Les ténors de la finance peinent à avouer leur responsabilité dans la crise

 
 
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Josef Ackermann, président de Deutsche Bank et président de l’Institut de la Finance Internationale, le 24 mai 2007 à Francfort (Photo : Thomas Lohnes)

[21/10/2007 22:25:33] WASHINGTON (AFP) Le gratin mondial de l’industrie bancaire, réuni dimanche à Washington, a esquissé du bout des lèvres un début de mea culpa sur son rôle dans la récente crise financière, tout en faisant porter une part de la responsabilité aux agences de notation ou aux investisseurs.

“Des erreurs ont été faites. Nous cherchons des réponses au sein de notre secteur”, a admis Josef Ackermann, président de Deutsche Bank et président de l’Institut de la Finance Internationale (IIF).

“C’est notre responsabilité. (…) Quand on émet un prêt on doit en assumer le coût”, a renchéri William Rhodes, vice-président de Citigroup, lors d’une conférence de presse à l’issue d’un congrès de deux jours de l’IIF, qui publiera un rapport sur la crise en avril 2008.

David Dodge, le gouverneur de la banque centrale du Canada, a souligné que la quête de rendements élevés pendant une période de forte croissance et d’abondantes liquidités avait entraîné “une détente des normes d’émissions de prêts”.

Josef Ackermann a également mis en cause “la course à la performance”, de même que la le phénomène de “titrisation”, qui consiste à transformer des crédits classiques en titres obligataires cotés sur les marchés financiers. Le risque associé à ces prêts se retrouve donc disséminé chez des investisseurs non identifiés à travers la planète.

M. Dodge a reconnu que les banques centrales n’avaient pas su percevoir les dangers de cette titrisation, à travers laquelle les banques se sont en quelque sorte défaussées du risque associé aux créances qu’elles souscrivaient: l’émetteur n’était plus “confronté aux conséquences” des crédits contractés, a-t-il souligné.

Les banquiers ont toutefois pointé du doigt les organismes de crédit immobilier non bancaires, souhaitant qu’ils soient désormais réglementés. Les agences de notations ont une fois de plus été accusées d’avoir contribué à la crise en n’avertissant pas suffisamment tôt les marchés des risques liés au marché immobilier américain et en s’exposant à des conflits d’intérêt potentiels.

Walter Kieholtz, président de Crédit Suisse, une banque très touchée par la crise des subprimes, a affirmé que ces agences étaient “payés par les mauvaises personnes” — faisant allusion au fait que ces agences sont payées par les institutions financières qu’elless notent — et qu’elle étaient trop peu nombreuses pour que leur information soit fiable.

Baudouin Prot, le directeur-général de BNP Paribas, a toutefois jugé que les investisseurs étaient coupables de s’être aveuglément “reposés sur leurs notations sans étudier réellement les produits financiers” en cause.

David Rubenstein, fondateur et co-président du fonds de capital investissement Carlyle, a lui vertement renvoyé la balle aux banques, notamment allemandes.

“Au restaurant, si vous ne pouvez pas vous offrir un steak +catégorie supérieure+, vous demandez un steak +sélection+, 5% moins cher, 95% aussi bon. Maintenant si quelqu’un arrivait avec un idée brillante qui s’appellerait +prêts à risque+ , 5% plus risqué qu’un prêt avec de bonnes garanties, mais 5% moins cher, on dirait que beaucoup de gens prendraient ça pour la même chose qu’un steak +sélection+. Et en Allemagne, beaucoup de gens achèteraient ces steaks”, a-t-il ironisé.

Les banques allemandes ont en effet particulièrement touchées par la crise des subprimes.

Josef Ackermann s’est toutefois montré optimiste, affirmant que l’industrie bancaire “était plus solide que jamais” et qu’elle allait “absorber ce choc”.

Gary Perlin, directeur financier de Capital One, a cependant admis qu’il était aujourd’hui impossible d’évaluer le coût total de la crise, mais que les pertes déjà enregistrées seraient probablement multipliées en raison de la dévalorisation du portefeuille d’actifs immobiliers des banques.

 21/10/2007 22:25:33 – © 2007 AFP