[18/10/2007 06:58:53] WASHINGTON (AFP) En dépit de la baisse inexorable de leur monnaie, les Etats-Unis réaffirment régulièrement leur politique du “dollar fort”, à la fois parce que les ambiguïtés de ce message servent leurs intérêts et parce qu’ils ont peu de marge de manoeuvre. En cinq ans, le dollar a perdu près d’un tiers de sa valeur par rapport à l’euro. Pourtant, le Trésor américain n’a pas dévié de son message. Juste avant le G7 Finances de vendredi, le secrétaire au Trésor Henry Paulson a redit qu'”un dollar fort est dans l’intérêt de (son) pays” mais que la valeur de la monnaie doit être fixée dans un marché compétitif, sur la base des fondamentaux économiques. C’est la formulation officielle, que les responsables américains répètent à intervalles réguliers. Elle permet d’envoyer le message ambigu que les Etats-Unis se satisfont de la valeur du dollar tant que la dépréciation se fait de façon ordonnée. Le Fonds monétaire international (FMI) a d’ailleurs abondé dans leur sens en assurant mercredi que le billet vert restait “surévalué” par rapport aux fondamentaux. Reste que l’affaiblissement du dollar “est dans leur intérêt, mais personne ne va le reconnaître publiquement. Personne ne veut avoir l’air de dire que la faiblesse du dollar est voulue”, assure John Lonski de Moody’s Investors Services. Un dollar faible permet de réduire sans douleur les énormes déséquilibres commerciaux américains, qui devraient cette année diminuer pour la première fois en six ans. Mais avec l’accélération de la dépréciation du billet vert depuis l’été, cette formulation semble de plus en plus absurde. “Je doute qu’ils vont continuer longtemps à parler d’une politique du dollar fort”, estime James Dorn, vice-président chargé des affaires économiques à l’institut libéral Cato. L’économiste souligne qu’il faut distinguer entre valeur intérieure et valeur extérieure du dollar. “La valeur intérieure est toujours assez forte, parce que nous avons une inflation faible. Mais la valeur extérieure est appelée à baisser”, affirme-t-il. Il y a plusieurs raisons à cela : les déséquilibres des comptes américains, la surabondance de dollars sur les marchés… “Les investisseurs étrangers vendent du dollar pour acheter de l’euro, donc la pression à la baisse va s’accentuer” sur le billet vert, estime M. Dorn. Cette situation fait de plus en plus grincer les dents en Europe, qui se voit pénalisée par l’appréciation de sa monnaie. Elle semble aussi commencer à inquiéter la banque centrale américaine, comme le notait le Financial Times dans un éditorial la semaine dernière. Au cours de sa dernière réunion, la Fed a souligné que “les risques d’inflation pourraient augmenter si le dollar continuait à se déprécier de façon importante”. Mais les économistes jugent fort peu probable que les Américains agissent pour contrer cette faiblesse. Parce que cela les arrange bien, mais aussi parce qu’ils ont peu de moyens d’action. “Les Etats-Unis ne peuvent pas faire grand chose. Les marchés des capitaux brassent des sommes énormes et les sommes qu’il pourraient consacrer à intervenir seraient dérisoires comparées aux flux en circulation”, note M. Dorn. Reste l’arme des taux d’intérêt, qui pourraient être relevés pour rendre les actifs rémunérés en dollar plus attractifs. Mais “vu la situation de l’immobilier aux Etats-Unis, la dernière chose que veut faire la Fed est de relever ses taux”, estime M. Lonski. Les Américains “préfèreraient que ce soit la banque centrale européenne qui agisse et soulage l’euro, ce qui pourrait aller jusqu’à une baisse des taux de la BCE”, ajoute-t-il. En gros, la célèbre formule lâchée en 1971 par le secrétaire du Trésor d’alors, John Connally, aux Européens inquiets des parités de changes, reste valable : le dollar est “notre monnaie, mais votre problème”. |
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