«Please close the door ». Dès l’entrée de ses locaux, on perd la notion
d’être vraiment à Tunis. On se sent quelque part à l’étranger, dans un pays
où seule la langue de Shakespeare domine. A la limite, on se sentirait dans
des bureaux étrangers mais ayant un pied-à-terre à Tunis. Ce qui n’est pas
tellement faux, l’entreprise étant off-shore. Lui-même corrobore l’idée de
n’être qu’occasionnellement chez nous. Une petite mallette tout près de son
bureau laisse clairement entendre qu’il s’apprête à voyager. D’ailleurs, à
peine la conversation engagée que sa secrétaire vient le lui rappeler :
«Votre avion, c’est dans une heure». Il s’excusera en faisant remarquer
qu’il est souvent entre deux avions. Mais il ne se presse pas pour autant.
C’est un habitué des aéroports et du ciel. Il sait ce qu’il fait.
Visiblement, il a toujours su ce qu’il faisait.
L’air tout jeune malgré ses 43 ans, la voix grave et profonde, la démarche
imposante servie par un corps d’un grand athlète, l’homme ne semble avoir
aucun contact professionnel avec la Tunisie. Des dossiers jonchant son
bureau jusqu’aux conversations téléphoniques, pas un mot de Voltaire, et
encore moins d’Ibn Khaldoun. Même dans les deux salles contiguës, où
vingt-deux jeunes ingénieurs informaticiens composent directement sur leurs
claviers avec l’étranger, on n’entend guère –ou très peu– de mots en
français. Nous sommes dans les murs très fermés (comme la porte d’entrée) de
la Société ‘‘Integration Objects’’ créée en janvier 2002.
Le parcours de Samy Achour est à bien des égards assez particulier, en ce
sens qu’il semble avoir été esquissé méthodiquement dès le départ,
exactement comme le plan d’un bâtiment. Par conséquent, ses succès et ceux
de son entreprise ne peuvent surprendre, ils embrassent le droit fil de la
logique des choses.
Avec un bac français empoché à La Marsa, Samy voit soudain tout grand. Et la
grandeur, à ses yeux, réside aux…Etats-Unis vers lesquels il cingle en 1983
pour rafler, à University of North Carolina, un diplôme d’ingénieur en
électricité option informatique. Dans la foulée, il est classé cinquième de
sa promotion et membre de la National Engineering Honor Society, mais
deuxième au concours universitaire de l’Etat de la Caroline du Nord en avril
1984. Il enchaînera, pendant une année (1988-1989), avec des cours de Master
Business Administration au Furman University. Mais entre temps, de juin 87 à
avril 90, il se trouve chez Michelin, à Anderson, où il développe, entre
autres, des projets d’automatisme et d’informatique industrielle des chaînes
de production des produits finis.
En mai 1990, il passe à Houston chez SetPoint (appelée plus tard Aspen
Technology) qui en fait, au bout de seulement trois mois, Senior Application
Engineer, et où il est reconnu pour être spécialiste dans les applications
de base de données temps réel, contrôle avancé et optimisation, et où il
assure l’ouverture de comptes pour Dupond de Neimours, Exxon, Nestlé… Au
bout d’une année, il se voit attribuer le Prix du meilleur ingénieur en
support avant ventes.
C’est alors qu’il intègre en 1992 le géant Gensym qui en fait directeur
régional France jusqu’en 1995, puis vice-président de la division Europe,
Moyen-Orient et Afrique. Mais c’est là qu’il se montre l’homme des
plus-values. Après la création et le démarrage de la filiale française, il
lui assure une augmentation annuelle du chiffre d’affaires de l’ordre de 30
à 50% sur un portefeuille clients comprenant le Groupe Elf et France Télécom
pour ne citer que quelques uns. C’est simple : en 2002, la division
Europe-Afrique-Moyen-Orient atteint… 67% du chiffre d’affaires mondial de
Gensym. C’est tout dire.
S’il faut résumer en quelques mots le parcours de Samy Achour, on se
limitera à dire qu’il a derrière lui une bonne vingtaine d’années dans la
vente et la mise en service de solutions informatiques pour l’industrie,
qu’il a été à l’origine du développement de partenariat avec des sociétés
telles que ABB, Siemens ou Honeywell, et qu’il a d’excellentes connaissances
du marché pétrole et gaz.
Logique, donc, qu’il en arrive, en 2002, à fonder à Tunis sa propre
entreprise Integration Objects passée spécialiste dans les automatismes
industriels, l’informatique industrielle, la télégestion et les systèmes
d’aide à la décision.
Aujourd’hui, de grandes compagnies pétrolières figurent parmi ses
références, dont Saoudi Aramco.
Il est père de trois enfants qu’il voit entre deux avions…