Afrique du Sud : des milliers de mineurs en grève pour leur sécurité

 
 
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Des mineurs sud-africains après un accident dans le nord-ouest du pays, le 4 octobre 2007 (Photo : Gianluigi Guercia)

[04/12/2007 16:59:54] JOHANNESBURG (AFP) Des centaines de milliers de mineurs ont fait grève mardi en Afrique du Sud pour demander de meilleures conditions de sécurité dans les mines du pays, où 202 ouvriers sont morts depuis janvier.

Cette première grève nationale des mineurs depuis vingt ans a été très suivie selon le patronat, qui a dû arrêter la production sur certains sites.

Le premier groupe minier du pays, AngloGold, a rapporté qu’une “large majorité” de ses ouvriers étaient restés chez eux. Environ 67% des salariés de Goldfields et plus des deux tiers d’Implats, qui produit du platine, ont fait de même.

“La grève aura un impact significatif sur notre production”, a déclaré Amelia Soares, porte-parole du groupe Harmony Gold, sans pouvoir évaluer les pertes de l’entreprise.

Lancée à l’appel du Syndicat national des mineurs (NUM) qui revendique 240.000 membres, la grève a été relayée par des manifestations dans plusieurs villes.

“Nous sommes ici pour rappeler que nous mourons en sous-sol”, a lancé Frans Baleni, secrétaire général du NUM, devant un millier de manifestants dans le centre de Johannesburg. “Nous sommes écoeurés et fatigués de voir tant de blessés.”

Dans la foule, le ton était dur envers les capitaines de l’industrie minière, accusés de privilégier leurs profits aux dépens de la sécurité des salariés. “Le sang ruisselle et les profits sont le luxe des patrons”, accusaient les pancartes.

“Nous risquons la mort dans les mines, mais n’avons rien”, a dit Thembisile Marrent, 26 ans, ouvrier d’une mine d’or à Kloof (province du Mpumalanga, nord).

Les mineurs ne reçoivent en effet que des salaires modiques, de 2.500 rands (250 euros) en moyenne par mois, a rappelé Frans Baleni. Selon lui, ils “prennent des risques parce qu’ils essaient de gagner des primes de production.”

Pour Toko Molale, 35 ans, mineur et fils de mineur, l’industrie a néanmoins fait des progrès par rapport à l’époque de l’apartheid, le régime raciste tombé en 1994. “A l’époque, ils mettaient les gens dans les mines quel que soit le niveau de danger. Aujourd’hui, ça a changé, mais ils poussent toujours plus la production que la sécurité.”

L’Afrique du Sud est un gros producteur d’or, de platine, de charbon et de diamants. Les 700 mines du pays ont généré 550 milliards de rands (environ 55 milliards d’euros) en 2006.

La Chambre des mines a reconnu que le taux de mortalité y était supérieur de 50% à celui des Etats-Unis, de l’Australie et du Canada. Mais elle nie toute négligence.

“Nous faisons tout ce que nous pouvons”, a assuré récemment son porte-parole, Jabu Maphalala, soulignant que les mines sud-africaines sont parmi les plus profondes au monde et donc plus dangereuses par nature.

“Nous avons établi et mis en place une liste globale de normes de sécurité”, a renchéri Pranill Ramchanger, porte-parole d’AngloGold. “Nous travaillons avec toutes les parties pour nous assurer que ceux qui travaillent pour nous comprennent ces normes”.

Des représentants du NUM ont déposé à la Chambre une liste de revendications, également adressée au gouvernement. Ils veulent que l’industrie investisse dans du matériel pour prévoir les éboulements, dans la formation des salariés et dans la maintenance des puits.

Ils réclament aussi des poursuites contre les PDG des groupes, en cas d’accident. “Depuis 2000, aucun employeur n’a été inculpé pour négligence”, dénoncent-ils dans leur mémorandum.

Si les compagnies minières ne répondent pas favorablement, le NUM n’exclut pas “de nouvelles actions” après les fêtes.

 04/12/2007 16:59:54 – © 2007 AFP