Nouvel environnement économique, nouveau rôle de l’Etat

Nouvel environnement économique, nouveau rôle de l’Etat

Par Hassen ZARGOUNI*

Dans l’environnement économique actuel, caractérisé par la globalisation et
dominé par la libéralisation des marchés, la compétition et l’innovation
deviennent les moteurs de la création de richesse, voire du progrès social.

Dans ce nouvel environnement, régi par la nécessité de l’équilibre des
différents intérêts très souvent divergents entre les acteurs qu’ils soient
publics ou privés, l’Etat devient médiateur, conciliateur, voire arbitre. Or
depuis l’Indépendance, l’Etat tunisien a été l’acteur central de la
construction économique du pays, il a été l’Etat entrepreneur, supplétif des
«faiblesses du marché» et promoteur des politiques industrielles.
Aujourd’hui, on assiste à une mutation en douceur du rôle de l’Etat en
matière économique, mutation imposée par la nouvelle donne économique tant
locale qu’internationale.

L’Etat se trouve dans la nécessité d’adopter le rôle de régulateur. Un
exemple de cette évolution consiste en la création de l’Instance nationale
des télécommunications, à l’instar de toutes hautes autorités de régulation,
l’INT est une instance indépendante, spécialisée, se fondant essentiellement
sur une expertise technique et où on retrouve toute la gamme des pouvoirs :
expertise, surveillance et exécution et dont la particularité est de ne pas
rendre de comptes à l’administration ou au gouvernement pour ses décisions
d’arbitrage ou de régulation, mais uniquement aux acteurs du secteur qu’elle
régit. Bientôt, la Tunisie sera dotée d’autres instances de régulation dans
des domaines aussi variés que l’énergie (suite à la libéralisation de la
production, de l’exploitation et de la distribution), mais aussi
l’audiovisuel qui connaît actuellement en Tunisie une ouverture réussie au
secteur privé.

Une économie libérale implique une administration forte
Plus une économie est libérale, plus elle a besoin d’un Etat fort, fort par
les compétences de son administration et son élite, fort par la qualité de
la prestation de ses institutions, et enfin fort par la qualité des
relations qu’il entretient avec le secteur privé.

L’administration est de fait mise au défit de la mise à niveau de ses
ressources humaines par la formation, l’introduction massive des nouvelles
technologies de l’information et de la communication et la maîtrise vitale
des langues étrangères. A ce niveau, il est indéniable que des progrès
immenses ont été déjà réalisés et continuent à l’être dans tous ces
domaines. Reste que l’administration, en tant que structure d’arbitrage, de
régulation et d’orientation stratégique de l’économie nationale et de par
son rôle de maître d’ouvrage de projets d’envergure (infrastructures,
économie de la santé, …), se trouve aujourd’hui confrontée au défi du
renforcement institutionnel, de la gouvernance, et l’impératif d’attrait des
ressources humaines qualifiées. Le challenge pour l’administration consiste
à se hisser au niveau des enjeux de la compétitivité de la Tunisie en tant
que site d’accueil d’investissements étrangers, mais aussi de garant d’un
environnement conforme aux standards internationaux pour l’économie locale.
Nos chancelleries constituent à ce propos les fers de lance de la stratégie
de renforcement de l’image de marque d’un pays qui fonctionne (‘’Tunisia is
a country that works’’, comme l’a dit Son Excellence l’ambassadeur de
Grande-Bretagne à Tunis, M. Stefan Day).

Afin de renforcer les missions de l’administration, le PPP (Partenariat
public-privé) a toutes les chances de réussir tant les jeunes entreprises
tunisiennes du secteur des services, notamment, ont besoin de «se faire des
dents» à travers des projets lancés par l’administration. Celle-ci,
totalement décomplexée de sa relation avec le privé, ouvrira la voie à des
dizaines de sociétés innovantes restées aujourd’hui au starting bolcks faute
de commandes en partenariat avec les différents offices ou agences
représentant l’administration. Par ailleurs, l’administration en renonçant à
son sacro-saint «moins-disant» pour l’attribution des marchés publics,
notamment dans le secteur de la nouvelle économie (l’informatique, les
télécoms, …), et en adoptant des formules plus adaptées à chaque réalité de
marché, l’efficience économique (qualité, délais, résultats…) pourrait être
obtenue plus sûrement pour les grands projets notamment.

En conclusion, le nouveau positionnement de l’Etat, passant de l’acteur
économique agissant à la régulation et la médiation, suppose l’attrait accru
des ressources humaines à haut potentiel au sein de l’administration et le
raffermissement du partenariat public privé. Car, à la modernité sociale
dont fait preuve notre pays, une modernité économique constitue un excellent
message à véhiculer aux investisseurs mondiaux, mais aussi un gage de
confiance aux acteurs privés locaux pour stimuler leurs investissements.

* Economiste Statisticien

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