[16/01/2008 15:44:35] BRUXELLES (AFP) La Commission européenne, soucieuse d’assurer l’accès à des médicaments plus efficaces et moins chers, a lancé mercredi une enquête sur les pratiques concurrentielles dans le secteur pharmaceutique en perquisitionnant chez plusieurs sociétés. “Les particuliers et les pouvoirs publics veulent un secteur pharmaceutique fort qui offre de meilleurs produits avec un bon rapport qualité-prix”, s’est justifiée la commissaire à la Concurrence, Neelie Kroes, lors d’une conférence de presse. La Commission a annoncé des perquisitions chez “un certain nombre de sociétés spécialisées dans les produits pharmaceutiques novateurs ou génériques” (copies moins chères de médicaments de marque NDLR), sans les identifier. Le français Sanofi-Aventis et le suisse Sandoz (groupe Novartis) ont confirmé des visites d’inspecteurs de la Commission. Les britanniques GlaxoSmithKline et AstraZeneca se disent aussi concernés. La Commission a déjà fait des enquêtes sectorielles dans les télécoms, l’énergie ou les services financiers. Mais c’est la première fois qu’elle commence par des perquisitions. Bruxelles assure n’avoir pas de soupçons spécifiques envers les sociétés visitées, mais avoir besoin d’informations souvent classées confidentielles par les entreprises qui rechignent à les communiquer.
Car Neelie Kroes veut s’attaquer à un sujet délicat, celui de la propriété intellectuelle. Elle ne remet pas en cause le système des brevets accordés aux laboratoires pour leurs nouvelles molécules, pas plus que les divers régimes d’assurance-maladie en vigueur dans l’UE ou les règles assurant la sécurité des médicaments commercialisés. Mais si les laboratoires n’en abusent pas. Bruxelles veut notamment examiner les accords entre entreprises, notamment pour règler à l’amiable certains litiges, ou encore vérifier que des sociétés ne multiplient pas les plaintes pour gagner du temps. Grignoter ne serait-ce que quelques mois d’exclusivité sur un brevet peut en effet rapporter gros, surtout quand il s’agit d’un médicament “blockbuster”, pesant plus d’un milliard d’euros de chiffre d’affaires annuel. Chaque Européen dépense en moyenne 400 euros par an pour des médicaments, soit un marché total de 200 milliards d’euros qui “ne fonctionne pas aussi bien qu’il devrait”, juge Neelie Kroes. “La protection des brevets n’a jamais été aussi forte, mais le nombre de nouveaux médicaments mis sur le marché décline”. Entre 1995 et 1999, en moyenne 40 nouvelles molécules sortaient chaque année. Sur la période 2000-2004, le nombre tombe à 28. Parallèlement, “les fabricants de génériques n’entrent pas sur les marchés aussi rapidement qu’attendu”, d’après la commissaire. “Sans nouveaux médicaments, la qualité de certains traitements médicaux va stagner. Sans produits génériques, le coût de certains traitements va rester élevé”, a-t-elle martelé. L’UE a déjà dans le passé sanctionné AstraZeneca pour avoir exploité les procédures administratives afin de freiner des médicaments génériques. Le secteur pharmaceutique est aussi dans le collimateur de plusieurs gendarmes nationaux de la concurrence. En Allemagne, l’Office anticartel avait perquisitionné en octobre chez Bayer, soupçonné d’accorder des rabais illégaux aux officines qui acceptaient de maintenir un prix élevé pour plusieurs de ses produits, dont l’aspirine. En France, quatre laboratoires dont Sanofi-Aventis avaient dû s’engager l’été dernier à assouplir leur système de distribution de médicaments. Un rapport intermédiaire sur l’enquête européenne est annoncé pour l’automne 2008, avec des résultats définitifs au printemps 2009. La Commission n’exclut pas d’ouvrir entretemps des procédures sur des cas individuels. |
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