[16/09/2007 10:00:24] KHANTY-MANSIISK (AFP)
La maison, en bois fané, n’a ni eau chaude ni toilettes et abrite une vingtaine de familles : mais, travers du boom pétrolier que vit cette petite ville sibérienne, un trois-pièces y vaut une fortune. “Il en coûte 1.000 dollars par mois, autant qu’à Moscou”, affirme Olga, 57 ans, qui y réside depuis 30 ans. Cette habitante juge néanmoins son bien-être encore acceptable comparé à certains de ses voisins, comme cette babouchka de près de 80 printemps contrainte de recourir à un vendeur ambulant pour l’eau potable et à l’eau de pluie des gouttières pour le reste. Mais “même dans ces conditions, les logements s’arrachent” dans la ville, témoigne-t-elle. Au point que le marché immobilier, à la vente comme à la location, ressemble désormais à celui des métropoles comme Moscou et Saint-Pétersbourg, jurent les habitants.
Dérobée à la gigantesque région marécageuse qui couvre une partie du coin nord-ouest de la Sibérie, Khanty-Mansiisk, 60.000 habitants, n’aurait pas grand-chose pour faire rêver, si elle n’était le chef-lieu de la région autonome du même nom, laquelle s’affiche fièrement comme la championne de la production d’hydrocarbures en Russie. Cette manne lui autorise de fait un niveau de prospérité inégalé en Sibérie, qu’elle a mise à profit depuis cinq ans pour littéralement se métamorphoser, au dire des locaux. Au centre-ville, cette transformation paraît déjà quasi-achevée, avec plusieurs constructions futuristes et des maisons aux couleurs vives et aux toits rutilants qui évoquent irrésistiblement l’image d’un village playmobil, le tout d’une propreté scandinave. En périphérie, le paysage ressemble davantage à un damier où des maisons flambant neuves, allongées et à trois niveaux, alternent souvent avec des constructions en bois, du type de celle qu’habite Olga, ou individuelles, souvent en plus mauvais état encore. Mais ces mauvais logis de bois sont tous en sursis à plus ou moins court terme : leurs habitants sont au fur et à mesure relogés dans des maisons neuves, assure le gouverneur de la région, Alexandre Filipenko. Selon lui, la flambée de l’immobilier est due à un “déséquilibre” qui n’est que la rançon du succès de Khanty-Mansiisk : la ville, à rebours de la tendance générale en Russie, ne cesse de croître et d’attirer de nouveaux habitants, alléchés par les salaires élevés, les bonnes prestations sociales locales, la qualité des infrastructures… en un mot, la “qualité de la vie”, selon lui. “Il y a très peu d’offres de logement sur le marché. Nous essayons de passer cette période, il y en aura davantage plus tard”, promet-il. Pour l’heure, “tout bâtiment est déjà vendu avant d’être construit car les gens craignent que ce ne soit encore plus cher demain”, se désole-t-il. Lioubov, une laborantine de 54 ans, figure sur les listes des gens appelés à déménager, après qu’une commission a visité son appartement actuel, lui aussi dépourvu d’eau chaude et dont les murs gondolent. Elle ignore encore quand cela sera possible, mais affiche une foi inébranlable envers le gouverneur. “Tout a été construit grâce à lui en ville. Tout le monde lui en sait gré, il est populaire”, complète Olga. Et de fait, la ville regorge de chantiers, qui comme c’est fréquent en Russie emploient quasi-exclusivement des travailleurs d’Asie centrale, notamment du Tadjikistan, pour un salaire que les habitants russes qualifient de “kopecks”. Ironiquement, leur logement à eux se limite souvent à un simple garage qu’ils partagent tout l’été avant de rentrer chez eux lorsque l’hiver sibérien (jusqu’à -40°) rend toute construction impossible. |
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