[13/12/2007 18:29:25] PARIS (AFP) En agissant de concert, les banques centrales veulent envoyer un message rassurant aux investisseurs et redonner confiance au marché du crédit, mais sont contraintes à la prudence en raison de la flambée inflationniste en Europe et aux Etats-Unis. L’intervention concertée de cinq banques centrales menée mercredi “est extrêmement rare. Il faut remonter au 11 septembre 2001 ou aux accords du Louvre et du Plaza”, en 1987 et 1985, pour retrouver l’équivalent, constatent les analystes de la banque UBS. Il faut dire que cette action coordonnée répond à une “situation complètement exceptionnelle”, précise Olivier Gasnier, économiste de la Société Générale. Les Etats-Unis, ébranlés par l’éclatement de leur bulle immobilière, font face à un sévère ralentissement économique qui pourrait dégénérer en récession. Lors des précédentes crises financières, les banques centrales avaient la possibilité de baisser fortement et radicalement leurs taux pour donner de l’air à l’économie, comme l’a fait la Réserve fédérale (Fed) dans la foulée de l’éclatement de la crise internet et du 11-Septembre. Mais aujourd’hui, le rebond de l’inflation aux Etats-Unis (3,5% sur un an en octobre) et dans la zone euro (+3% sur un an en novembre) rend une telle option périlleuse. La Fed a ainsi déçu les marchés en ne baissant son principal taux directeur que d’un quart de point de pourcentage à 4,25% mardi, au lieu des 50 points espérés. Parallèlement, la situation sur le marché du crédit continue à s’aggraver depuis le début de la crise financière en juillet : les taux d’emprunt interbancaires Euribor à trois mois se situaient jeudi à 4,95% environ, alors qu’ils devraient normalement osciller autour de 4,20 à 4,25%. Ce qui témoigne des craintes persistantes des investisseurs sur l’exposition des banques aux prêts immobiliers à risque américains, d’autant plus qu’ils attendent une nouvelle salve de résultats de banques américaines. Lehman Brothers a toutefois ouvert le bal sur des résultats record. Pour calmer les marchés et tenter d’enrayer les risques de récession, cinq grandes banques centrales (la Fed, la Banque centrale européenne, la Banque d’Angleterre, la Banque nationale de Suisse et la banque centrale canadienne) ont donc décidé d’injecter quelques 80 milliards de dollars de plus sur le circuit monétaire, un montant plutôt inférieur aux interventions précédentes. Elles ont également eu recours à des solutions innovantes. Un accord de “swap” entre la Fed, la BCE et la Banque nationale suisse va ainsi permettre à ces deux dernières d’octroyer des crédits directement en dollars. Les banques vont aussi pouvoir se financer auprès de la Fed à des taux préférentiels. “Jusqu’alors, pour une grande banque, se refinancer à l’escompte était cher et ne garantissait pas la confidentialité, ce qui risquait de déclencher des mouvements de panique” sur leur action, remarque Olivier Gasnier. D’après Stéphane Déo, d’UBS, “les banques ont donc voulu montrer qu’elles étaient déterminées à agir si la situation se détériore”, et qu’elles seraient prêtes à mettre beaucoup plus d’argent sur les marchés si nécessaire : 100 milliards, 1.000 milliards de dollars. Les marchés restaient pourtant moroses jeudi : à la mi-séance, le Dow Jones cédait 0,47%, et le Nasdaq 0,85%, annulant leurs gains de la veille. En Europe, Francfort a perdu près de 2%, Londres et Paris près de 3%, tandis qu’en Asie, Hong Kong a chuté de 2,7% et Tokyo de 2%. Pour Eric Vergnaud, de BNP-Paribas, les banques centrales ont fait un “geste très fort qui va contribuer à atténuer tensions sur le marché obligataire”, mais elles ne peuvent que limiter les conséquences de la crise. “Ce n’est pas elles qui peuvent dire où se trouvent les prochaines pertes qui seront annoncées”, conclut-il. |
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