[22/01/2008 16:40:08] BOCHUM (AFP) Une cloche sonne le glas, un cercueil suit, enveloppé du drapeau du géant finlandais: derrière, environ 15.000 personnes ont défilé mardi à Bochum (ouest) pour sauver l’usine Nokia, dont la fermeture annoncée a choqué tout le pays. “On est tous sous le choc, c’est simplement incroyable que des milliers d’emplois soient détruits, qu’on délocalise en Roumanie et que ces firmes touchent des subventions partout où elles vont”, lâche Timo Tasche, la trentaine, dont la pancarte proclame: “Bochum se défend”. Partout, les mêmes casquettes rouges, les mêmes drapeaux aux couleurs de l’influent syndicat allemand de la métallurgie et de l’électrotechnique IG Metall avec pour seule exigence: “Nokia doit rester”. Le slogan favori de la marque de portables est détourné: “Nokia, disconnecting people” (déconnecte les gens, ndlr). “Je n’arrive toujours pas à réaliser”, souffle Kerstin Stennei, 40 ans, salariée de Nokia depuis treize ans. “Je l’ai appris à la radio, tout était déjà réglé. Pourtant, l’usine tournait bien, on faisait des bons chiffres. Cela ne se fait pas, c’est tout”. La semaine dernière, Nokia a annoncé, à la surprise générale, la fermeture de la dernière usine de portables du pays, et sa délocalisation en Roumanie. En cause: le coût du travail plus élevé en Allemagne.
“Pendant des années, nous avons travaillé à baisser les coûts du site, on a supprimé des jours de congé, fait des heures supplémentaires, accepté la flexibilité pour sauver l’usine”, dénonce Gisela Achenbach, responsable syndicale de Nokia. “En mars, nous allons probablement recevoir une prime pour nos bons résultats… en même temps que notre lettre de licenciement!” Environ 2.300 emplois, sans compter les milliers d’indirects, sont menacés au coeur d’une région, la Ruhr, qui peine à se remettre de la fermeture des mines et des industries traditionnelles. Près de 2.000 salariés de l’usine Opel voisine, sauvée de justesse en 2005, plusieurs centaines d’employés de Ford ou du sidérurgiste Thyssenkrupp ont d’ailleurs participé au défilé. “Il ne s’agit pas seulement de Nokia, mais de toute l’économie sociale de marché allemande”, explique Theodor Rick, 42 ans, ouvrier chez Ford. “Il pourrait nous arriver exactement la même chose”. L’émotion suscitée par la fermeture de Nokia dépasse largement les frontières de la ville ou de la région. “Tout IG Metall, du nord au sud, de l’est à l’ouest est à vos côtés”, a ainsi clamé lundi à Bochum le chef du premier syndicat allemand Berthold Huber. “La constitution allemande proclame que la propriété privée doit servir l’intérêt général. Cela vaut aussi pour Nokia”, a-t-il ajouté. Concluant: “Alors, s’il reste une étincelle de décence à sa direction, qu’elle revienne sur sa décision!” De l’extrême-gauche aux conservateurs de la CDU, tous les partis politiques avaient également envoyé une délégation pour marquer leur “solidarité”, voire relayer les appels de plus en plus nombreux au boycott de la marque. “Le gouvernement comprend votre émotion, votre inquiétude et votre colère”, est venu déclarer aux manifestants le secrétaire d’Etat à l’Economie Hartmut Schauerte, évoquant une nouvelle “choquante”. “Nokia a une image, mais aussi un marché à perdre”, a-t-il ajouté, répétant que “l’Allemagne est un pays concurrentiel”. Interrogée par la radio NRD, la chancelière Angela Merkel (CDU) a d’ailleurs affirmé que le gouvernement “va faire ce qui est en (son) pouvoir pour aider les gens autant que possible”. |
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