développement;
enfin, une protection contre la volatilité des taux de change et les
déséquilibres monétaires qui peuvent fausser les courants commerciaux et
faire obstacle à des relations commerciales fécondes.

Le système financier
mondial étant dépourvu d´instruments propres à atténuer l´instabilité des
marchés internationaux de capitaux et ses conséquences pour les pays en
développement, la coopération régionale dans le secteur monétaire et en
matière de change est devenue un enjeu majeur pour toutes les régions en
développement. Le rapport considère qu´en l´absence d´une réforme en
profondeur de l´architecture financière mondiale, le renforcement de la
coopération monétaire et financière régionale peut grandement contribuer à
une meilleure harmonisation des systèmes financier et commercial
internationaux sans que soient compromis les intérêts spécifiques des pays
en développement (UNCTAD/PRESS/PR/2007/024).

Comme le note le rapport, il est évident que tout pays en développement peut
tirer profit de l´expansion de ses exportations tant à l´échelle mondiale
que régionale. Cependant, s´il cherche à moderniser sa structure de
production et à rehausser le degré de technicité de son industrie,
l´orientation vers le marché régional peut largement contribuer à améliorer
la compétitivité des producteurs locaux et représenter une première étape
efficace vers l´intégration au marché international.

(Source : CNUCED Rapport 2007
sur le Commerce et le Développement)