[19/12/2007 09:40:47] PARIS (AFP) Alors que la crise des subprimes s’étend et fait peser le risque d’une récession sur les économies des pays développés, l’inflation s’accélère à cause des prix du pétrole et de l’alimentation, faisant craindre un dangereux scénario de stagflation. “Nous avons une accumulation inopportune de tous les chocs”, constate Gilles Moëc, économiste de Bank of America, interrogé par l’AFP. L’ex-président de la Réserve fédérale (Fed), Alan Greenspan, a lui jugé dimanche que la probabilité d’une récession avait “augmenté pour se trouver autour de 50%”. “Nous commençons à voir, non pas la stagflation, mais ses premiers symptômes”, a-t-il ajouté. L’OCDE a revu à la baisse début décembre sa prévision de croissance pour les Etats-Unis à 2% contre 2,5% en mai. Pour la zone euro, elle table sur une croissance de 1,9%, contre 2,3% dans ses prévisions de mai. Parallèlement, l’inflation ressurgit à cause d’un bond des prix de l’alimentation et du pétrole, sous l’effet de la demande des grands pays émergents et de la spéculation. La hausse des prix est de l’ordre de 3% sur un an aux Etats-Unis et dans la zone euro, un niveau plus observé depuis le printemps 2001, souligne Gilles Moëc, et très au-dessus des 2% que se fixe la Banque centrale européenne (BCE) pour objectif supérieur et qu’est prête à tolérer la Fed. Ce cocktail explosif de ralentissement économique et d’inflation fait craindre à certains économistes le retour de la “stagflation”, honnie des banquiers centraux car l’inflation les empêche de lutter contre le risque de récession en baissant autant qu’ils le souhaiteraient les taux d’intérêt. “On a une crise grave”, avec un “ralentissement de la croissance et une accélération de l’inflation”, concède Christian de Boissieu, président du Conseil d’analyse économique (CAE).
Mais il relativise: “la stagflation faisait référence aux années 70”, aux chocs pétroliers de 1973 et 1979, quand “on avait des taux d’inflation à deux chiffres à certains moments et une croissance très faible”. Pour Gilles Moëc, la stagflation est le moment “où le système commence à produire de l’inflation”, alors qu’actuellement la poussée des prix est due à des facteurs “exogènes” et “transitoires” comme les prix du pétrole et des denrées alimentaires. Optimiste, M. de Boissieu table sur un ralentissement de l’économie américaine sans récession, et un tassement de la croissance mondiale, qui resterait “forte”. M. Moëc admet cependant que l’économie traverse “un cap difficile”. Les banques centrales sont “obligées d’innover”, avec une BCE “très dure dans sa communication mais qui a renoncé à remonter ses taux pour le moment”. Si la poussée d’inflation ne perdure pas au-delà du printemps, il s’attend à une normalisation du marché du crédit et estime que l’économie mondiale devrait éviter la récession. A l’inverse, Jacopo Cimadomo, économiste au Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii), pense qu’une récession est une “possibilité concrète”. “Une récession, c’est deux trimestres de croissance négative consécutifs, cela fait partie du cycle économique. On a eu une récession en 2001 (…). On peut en avoir une en 2008 aux Etats-Unis et en Europe en 2009”, poursuit-il. Il rejette cependant la comparaison avec la crise de 1929 évoquée dimanche par Jacques Attali, président de la Commission pour la libération de la croissance en France. “Le problème principal de la crise de 29 c’est que les taux d’intérêt avaient beaucoup augmenté. Ce n’est pas le cas aujourd’hui”, souligne-t-il. Un avis partagé par la ministre française de l’Economie Christine Lagarde, qui a estimé que M. Attali faisait “une grosse erreur de diagnostic”. |
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