[14/11/2007 10:20:05] HARARE (AFP) Le Zimbabwe se souvient avec amertume de son “vendredi noir”, le 14 novembre 1997, quand une annonce gouvernementale avait déclenché la panique sur les marchés des changes, un épisode précurseur de l’effondrement économique du pays. Sous la pression de la rue, le président Robert Mugabe avait annoncé qu’il allait verser une prime à 50.000 anciens combattants de la guerre de libération menée dans les années 70 contre le régime blanc. Mais en l’absence de budget pour financer les 50.000 dollars zimbabwéens (à l’époque 1.315 USD) attribués à chacun d’eux, la Banque centrale avait dû se défaire de ses devises étrangères et s’était retrouvée sans ressources pour défendre sa monnaie. Les investisseurs s’étaient alors rués sur les dollars américains: le dollar zimbabwéen avait chuté de 71,5% et la Bourse de 46%. “Je me souviens des gens qui pleuraient ce jour-là”, raconte Emmanuel Munyuki, directeur de la Bourse (ZSE). “25 à 30% de nos investisseurs étaient étrangers et quand ils ont commencé à se défaire de leurs parts, nos titres ont pris un sérieux coup.” Plusieurs analystes estiment que le 14 novembre 1997 a marqué le début d’une série de mesures gouvernementales, qui ont défié les lois de l’économie pour des objectifs politiques à court terme. “Depuis 10 ans, nous n’avons pas arrêté de faire des choses incohérentes sur le plan économique”, juge Eric Bloch, un économiste. “La question n’était pas de savoir si les vétérans méritaient ou non une compensation. La mesure était au-dessus des moyens du pays.” Selon des statistiques du groupe financier Kingdom Financial Holdings, les réserves de devises étrangères de la Banque centrale sont tombées de 760 millions de USD en janvier 1997 à un plus bas historique pour l’époque de 255 millions en novembre 1997. Ensuite, l’économie du Zimbabwe n’a cessé de s’enfoncer. L’inflation bat aujourd’hui des records mondiaux à près de 8.000%, les quatre cinquièmes de la population sont sans emploi et les étagères des magasins sont désespérément vides. La situation a été aggravée par une autre revendication des anciens combattants: la redistribution des terres, alors très largement aux mains de la minorité blanche. En novembre 1997, après l’invasion d’une exploitation d’un fermier blanc par un groupe d’anciens combattants, le gouvernement avait publié une liste des fermes qui seraient réquisitionnées. “La première liste de 1.471 fermes, établie en novembre 1997, nous a beaucoup marqués”, rappelle Trevor Gifford, vice-président du Syndicat des fermiers commerciaux. Les fermiers avaient introduit un recours en justice contre le montant des compensations. Mais, alors que la procédure suivait son cours, le gouvernement a lancé en 2000 une réforme agraire controversée, ordonnant l’expropriation d’une majorité des terres. Sur les 4.500 fermiers blancs de 1997, il n’en reste qu’environ 400. La plupart de leurs exploitations, redistribuées à des proches du régime ou à de petits paysans sans qualification, ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes et la production agricole du pays s’est effondrée. Pour Bloch, la réforme agraire a été conduite “dans un mépris total des fondamentaux de l’économie”. Le pire, selon l’économiste Witness Chinyama, c’est que le gouvernement n’a pas tiré la leçon de ses erreurs. “Le gouvernement va continuer à prendre des décisions dans un esprit combatif”, prévoit-il. Et de citer un exemple: “Il va continuer à imprimer des billets bien que ce soit inflationniste.” |
||
|