L’Allemagne souffre de ses inégalités et se veut plus juste en 2008

 
 
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Le PDG de Porsche Wendelin Wiedeking, le 11 septembre 2007 au salon de l’automobile de Francfort (Allemagne) (Photo : John MacDougall)

[28/12/2007 10:14:57] BERLIN (AFP) Les uns gagnent des millions, les autres ont peine à subsister: aux yeux des Allemands les inégalités se creusent dans leur pays, et beaucoup sont décidés à ce que cela change en 2008.

Dans les dernières semaines de l’année, une série d’événements et de statistiques sont venus confirmer l’impression d’une érosion de la classe moyenne allemand au profit d’une société à deux vitesses. Elle a renforcé la détermination de beaucoup, syndicats en tête, à se battre pour une répartition plus juste.

Le patron de Porsche s’est partagé avec ses cinq collègues du comité de direction 113 millions d’euros de rémunération, conduisant plusieurs personnalités politiques dont le président de la République Horst Köhler à appeler au “sens de la mesure”. Au même moment, une étude montrait que les revenus de leur travail suffisaient de moins en moins à assurer à la majorité des Allemands un niveau de vie décent.

Plusieurs morts d’enfants maltraités ou abandonnés sont venus servir de toile de fond à la discussion sur les salaires, mettant en avant le problème de la pauvreté matérielle et morale de certaines familles, et les risques encourus par les enfants.

“Actuellement 3 millions d’enfants vivent dans la pauvreté”, soit deux fois plus qu’il y a trois ans, a rappelé la veille de Noël dans un entretien à la radio le porte-parole du comité de lutte contre la pauvreté, Wolfgang Gern. C’est-à-dire que leur foyer dispose de moins de 60% du revenu moyen des foyers allemands.

Pourtant depuis 2006 la croissance économique de l’Allemagne est repartie, le chômage baisse mois après mois, le pays compte actuellement quelque 700.000 de chômeurs de moins qu’à la fin de l’année dernière.

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Des Allemands manifestent devant la porte de Brandebourg à Berlin pour dire “Stop à la pauvreté !”, le 13 octobre 2007 (Photo : Marcus Brandt)

“Le nombre de personnes ayant un emploi est à son plus haut en Allemagne”, s’est félicitée la chancelière Angela Merkel dans ses interviews de fin d’année. “Cela veut dire que plus de familles profitent (de la croissance)”, a-t-elle déclaré.

Mais justement, la plupart des Allemands n’ont pas l’impression d’en profiter: pour 85% d’entre eux, la répartition des richesses dans le pays n’est pas juste, selon une étude de la fondation Bertelsmann publiée en décembre.

En Allemagne se creuse un “fossé de l’égalité”, titrait récemment l’influent hebdomadaire Der Spiegel. Et l’aggravation des inégalités n’est pas seulement de l’ordre du ressenti, l’écart grandit réellement entre les revenus des plus riches — qui ont crû de 31% ces quinze dernières années — et ceux des plus pauvres, qui ont chuté de 13% sur la même période, selon des chiffres de l’institut de recherche DIW.

Dans certains secteurs de l’économie, par exemple chez les coiffeurs, des salaires horaires inférieurs à 5 euros ne sont pas rares. Environ 1,7 million de personnes travaillent, et complètent un salaire de misère avec l’aide sociale. Et 17 ans après la Réunification, dans quasiment toutes les branches, le travail est moins payé à l’est.

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Une femme attend un repas distribué gratuitement par l’association “L’Arche”, le 26 septembre 2007 à Berlin (Photo : John MacDougall)

Dans un pays où il n’y a pas de plancher aux rémunérations, les sociaux-démocrates du SPD ont décidé de faire de l’instauration d’un salaire minimum leur cheval de bataille l’an prochain.

Les syndicats aussi s’affichent combatifs. Après plusieurs années de retenue, et sur fond de hausses des prix, ils veulent que leurs membres profitent de la croissance.

Parmi les premiers à négocier leur convention collective, les 100.000 salariés du secteur de l’acier vont réclamer en janvier des hausses de salaires de 8% parce que “les bilans sont bons, les carnets de commandes pleins et les profits coulent à flots”, selon le syndicat IG Metall.

Les employés du service public veulent aussi 8%, ceux du textile 5,5%. Les autres branches devraient aussi faire preuve d’appétit.

Ces revendications qui font grincer des dents le patronat alors que la croissance s’essouffle. Pour la fédération du patronat BDI, les revendications d’IG Metall sont “dures à avaler”. Ce qui laisse présager un hiver agité en Allemagne.

 28/12/2007 10:14:57 – © 2007 AFP