[15/09/2007 08:54:00] PARIS (AFP) Remplacé de plus en plus souvent, prêté au sein de la famille et des amis, le téléphone mobile perd peu à peu son statut intime et personnel pour devenir éphémère et collectif, selon une étude publiée samedi et réalisée pour l’Association française des opérateurs mobiles (Afom). “C’est la grande découverte de cette enquête: lors de notre première étude” réalisée en 2005, “le mobile était un objet personnel, intime, qu’on n’arrivait pas à prêter. Aujourd’hui il circule beaucoup plus qu’avant”, explique Joëlle Menrath, directrice du cabinet Discours et pratiques, qui a mobilisé cinq chercheurs pendant six mois pour réaliser l’étude. Ces derniers ont effectué une centaine d’entretiens et des observations sur le terrain (trains, cafés, files d’attente), à Paris et dans sa banlieue, dans plusieurs grandes villes (Marseille, Strasbourg, Lyon) et des zones rurales (Creuse, Beaujolais, stations de ski). Le mobile semble moins sacralisé qu’avant, car il est éphémère: les Français en changent plus souvent, séduits par les nouveaux modèles ou “lâchés” par l’ancien (volé, cassé, perdu). “On continue d’investir beaucoup (émotionnellement) dans cet objet mais on sait que c’est transitoire”, note Mme Menrath. Les adolescents vont jusqu’à se les échanger. “C’est un objet que l’on partage, donc il n’y a plus rien d’intime dedans: on n’a aucune gêne à montrer aux autres ses SMS, y compris amoureux, ou ses photos”. Les adolescents tirent même une certaine fierté du contenu de leur téléphone: “ils adorent faire la visite de leur portable comme s’ils faisaient la visite d’un musée”. L’appareil devient donc collectif. Une tendance confirmée dans le cercle familial, où certains mobiles sont utilisés à plusieurs, suivant les forfaits les plus avantageux. “Il y a une recherche d’optimisation collective des forfaits”, relève Mme Menrath. Celui qui bénéficie d’appels illimités le soir ou le week-end prête son mobile aux autres, de même que les parents avec leurs enfants, car ils ont de plus gros forfaits ou bénéficient d’un téléphone professionnel. Dans les zones moins couvertes, la famille s’arrangera pour que chacun ait un forfait chez un opérateur différent, afin qu’au moins l’un des leurs capte. Les amis aussi s’organisent, particulièrement les adolescents: ceux qui ont des forfaits “prêtent” des SMS ou des minutes de communication à ceux qui n’ont que des cartes prépayées. Les forfaits des opérateurs incluant des appels illimités au sein de leur parc de clients font naître des communautés d’un nouveau genre. L’enquête cite l’exemple de deux amies qui s’appellent tous les soirs pour commenter ce qu’elles regardent à la télévision, simplement parce qu’elles peuvent le faire en illimité. “Le choix d’un opérateur peut même être orienté par la prise en compte (…) de ceux avec qui on souhaite être le plus souvent possible en lien”, écrit l’étude. Globalement, alors qu’en 2005, les gens interrogés évoquaient surtout leur relation personnelle au mobile, ils insistent cette année sur leur rapport aux autres. Non seulement on comprend plus facilement que quelqu’un doive raccrocher précipitamment, mais on tolère mieux les incivilités générées par le mobile, tout en apprenant l’auto-discipline. “Les gens ont compris que les interdictions ne servaient à rien, ils ont conscience qu’il faut que leur comportement soit exemplaire pour les autres”, selon Mme Menrath. Ainsi, laisser son mobile en vibreur entraîne généralement la même discipline autour de soi. |
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