Birmanie : reprise en Belgique de la longue bataille judiciaire contre Total

 
 
CPS.HIL78.021007144334.photo00.quicklook.default-160x245.jpg
Logo du groupe pétrolier Total

[02/10/2007 12:50:56] BRUXELLES (AFP) La bataille judiciaire belge autour des activités controversées de Total en Birmanie a été relancée mardi, alors que le géant pétrolier français était déjà sur la sellette pour le soutien financier que ses détracteurs l’accusent de fournir à la junte birmane.

Total, associé à l’américain Unocal et à la compagnie pétrolière birmane, a construit un gazoduc en Birmanie dans les années 1990. Depuis, il a fait l’objet de plusieurs plaintes de réfugiés birmans l’accusant d’avoir utilisé des travailleurs forcés mis à sa disposition par la junte.

En France, la compagnie pétrolière a bénéficié en 2006 d’un non-lieu du tribunal de Nanterre (banlieue parisienne).

En Belgique, en revanche, la plainte visant la junte pour crimes contre l’humanité et Total pour complicité de ces crimes va être de nouveau instruite, a confirmé mardi l’avocat des plaignants birmans, Me Alexis Deswaef.

La Cour constitutionnelle belge avait jugé en 2005 recevable l’action introduite en 2002 par quatre réfugiés birmans. Mais en mars dernier, la Cour de cassation avait dessaisi la justice car les plaignants n’étaient pas belges.

La Cour constitutionnelle, rappelant qu’un réfugié reconnu avait les mêmes droits de justiciable qu’un citoyen belge selon les conventions internationales, a cependant estimé que la loi belge de compétence universelle était applicable dans ce cas.

Le ministère belge de la Justice a donc fait injonction lundi au Parquet fédéral de relancer la procédure contre Total et le dossier va être soumis à la Chambre des mises en accusation de la Cour d’appel de Bruxelles pour décider d’un éventuel procès, selon Me Deswaef.

Les quatre Birmans reprochent à Total d’avoir apporté dans les années 1990 un soutien logistique et financier à la junte birmane responsable, selon eux, de travail forcé, de déportations, de meurtres et de tortures.

“Ils ont refusé, selon Me Deswaef, les grosses indemnités que Total était prêt à leur verser, comme il l’a déjà fait en France et en Birmanie à l’égard d’autres victimes, en échange d’un arrêt des poursuites”.

La plainte vise Total, son ancien patron Thierry Desmarest, responsable de l’exploration et de la production au moment des faits, ainsi que l’ancien directeur du groupe pétrolier français en Birmanie, Hervé Madeo.

Total est présent en Birmanie depuis 1992, sur le champ gazier de Yadana (sud), où il a produit en 2006 17,4 millions de mètres cubes de gaz par jour, qui alimentent des centrales électriques en Thaïlande.

La répression sanglante des manifestations en Birmanie a rouvert la question des investissements occidentaux dans ce pays.

Le 27 septembre, le président français Nicolas Sarkozy a appelé au gel des investissements français en Birmanie, sans demander un retrait de Total comme le souhaitent des organisations de défense des Droits de l’Homme.

Le même jour, deux groupes parlementaires néerlandais de gauche, représentant 58 des 150 députés, appelaient à un boycott de Total.

Lundi, le ministre belge de l’Environnement et la secrétaire d’Etat au Développement durable ont réclamé l’arrêt du contrat qui fait de Total, repreneur en 1999 de la firme pétrolière belge Pétrofina, le fournisseur privilégié des administrations belges.

Le ministre français des Affaires étrangères Bernard Kouchner a rappelé mardi que les Occidentaux travaillaient sur de nouvelles sanctions contre la junte birmane. “Total n’en sera pas exonéré”, pas plus que “les autres qui travaillent en Birmanie”, a assuré le ministre, auteur en 2003 d’un rapport blanchissant la compagnie de l’usage de travail forcé.

Interrogé, Total s’est refusé mardi à tout commentaire, confirmant simplement avoir “pris note” de la relance de la procédure en Belgique.

 02/10/2007 12:50:56 – © 2007 AFP