Autrefois honnis, les entrepreneurs privés gonflent les rangs du PCC

 
 
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Yuan Yue dans son bureau à Pékin, le 27 septembre 2007 (Photo : Teh Eng Koon)

[18/10/2007 08:38:56] PEKIN (AFP) Sous le règne de Mao Zedong, un homme d’affaires comme Yuan Yue aurait été catalogué “ennemi de classe” et n’aurait certainement pas pu joindre le Parti communiste chinois.

Aujourd’hui, l’entrepreneur, fondateur d’une florissante entreprise d’études de marché, est l’un de ces nombreux capitalistes rouges, que ne boudent plus des dirigeants ayant embrassé “l’économie de marché socialiste”.

“Tout est question de succès. Quand vous réussissez, tout le monde vient vous chercher, y compris le parti”, dit le patron de Horizon Research.

“Ca, c’est le grand changement. Autrefois, il fallait adhérer au parti pour pouvoir accéder aux opportunités”, ajoute Yuan, dont les bureaux sont installés dans une des étincelantes tours commerciales de Pékin.

Yuan Yue, 39 ans, reçoit dans ses locaux remplis d’animaux empaillés, où il rédige vraisemblablement certaines des colonnes dont il est coutumier dans les journaux chinois, quand il n’anime pas, à Shanghai, une émission télévisée sur le monde des affaires.

Avocat de formation, cet ancien fonctionnaire du ministère de la justice ne ressent aucun tiraillement entre sa double attache au parti et au monde de l’entreprise.

“Je pense toujours que le parti est une bonne organisation souhaitant accomplir de bonnes choses”, explique-t-il.

Yuan a adhéré en 1985, alors qu’il avait 17 ans et n’a pas rendu sa carte quand le mouvement pro-démocratique de 1989, qu’il dit avoir soutenu, a été réprimé.

Il fait partie des 3,14 millions membres travaillant dans le secteur privé officiellement recensés.

L’adhésion des entrepreneurs, autorisée depuis 2003, est “un développement important” de la vie politique chinoise et le phénomène “est en hausse rapide”, souligne Jean-Francois Huchet, directeur du Centre français de recherche sur la Chine contemporaine à Hong Kong.

Ils ne sont encore qu’une minorité des 73 millions de membres du PCC mais ont entamé leur progression dans la hiérarchie du parti avec près de 75.000 entrepreneurs appartenant officiellement à des comités locaux ou nationaux et assemblées diverses, y compris la plus haute, nationale.

Leur présence a certainement aidé à l’adoption cette année d’une loi sur la propriété privée, après des années de débats et d’atermoiements, estiment des experts.

“Ils ont évidemment une influence et celle-ci ne peut que s’accentuer”, dit Sun Yingshuai, politologue de l’Académie des sciences sociales chinoises.

Si, pour ces nouveaux venus, la carte du parti est parfois la voie rapide vers les relations “utiles”, à l’inverse l’organisation politique s’assure un contrôle rampant sur un secteur au poids social et politique grandissant.

“Le parti reconnaît ainsi qu’il vaut mieux les compter dans ses rangs qu’en dehors”, dit Jean-François Huchet.

Yuan ne se prive pas de juger les échecs et manquements du PCC en matière sociale notamment. “Je pense qu’il faudrait agir davantage sur ces sujets. Les évolutions sociales et politiques ne sont pas aussi rapides que le développement économique”, dit-il.

Mais, précisément, Jean-François Huchet n’est pas sûr que les entrepreneurs soient les plus à même de faire avancer de telles idées “d’intérêt public”: “des gens qui ont en tête de faire des profits pourraient détourner les priorités”. “Voilà une importante contradiction pour le parti communiste.”

 18/10/2007 08:38:56 – © 2007 AFP