Croissance française : des économistes proposent leur recette pour rattraper le retard

 
 
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Elie Cohen, l’un des auteurs du rapport, à Paris le 11 février 2004 (Photo : Eric Feferberg)

[14/09/2007 12:10:39] PARIS (AFP) Réforme de l’enseignement supérieur, relance de l’emploi des jeunes et des seniors, libéralisation de la grande distribution et des professions “fermées”: autant de mesures dont la combinaison permettrait à la France de rattraper son retard de croissance, selon un rapport.

“Si l’on prolonge les tendances actuelles, l’écart de revenu par tête entre les Etats-Unis et la France sera en 2020 équivalent à celui qui sépare aujourd’hui la France de la République tchèque”, avertit ce rapport du Conseil d’analyse économique (CAE) sur “les leviers de la croissance française”.

Remis jeudi au Premier ministre François Fillon, ce texte précède les propositions de la commission Attali pour “libérer la croissance”, attendues d’ici la fin de l’année.

La France pourrait augmenter d’au moins 0,5 point sa croissance “en investissant un point de PIB supplémentaire dans l’enseignement supérieur et en flexibilisant les marchés des biens et du travail”, soulignent d’emblée les économistes Philippe Aghion, Gilbert Cette, Elie Cohen et Jean Pisani-Ferry.

Plus que les outils, déjà largement identifiés, l’originalité du rapport est de prôner un “séquençage” précis pour la mise en oeuvre combinée des mesures.

“Notre recommandation est d’engager d’emblée les réformes qui ne produisent leurs effets qu’à moyen terme et dont le coût est immédiat, comme l’enseignement supérieur, d’organiser la montée en puissance du facteur travail par des mesures appropriées pour les jeunes et les seniors, de commencer les réformes structurelles par le marché des biens plutôt que par le marché du travail”, résume le rapport.

L’ultime étape serait de concentrer les efforts sur “les noeuds de blocage”, au premier rang desquels la grande distribution. Il faut libéraliser ce secteur en abrogeant les lois Royer et Raffarin sur l’implantation des grandes surfaces qui, au lieu de protéger les petits commerces, “ont surtout eu pour effet de restreindre la concurrence entre grandes surfaces”, estiment les experts, qui préconisent aussi la suppression de l’interdiction de revente à perte.

Un “enjeu considérable”, soulignent-ils, citant des études selon lesquelles la France pourrait gagner l’équivalent de 100 milliards d’euros sur 15 ans et 1,2 million d’emplois si son secteur des services et du commerce était plus concurrentiel et développé.

Les auteurs prônent également la suppression des barrières dans les professions fermées (taxis, notaires), hors professions médicales.

“En matière d’emploi, notre conviction (…) est que la réforme du service public de l’emploi est prioritaire” avec la fusion ANPE/Unedic (assurance chômage), insistent les économistes.

“Une combinaison de mesures structurelles touchant simultanément à ces différents leviers permettrait d’approcher puis d’atteindre une croissance proche de 3% l’an au cours des 15 prochaines années, et de la maintenir aux alentours de 2,5% l’an au-delà de cet horizon”.

Au total, la mise en oeuvre de ces réformes aurait un coût de 1,3 ou 1,4 point de PIB et se solderait à court terme par un léger creusement du déficit public, de 0,4 point de PIB, selon ces experts. Les gains de croissance permettraient toutefois de résorber le supplément d’endettement au bout de dix ans.

Les marges de manoeuvre de la France ont toutefois été entamées par le paquet fiscal voté cet été, d’un coût de 0,6 point de PIB, a regretté vendredi Philippe Aghion, professeur à Harvard. Pour lui, “il eut été plus judicieux d’utiliser cet argent pour financer des réformes structurelles plutôt que pour des réformes qui semblent un peu hasardeuses sur la croissance et nous paraissent onéreuses”.

 14/09/2007 12:10:39 – © 2007 AFP