Allemagne : le SPD met en péril la privatisation de Deutsche Bahn

 
 
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Un train de la Deutsche Bahn, à Francfort, le 25 octobre 2007 (Photo : Thomas Lohnes)

[29/10/2007 15:09:25] BERLIN (AFP) En exigeant la création d’un actionnariat populaire pour l’ouverture du capital des chemins de fer allemands, les sociaux-démocrates repoussent aux calendes grecques la privatisation du dernier grand monopole public d’Allemagne.

Réuni le week-end dernier en congrès à Hambourg, le SPD a décidé qu’il n’approuverait l’ouverture du capital de la Deutsche Bahn que si 25,1% des titres étaient des “actions populaires”, sans droit de vote, réservées aux particuliers.

Les sociaux-démocrates, associés aux conservateurs au sein de la “grande coalition” d’Angela Merkel, veulent éviter que “de grands investisseurs financiers ne prennent trop d’influence sur les chemins de fer”, explique à l’AFP Franz-Josef Leven, du DAI, lobby des milieux financiers allemands.

Wolfgang Tiefensee, ministre des Transports, est lundi l’un des derniers à croire que “nous pourrons émettre des actions comme prévu fin 2008, début 2009.”

Peu de chances pourtant que le camp conservateur arrive à s’entendre avec le SPD sur l’actionnariat populaire, “dernier clou dans le cercueil de la privatisation”, critique le numéro deux du groupe parlementaire CDU/CSU, Hans-Peter Friedrich, dans le Handelsblatt à paraître mardi.

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Le ministre allemand des Transports, Wolfgang Tiefensee, au Bundestag, à Berlin le 21 septembre 2007 (Photo : Michael Kappeler)

Les conservateurs remarquent que ces actions “populaires” doivent s’accompagner de la garantie de dividendes généreux, en contrepartie de l’absence de droit de vote. Ce qui pèserait financièrement sur Deutsche Bahn, alors que l’ouverture du capital vise au contraire à lui apporter de l’argent frais.

L’Allemagne a privatisé tous ses grands monopoles publics, en finissant par ses postes et télécommunications à partir du milieu des années 1990. Tous, sauf le rail, dont le sort fait l’objet de débats houleux depuis la fusion des chemins de fer des anciennes RFA et RDA.

La grande coalition vient d’accoucher dans la douleur d’un projet de loi sur la privatisation. Mais le texte, assurant que l’Etat fédéral restera actionnaire majoritaire, est bloqué par les Etats régionaux, qui craignent pour les petites gares et liaisons locales.

La chancelière Angela Merkel se demande désormais “ce qu’il est encore possible de faire avec le SPD.” Son porte-parole Ulrich Wilhelm a reconnu lundi, dans un euphémisme, que les “discussions allaient être difficiles.”

Le camp social-démocrate lui-même est partagé. Le ministre des Finances et vice-président du SPD Peer Steinbrück s’inquiète ouvertement lundi: “La Bahn ne sera pas prête à être introduite sur le marché aussi vite que ce qui était prévu et ce qui aurait été bon” pour elle.

Pour l’association d’usagers Pro Bahn, opposée au projet de privatisation, le SPD “essaie de sauver à la dernière minute un mauvais projet de loi”, indique à l’AFP Joachim Kemnitz, porte-parole.

Pour le syndicat Transnet, au contraire favorable à une privatisation partielle, l’actionnariat populaire est “une lourde erreur.”

Les plus remontés contre l’actionnariat populaire sont les organisations de défense des petits actionnaires, qui s’indignent de l’émission de titres sans droit de vote: “Les Allemands ont le droit de donner leur argent, mais aussi celui de la fermer”, s’énerve l’association DSW.

L’actionnariat populaire est “un concept mal défini, utilisé comme slogan politique”, critique M. Leven, du DAI. “Il aurait été plus honnête d’émettre des obligations”, des titres de dette de Deutsche Bahn, plus sûrs que des actions.

Pour nombre d’épargnants allemands, le concept de “Volksaktie” éveille de mauvais souvenirs. Le terme avait été utilisé lors de la privatisation de Deutsche Telekom pour encourager les Allemands, adeptes de placements de bon père de famille comme l’assurance-vie, à s’aventurer en Bourse.

Mais l’action du groupe de télécommunications avait dégringolé, à quelque 14 euros aujourd’hui, contre plus de 100 euros début 2000.

 29/10/2007 15:09:25 – © 2007 AFP