La Chine, l’Inde et le Maroc font partie des pays où l’agriculture peut
atténuer les disparités entre les espaces urbains et les espaces ruraux
Le nouveau Rapport sur le développement dans le monde souligne la nécessité
vitale d’investir davantage dans l’agriculture des pays en mutation afin
d’assurer des conditions de vie décentes aux 600 millions de ruraux pauvres
de ces pays, dont la plupart se trouvent en Asie.
Intitulé «L’agriculture au service du développement », le rapport fait
valoir que l’objectif international de réduire de moitié d’ici 2015 la
proportion de la population vivant dans une extrême pauvreté et souffrant de
la faim ne sera pas atteint si le secteur agricole et le secteur rural
continuent d’être négligés et de recevoir des moyens insuffisants comme
c’est le cas depuis 20 ans.
«La proportion de la population pauvre des pays en mutation constituée par
des ruraux pauvres, soit 82 %,est extraordinairement élevée», déclare Robert
B. Zoellick, Président du Groupe de la Banque mondiale. «Nous devons nous préoccuper davantage de l’agriculture face aux pressions
démographiques, à la diminution de la superficie des exploitations, aux
pénuries d’eau, à la contamination de l’environnement, et au retard de
développement des zones de grande pauvreté auquel il faut s’attaquer».
Dans les économies en mutation telles que la Chine, l’Inde et le Maroc,
l’agriculture a contribué en moyenne pour 7 % à la croissance du PIB entre
1995 et 2003, alors que le secteur compte pour environ13 % dans l’économie
et emploie un peu plus de la moitié de la population active. Le rapport
recommande que, dans ces pays où 2,2 milliards de personnes vivent en zone
rurale, les priorités en matière d’agriculture soient axées sur la réduction
des disparités entre les revenus urbains et ruraux, et sur l’accroissement
des revenus de la population rurale pauvre.
Selon le Rapport sur le développement dans le monde, pour les populations
les plus pauvres, une augmentation du PIB déterminée contribue environ
quatre fois plus efficacement à faire reculer la pauvreté lorsque cette
augmentation vient de l’agriculture et non d’un autre secteur.
«En Asie de l’Est, la croissance agricole a permis de faire reculer
considérablement la pauvreté rurale au cours des 15 dernières années»,
explique François Bourguignon, Économiste en chef à la Banque mondiale et
Premier Vice-président, Économie du développement. «La difficulté est de
maintenir et de Rapport sur le développement dans le monde 2008 2renforcer le
pouvoir unique qu’a l’agriculture de faire reculer la pauvreté, en
particulier en Asie du Sud où le nombre de ruraux pauvres continue
d’augmenter et va rester probablement supérieur au nombre de citadins
pauvres pendant encore au moins 30 ans».
Le rapport note que l’agriculture peut apporter les moyens de sortir de la
pauvreté à des millions de ruraux démunis qui, sans elle, pourraient devenir
les laissés-pour-compte des économies en mutation. L’une de ces voies de
sortie passe par une révolution agricole au profit d’une agriculture à forte
valeur ajoutée.
Une réforme des prix et un remaniement des subventions aux céréales pourrait
encourager les cultivateurs à se lancer dans les marchés lucratifs de
l’horticulture, de l’aviculture, des poissons et des produits laitiers.
Pour sa part, la Banque mondiale, dont le volume des prêts à l’agriculture
et au développement rural avait diminué dans les années 80 et 90, est
résolue à augmenter son appui dans ces domaines. Les montants engagés durant
l’exercice 07 ont atteint 3,1 milliards de dollars, en hausse pour la
quatrième année consécutive.
Des constats précis
Selon le rapport, il est possible d’améliorer les conditions de vie des
agriculteurs de subsistance en augmentant la productivité des cultures de
base dans les régions à la traîne, à condition d’investir massivement dans
la gestion des sols et de l’eau et dans la recherche agricole. Le rapport
appelle également à améliorer le climat de l’investissement dans le secteur
agroalimentaire.
«Les économies en mutation rapide doivent passer de la révolution verte à
une nouvelle agriculture à forte valeur ajoutée, car la montée en flèche des
revenus urbains et la demande des villes en produits à forte valeur ajoutée
sont en train de devenir les moteurs de la croissance agricole et de la
réduction de la pauvreté», indique Alain de Janvry, qui a codirigé l’équipe
de rédaction du rapport. « Partout dans le monde, les pays doivent aplanir
les différences de traitement dans les échanges commerciaux, et les
associations de producteurs agricoles et les autres organisations locales
doivent être impliquées davantage dans la définition des politiques».
Par ailleurs, l’une des grandes priorités des économies en mutation doit
être de diminuer l’impact de l’agriculture intensive sur l’environnement,
notamment en ce qui concerne les produits chimiques agricoles et la
production de déchets animaux. Eu égard aux inquiétantes pénuries d’eau dans
les pays en mutation, le rapport préconise de réformer les institutions
chargées des questions d’irrigation et de supprimer les subventions aux
services d’eau et d’électricité.
Pour aider les plus démunis au sein de la population rurale pauvre, le
rapport recommande d’améliorer le climat de l’investissement afin de
favoriser les activités rurales non agricoles et les mécanismes d’emploi
dans les zones rurales. Des programmes d’emploi pourraient être mis en place
pour construire des routes rurales, planter des arbres dans les zones
dénudées, ou encore débourber les canaux et les étangs.
Le Rapport sur le développement dans le monde 2008 utilise une typologie de
pays fondée sur la contribution de l’agriculture à la croissance totale
entre 1990 et 2005, et sur le pourcentage de ruraux pauvres dans l’ensemble
de la population pauvre (niveau de 2 dollars de 2002 par jour). Dans les
pays à vocation agricole (essentiellement en Afrique), l’agriculture
représente une part importante (> 20%) de la croissance totale. Dans les
pays en mutation (essentiellement en Asie), les secteurs non agricoles sont
les principaux facteurs de la croissance mais les pauvres sont en grande
majorité des ruraux. Dans les pays urbanisés (essentiellement en Amérique
latine, en Europe et en Asie centrale), les pauvres vivent en majorité dans
les centres urbains, bien que les taux de pauvreté soient souvent plus
élevés en milieu rural
Le rapport et les documents associés seront
accessibles à l’adresse:
http://www.banquemondiale.org
(Source : Banque mondiale)
|