[01/01/2008 22:48:08] NAIROBI (AFP) Les émeutes qui secouent le Kenya depuis les élections générales du 27 décembre risquent d’affecter durablement l’économie d’un pays qui connaissait jusque lors une forte croissance et de toucher toute la population, des habitants des bidonvilles aux chefs d’entreprises. Généralement considéré comme un pays stable politiquement et ouvert aux investisseurs étrangers, le Kenya affiche un taux de croissance passé de 3% en 2003 à 6,1% en 2006 et le gouvernement table sur une croissance de 6,5% en 2007, selon le Centre kényan des statistiques. Les sanglantes émeutes qui ont fait plus de trois cents morts depuis les élections générales controversées du 27 décembre ont plongé le pays dans une crise majeure, dont les effets se font déjà sentir sur l’économie nationale. A Kibera, le plus grand bidonville de Nairobi, ces conséquences ont été immédiates. “Il n’y a plus d’eau et d’électricité depuis une semaine, maintenant il n’y a plus rien à manger”, témoigne, Rose, 24 ans, mère de deux enfants. Non loin de sa bicoque, le marché Toi a été totalement dévasté par les émeutiers. “Il y avait 3.000 commerçants ici, et 3.000 autres personnes employées sur le marché. Si vous comptez leurs familles et les clients, 200.000 personnes dépendaient de cet endroit”, explique le président de l’association des commerçants du marché, Ezechiel Rema. Des millions de shillings (la devise kényane) de nourriture ou de vêtements sont partis en fumée dimanche soir lorsque des émeutiers ont incendié les échoppes appartenant à des membres de l’ethnie kikuyu, dont est issu le président Mwai Kibaki. Avec les successions de jours fériés et les troubles électoraux, toute l’économie du pays est à l’arrêt depuis une semaine. Les pénuries de carburant commencent à toucher le Kenya, mais aussi des pays voisins comme l’Ouganda. La plupart des importations des pays de la région des Grands lacs africains transite par le port kényan de Mombasa, lui aussi paralysé. Face à cette crise, les milieux d’affaires kényans ne cachent pas leur inquiétude. “De telles violences n’augurent rien de bon pour les affaires, car elles induisent des coûts supplémentaires et découragent les investissements”, relevait lors d’une récente conférence de presse la présidente de l’association kényane des entreprises, Betty Maina. “Ce qui est sûr, c’est que la réputation du Kenya a été écornée (…) Mais il est encore trop tôt pour mesurer l’impact (de la crise). Nous verrons comment les marchés réagiront” mercredi à la réouverture de la bourse de Nairobi, relève un banquier étranger établi au Kenya. Selon l’analyste en chef de Standard Chartered Afrique, Razia Khan, le shilling et les valeurs kényanes pourraient connaître un coup de frein brutal si la violence ne diminue pas et qu’un compromis politique n’est pas trouvé. “Bien que les performances économiques (du Kenya) aient été bonnes, l’électorat a toujours montré sa préférence pour un changement, et peut-être une impatience sur la lutte contre la corruption”, juge l’analyste. La crise menace aussi directement le secteur du tourisme, en pleine expansion. Les revenus de ce secteur, – gravement touché après les attentats d’Al-Qaïda au Kenya en 1998 et 2002 – sont ensuite passés de 190 millions d’euros en 2002 à 617 millions d’euros en 2006. Pour ce secteur, les images d’émeutes et les violences qui ont touché Mombasa et la côte kényane ont un effet désastreux. Des capitales européennes, mais aussi Washington et Ottawa, ont déconseillé lundi les départs vers le Kenya, tandis que certains tours-opérateurs ont suspendu les voyages prévus. j |
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