[23/10/2007 15:02:29] BRUXELLES (AFP) L’Allemagne devra abroger la “loi Volkswagen”, qui protège depuis presque 50 ans le groupe automobile européen contre les tentatives de rachat hostiles, et d’autres “golden shares” en Europe pourraient être en sursis, suite à une décision mardi de la justice européenne. Cet arrêt de la Cour européenne de justice laisse le fabricant de voitures de sport Porsche libre de poursuivre sa montée au capital de Volkswagen, et conforte la Commission européenne dans son combat contre les “golden shares”, qui confèrent des droits particuliers aux autorités publiques dans des entreprises. La Cour a donné raison mardi à la Commission, et condamné l’Allemagne en arguant que “la Loi Volkswagen restreint la libre circulation des capitaux”. Les syndicats allemands ont exprimé leur inquiétude mardi après cette condamnation, une décision susceptible de réduire fortement leur influence au sein du groupe de Wolfsbourg (nord). “Il s’agit d’une mauvaise décision” privilégiant les “intérêts des marchés financiers avant ceux des salariés”, a estimé un porte-parole du syndicat IG Metall de Basse-Saxe, interrogé par l’AFP. La “loi Volkswagen” confère dans le conseil de surveillance une place prépondérante aux représentants des 324.000 salariés du groupe. Or, a expliqué mardi Jürgen Peters, premier secrétaire de IG Metall, “la cour européenne n’a pas déclaré contraire au droit européen” l’ensemble de la loi Volkswagen, mais “certaines dispositions” s’apparentant à une “golden share”. Le syndicat de la métallurgie, dont un représentant préside le comité d’entreprise de VW, demande donc que le gouvernement régional de Basse-Saxe, actionnaire à hauteur de 20% du constructeur, “fasse fortement pression sur le gouvernement fédéral pour qu’une nouvelle loi Volkswagen soit rédigée”. IG Metall veut notamment conserver le droit à statuer sur la fermeture d’une usine en Allemagne. La “loi Volkswagen”, adoptée en 1960 au moment de la privatisation du fabricant de la “Coccinelle”, protège le groupe contre un raid hostile, en verrouillant les droits de vote en faveur de l’Etat régional de Basse-Saxe. La Commission européenne avait lancé en mars 2003 une procédure d’infraction contre l’Allemagne, exigeant l’abrogation de ce dispositif qu’elle assimilait à une golden share. Les juges de Luxembourg ont aussi motivé leur arrêt de mardi par “l’influence substantielle” que la loi Volkswagen conférait aux pouvoirs publics. “Cette situation est susceptible de dissuader des investisseurs directs d’autres Etats membres”. Concrètement, aucun actionnaire de Volkswagen ne peut actuellement exercer plus de 20% des droits de vote, même si sa part du capital est supérieure, et toutes les décisions importantes doivent être validées en assemblée générale à une majorité de plus de 80% du capital représenté. Cela s’apparente à un droit de veto pour l’Etat régional de Basse-Saxe, actionnaire historique avec 20,3%.
La Basse-Saxe et l’Etat fédéral allemand peuvent en outre nommer chacun deux représentants au conseil de surveillance s’ils sont présents au capital. L’Etat fédéral n’a plus aujourd’hui d’actions VW, mais il lui suffirait d’en acheter une seule pour avoir son mot à dire. L’Allemagne a pris acte. Le gouvernement régional de Basse-Saxe a dit accepter la décision, tandis qu’à Berlin le ministère de la Justice a promis que la législation serait modifiée dans les prochains mois. Porsche, premier actionnaire de Volkswagen avec quelque 31% du capital mais jusqu’ici seulement 20% des droits de vote, a été le premier à se féliciter. Le groupe ne cache pas vouloir prendre le contrôle de Volkswagen, même s’il ne dit pas quand. La Commission s’est elle réjouie d’un arrêt “très utile pour les affaires futures”, selon un de ses porte-parole, Oliver Drewes. “Les règles sont plus claires en matière de droits spéciaux”, a-t-il jugé. “Les golden shares, les droits spécifiques sont sur le point de disparaître.” La Commission mène depuis plus de dix ans un combat contre les golden shares, qu’elle ne tolère que dans certains cas bien particuliers: elle a ainsi accepté celle de l’Etat français dans le futur ensemble GDF-Suez, car elle protège l’approvisionnement stratégique du pays. Elle a en revanche demandé en juin au Portugal de renoncer à ses droits spéciaux sur les groupes d’énergie Energias de Portugal et GALP Energia, et interrogé l’Allemagne sur le groupe gazier Ruhrgas. Bruxelles surveille aussi de près une série de législations protectionnistes. Elle a menacé récemment de renvoyer la Hongrie devant la justice européenne pour une loi visant à empêcher les achats de sociétés hongroises par des étrangers. Le texte a été surnommé “loi MOL”, car il permettrait de bloquer le rachat du groupe d’énergie hongrois MOL par le groupe pétrolier et gazier autrichien OMV. |
||||
|