Corruption au Bangladesh : des employés du gaz devenus multimillionnaires

 
 
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Siège de la compagnie publique de distribution du gaz du Bangladesh, Titas Gas, le 5 février 2008 à Dacca (Photo : Farjana Khan Godhuly)

[05/02/2008 12:24:01] DACCA (AFP) De simples employés du gaz au Bangladesh ont amassé des dizaines de millions de dollars de pots-de-vin, la fortune de l’un d’eux atteignant même 300 millions, ont révélé mardi les autorités face au plus grand scandale de corruption de l’histoire de ce pays déshérité.

“Ils sont quasiment tous millionnaires dans cette compagnie! Ils ont accumulé des millions au détriment des millions de pauvres du pays”, enrageait mardi le chef de la commission gouvernementale anticorruption, le colonel Hasan, en dévoilant “des vols d’une ampleur inimaginable” au sein de la compagnie publique de distribution du gaz, Titas Gas.

La palme revient à un ancien représentant de commerce, Abdul Kader Mollah, qui ne gagnait officiellement que cent dollars par mois, mais qui a réussi à siphonner 145 millions de dollars de dessous-de-table en douze ans de carrière.

Jusqu’à son départ de Titas Gas en 1997, M. Mollah sous-facturait consciencieusement aux milliers d’usines clientes et obtenait en retour une gratification.

“Il supervisait la distribution du gaz dans la plus grande zone industrielle du pays. C’est là qu’il faisait de l’argent. En douze ans, il est devenu multimillionnaire”, a raconté le colonel Hasan, encore “estomaqué” par le forfait de ce Bangladais de 46 ans qui était “redouté de tous” et bénéficiait d’appuis syndicaux et politiques.

Le scandale autour de la fortune de M. Mollah, estimée aujourd’hui à 300 millions de dollars, a éclaté après que les autorités eurent lancé en 2007 une enquête sur les comptes de la compagnie nationale de distribution du gaz.

Mais M. Mollah n’a pas été arrêté et a même riposté mardi en s’offrant des encarts dans onze journaux pour affirmer n’avoir gagné que 66 millions de dollars en travaillant dur pour Titas Gas, puis grâce à sa reconversion dans la dynamique industrie textile nationale.

Et M. Mollah n’est pas le seul multimillionnaire de Titas Gas, le premier distributeur de gaz du Bangladesh, contrôlant 80% du marché local avec un bénéfice annuel de 37 millions de dollars pour 557 millions de chiffre d’affaires.

Au moins 80% des 2.800 employés de la société ont amassé des millions de dollars en sous-facturant leurs prestations en échange de pots-de-vin, accusent aussi les autorités.

Seuls 127 salariés ont consenti à restituer les sommes indues.

Le Bangladesh est l’un des pays les plus corrompus au monde, d’après l’organisation Transparency International.

Le gouvernement intérimaire qui a pris le pouvoir le 12 janvier 2007, avec l’appui de l’armée et sous l’état d’urgence, a lancé une grande bataille contre la corruption visant l’ancienne classe dirigeante. Quelque 150 responsables politiques, hommes d’affaires et hauts fonctionnaires ont été placés en détention.

Parmi eux, l’ex-Premier ministre Mme Khaleda Zia a été emprisonnée en septembre, poursuivie pour détournements de fonds. Sa grande rivale et également ancien Premier ministre, Mme Sheikh Hasina Wajed, est en procès depuis fin janvier, accusé d’avoir extorqué 435.000 dollars auprès du patron d’une compagnie d’électricité.

Corrompu dans toutes ses couches sociales, le Bangladesh reste l’un des pays les pauvres du monde: 40% des 144 millions d’habitants vivent avec moins d’un dollar par jour.

 05/02/2008 12:24:01 – © 2008 AFP