[23/01/2008 07:16:52] WASHINGTON (AFP) La spectaculaire baisse des taux décidée en urgence mardi par la banque centrale américaine (Fed) a été accueillie par les économistes comme une bouffée d’air bienvenue, mais beaucoup craignent qu’elle ne suffise pas à conjurer les risques de récession. La Fed a pris les marchés par surprise en annonçant une réduction de trois-quarts de points de son taux directeur, ramené désormais à 3,50%. L’idée était de donner un électrochoc aux marchés — même si la Fed, pour ne pas être accusée de voler au secours des investisseurs imprudents, a bien pris soin de préciser qu’elle intervenait pour contrer les menaces qui planent sur la croissance. En fait “les marchés financiers et la Fed réagissent tous les deux au risque accru d’une récession américaine, et au danger que les Etats-Unis entraînent avec eux le reste du monde”, note Nigel Gault du cabinet Global Insight. Mais pour contrer ce risque, la décision de mardi ne suffira peut-être pas. Les analystes s’inquiètent en effet de la complexité de la récession qui s’annonce. Cette fois, ce n’est pas une baisse de la production des entreprises, une hausse des taux un peu trop brutale ou des sur-investissements (comme pendant la bulle internet) qui ont provoqué la crise. “Ce qui pousse l’économie mondiale vers la récession, c’est la détérioration rapide du système financier mondial. Ce qui a commencé comme un problème limité aux +subprimes+ aux Etats-Unis s’est transformé en resserrement du crédit au niveau mondial”, note l’économiste indépendant Bernard Baumohl. “Et il ne semble pas pour l’instant que cela cesse”, ajoute-t-il. Cela a renforcé les attentes d’une nouvelle baisse des taux de la Fed la semaine prochaine, lors de sa réunion des 29 et 30 janvier, qui pourrait atteindre un demi-point selon certains. “Même si la baisse d’aujourd’hui est agressive, compte-tenu de la fragilité des marchés financiers, il est difficile d’imaginer que la Fed se dispense d’une nouvelle baisse le 30 janvier”, estime Stephen Gallagher de la Société Générale. La banque centrale l’a elle même reconnu à mi-mots, en assurant qu’elle était prête à agir “en temps voulu, et si nécessaire”. Beaucoup d’économistes s’attendent désormais à voir le taux directeur baisser jusqu’à un plancher de 2,5%. Les analystes soulignent aussi que d’autres devront sans doute emboîter le pas à la Fed. “La Banque centrale européenne et les autres grandes banques centrales vont devoir baisser leurs taux elles aussi — et très prochainement”, a estimé M. Baumohl. La pression s’accroît notamment sur la BCE, dont le taux directeur, à 4%, est désormais largement supérieur à celui de la Fed. Mais ces assouplissements monétaires suffiront-ils à contrer la récession? Les analystes notent qu’il y a toujours un décalage entre les baisses des taux et leur effet sur l’économie — en d’autres termes, “cette baisse n’aura aucun effet pour soigner les problèmes économiques de 2008, mais cela pourrait préparer le terrain à un bon environnement pour 2009”, note Keith Hembre de First American Funds. D’autres s’inquiètent aussi de voir la Fed orchestrer ainsi un grand retour de l’inflation, en baissant ses taux alors même que les prix ont tendance à accélérer. “Les préoccupations sur l’inflation ont pour le moment été mises en sourdine,” constate Bon Eisenbeis, ancien vice-président de la Fed d’Atlanta. De plus, un grand nombre de paramètres échappent à la banque centrale dans l’équation du ralentissement américain, né de la correction de l’immobilier et de la crise financière. La Maison Blanche, qui avait présenté vendredi un plan de relance de 140 à 150 milliards de dollars, a fait savoir devant la réaction déçue des marchés qu’elle n’était par figée sur le montant, ce qui laisse attendre une enveloppe plus large. |
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