[28/01/2008 20:48:01] PARIS (AFP)
Le trader de la Société Générale (SG) Jérôme Kerviel a été mis en examen lundi soir notamment pour “abus de confiance”, “faux et usage de faux” et laissé en liberté sous contrôle judiciaire contre l’avis du parquet. Le courtier de 31 ans a quitté discrètement le pôle financier, où il avait été déféré en milieu de matinée à l’issue de 48 heures de garde à vue. Les décisions des juges d’instruction Renaud van Ruymbeke et Françoise Desset, saisis de l’enquête, ont été saluées comme une “victoire” par les avocats de M. Kerviel, accusé par la Société Générale de lui avoir fait perdre 4,9 milliards d’euros. Le parquet, qui avait requis la détention provisoire du trader pour garantir “les investigations” à venir mais aussi pour le “protéger” compte tenu de la “pression considérable (…) médiatique et professionnelle”, a décidé de faire appel de sa mise en liberté. C’est la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris qui devra statuer, à une date qui n’a pas été communiquée. M. Kerviel a été mis en examen en fin de journée pour “abus de confiance”, “faux et usage de faux” et “introduction dans des systèmes de données informatiques”. Les juges n’ont pas retenu “l’abus de confiance aggravé” et la “tentative d’escroquerie” requis par le parquet.
Le chef de mise en examen le plus grave, l’abus de confiance simple, est puni de 3 ans de prison et 375.000 euros d’amende. M. Kerviel est en “liberté, c’est une belle victoire mais ça n’est que justice”, s’est félicitée un de ses conseils, Elisabeth Meyer. “Le parquet a demandé trop de choses de façon inconsidérée. Avec calme et raison, les juges s’en sont tenus aux incriminations en-deçà de ce que le parquet réclamait”, a ajouté son collègue, Christian Charrière-Bournazel. Au cours de sa garde à vue, le courtier a reconnu avoir mené des opérations non autorisées par la banque dès la fin 2005, selon le procureur de la République de Paris, Jean-Claude Marin. Jusqu’à présent, la SG avait évoqué des opérations à partir de fin 2006. Néanmoins, les engagements financiers d’alors n’étaient “pas de l’ampleur” de ceux découverts par la banque le 18 janvier et qui avoisineraient les 50 milliards d’euros, a révélé le procureur. “En 2006 et en 2007, il a peu à peu effectué des prises de positions purement spéculatives”, a ajouté M. Marin. Si M. Kerviel a affirmé aux enquêteurs n’avoir “pas agi à son profit direct et personnel”, il a “admis”, selon le procureur, “avoir accompli certains actes et faits pour dissimuler” ses actions sur le marché. Selon M. Marin, le courtier, qui “espérait apparaître comme un trader d’exception”, a affirmé ne pas être le seul à faire prendre des risques à sa banque, d’autres traders agissant de même mais “à un moindre niveau”. Comme dimanche, les avocats de M. Kerviel ont clamé son innocence, dénonçant le spectre du “bouc émissaire”, tandis que le PDG de la banque, Daniel Bouton , l’a qualifié de “fraudeur formidablement dissimulateur”. Le président Nicolas Sarkozy a estimé qu’une telle crise “ne peut pas rester sans conséquence s’agissant des responsabilités”, y compris au plus haut niveau. Par ailleurs, des actionnaires ont annoncé, par la voix de leur conseil, le dépôt d’une plainte contre X pour “délit d’initié” et “manipulation de cours” après l’annonce de la vente de 85,7 millions d’euros d’actions de la SG le 9 janvier par un administrateur de la banque. L’Association des petits porteurs actifs a demandé, pour sa part, l’ouverture d’une information judiciaire. Au titre du contrôle judiciaire, M. Kerviel ne peut pas quitter le territoire, entrer en relation avec des salariés de la Société générale et exercer toute activité professionnelle ayant trait aux marchés financiers. |
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