[12/12/2007 18:51:00] WASHINGTON (AFP) Les grandes banques centrales mondiales ont créé la surprise mercredi en annonçant une action concertée, la première de cette ampleur depuis le 11 septembre, pour tenter d’enrayer la crise de confiance sur les marchés financiers. Les Bourses mondiales qui étaient orientées à la baisse mercredi, déçues par la Réserve fédérale américaine (Fed), ont retrouvé le moral en fin de journée, après cette injection concertée de liquidités par plusieurs banques centrales. Ces Bourses se reprenaient nettement mercredi, les places européennes ayant clôturé en hausse tandis que l’indice Dow Jones gagnait 1,04% vers 16H45 GMT à New York. “Aujourd’hui, la Banque du Canada, la Banque d’Angleterre, la Banque centrale européenne, la Réserve fédérale et la Banque nationale suisse annoncent des mesures visant à soulager les pressions élevées sur les marchés du crédit à court terme”, a indiqué la banque centrale américaine (Fed). Chaque institut d’émission utilisera des outils différents pour tenter d’augmenter les liquidités que réclament désespérément les banques commerciales, étranglées par la crise des “subprimes”. La Fed par exemple va proposer aux banques 40 milliards de dollars par le biais d’un nouveau système d’enchères. La BCE mènera des adjudications en dollars aux mêmes dates. Parallèlement, la Banque d’Angleterre va proposer à ses banques 11,35 milliards de livres sterling. Les analystes soulignaient mercredi la rareté de ce type d’action commune, manifestement conçue pour jouer les électro-chocs puisque son annonce a été planifiée pour faire réagir les bourses. “C’est une action concertée, ce qui a toujours de l’allure”, note Julian Jessop de Capital Economics. La dernière grande action concertée remonte à l’après-11 Septembre, lorsque la Fed, la BCE et la Banque du Canada avaient simultanément baissé leur taux d’un demi-point pour calmer la panique sur les marchés. M. Jessop souligne aussi l’aspect frappant parce que “symbolique” de l’accord de “swap” prévu par l’action commune, qui devrait permettre à la Fed de fournir jusqu’à 24 milliards de dollars à la BCE et à la Banque nationale suisse. Ces annonces interviennent au lendemain d’une baisse des taux de la Fed qui a provoqué une chute des marchés, où les investisseurs espéraient des mesures plus énergiques. Un responsable de la Fed a toutefois affirmé mercredi que la chute des marchés n’avait “rien à voir avec l’annonce d’aujourd’hui”. Le plan était en préparation depuis septembre. Mais la chute des Bourses a mis en lumière l’extrême nervosité des marchés et les difficultés de la banque centrale à les rassurer en employant les outils actuellement à sa disposition. La baisse du taux directeur ne suffit pas, les banques renâclent à emprunter au taux d’escompte (un taux d’urgence) alors même qu’il a été assoupli, et la Fed ne cesse d’injecter des liquidités sans réussir à rassurer les marchés. “Ces mesures d’urgence s’apparentent à un effort désespéré d’injecter des liquidités pour aider le système financier mondial à passer la fin de l’année en limitant les dommages liés à la crise de confiance” qui touche les marchés du crédit, affirment les analystes de Global Equities. “Elles traduisent sans doute une situation plus tendue encore en terme de liquidité bancaire que ce que l’on pouvait percevoir, ce qui n’est pas particulièrement rassurant alors que la croissance mondiale est en train de ralentir, en particulier aux Etats-Unis”, selon eux. Il n’est pas sûr que ces mesures suffisent à ramener la confiance, les racines du mal allant beaucoup plus loin – que ce soit les pratiques de prêt peu regardantes, l’opacité sur le portefeuille détenu par les banques ou l’aveuglement des investisseurs devant la montée des risques. Mais “ces mesures, efficaces en elles-mêmes, sont importantes du fait qu’elles sont une réponse coordonnée. Cela va encourager une réponse positive sur les marchés”, estime Stephen Gallagher de la Société Générale. Mardi, la Fed n’avait réduit que d’un quart de point, à 4,75%, son taux d’escompte, alors que les marchés s’attendaient à une baisse d’un demi-point. Après cette décision, Wall Street avait donné le ton à un mouvement baissier sur quasiment l’ensemble des bourses mondiales: le Dow Jones avait perdu 2,14%, le Nasdaq 2,45% et le SP 500 2,53%. Mercredi matin les bourses asiatiques accusaient le coup. Tokyo, deuxième place financière mondiale, reculait de 0,70%, après avoir plongé de 2,15% dans le courant de la séance. Hong Kong, déçue par une baisse des taux similaire, annoncée par l’Autorité monétaire locale, abandonnait 2,41%, Shanghai 1,54%, Taïpeh 1,71%, Manille 1,82%, Kuala Lumpur 0,98% et la Bourse australienne 1%. Les places européennes ont entamé leur séance dans le rouge, baissant en moyenne d’environ 1%. Mais à 14H00 GMT les banques centrales américaine, européenne, britannique, suisse et canadienne ont engagé une action concertée prévoyant notamment de proposer des liquidités aux banques par le biais d’enchères. Tout s’est joué en l’espace de quelques minutes et les indices boursiers sont alors repartis à la hausse. Vers 17H00 GMT la Bourse de New York regagnait une partie du terrain perdu la veille, le Dow Jones gagnant 1,09% et le Nasdaq 1,69%. En Europe la tendance a été similaire. Francfort a donné le ton du mouvement de hausse, l’indice Dax s’appréciant de 0,83%. Plus modestement Londres a clôturé en hausse de 0,35% et Paris de 0,32%. L’indice européen Eurostoxx 50 qui comprend les meilleures valeurs de la zone euro a gagné 0,44%. Les places européennes plus petites ont clôturé selon les cas en légère hausse, ou en très légère baisse. Les investisseurs “ont retrouvé le sourire après une action supplémentaire” de la Fed, selon les analystes américains de Briefing.com. Ces actions de la Fed “vont permettre de desserrer les conditions d’octroi du crédit et relancer les investissements”, a commenté Peter Cardillo (Avalon Partners). Les marchés financiers font face à un tarissement des liquidités depuis cet été en raison des lourdes pertes des banques dues à leur exposition à la crise des crédits immobiliers à risque (“subprime”) aux Etats-Unis. Devenues méfiantes entre elles, elles ont durci les conditions d’emprunt et rechignent à se prêter de l’argent. “Ce sont les rachats de découvert qui ont provoqué ce mouvement de la Bourse, dans un marché où les carnets étaient dégarnis, avec des investisseurs qui avaient pris des positions vendeuses”, a expliqué à l’AFP un vendeur d’actions parisien. “L’action concertée des banques centrales ne règle pas tous les problèmes. C’est une ébauche de solution dont on verra plus tard ce qu’elle coûte. Sans doute aurons-nous d’autres mauvaises surprises concernant la crise du crédit”, a estimé le courtier. “Cette décision montre au moins qu’il y a une volonté des banques centrales d’intervenir. Cela a été suffisant pour aujourd’hui”, a-t-il conclu. |
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